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Des
échos de désobéissance civile parviennent de plusieurs localités du pays,
particulièrement de la wilaya de Bejaïa où «toutes les administrations sont
fermées, c'est la grève générale».
C'est ce qui a été affirmé hier par des citoyens qui se plaignent de la paralysie de toute une région, ses administrations et ses services publics. Il est craint que l'effet de contagion se propage au-delà, dans d'autres wilayas. L'évidence est que de nombreux mouvements de contestation éclatent quotidiennement un peu partout à travers le pays. Ce sont les localités dépourvues de tout service public basique, tel la distribution de l'eau, de l'électricité ou la garantie de prise en charge et des soins dans les milieux hospitaliers. Les coupures d'eau intempestives sévissent depuis de longs mois dans plusieurs régions. Le complexe de Sidi Fredj joue au yo-yo avec l'AEP depuis plusieurs jours exceptées quand les robinets gouttent pour quelques minutes. La colère des parents et citoyens d'El Oued après le décès de 8 bébés prématurés dans la nuit du lundi à mardi suite à un incendie dans la salle des couveuses établit, si besoin est, le laisser-aller, l'inconscience et la suffisance de personnels censés ne pas fermer l'œil pour préserver la vie de l'ensemble des patients. Mais c'est le drame dans toute son horreur. Drame où les adultes, patients hospitalisés et employés de l'hôpital ont pu être sauvés par les agents de la Protection civile, mais les bébés prématurés non. Preuve en est que la salle n'était pas surveillée et n'avait même pas de personnels de garde. Il est techniquement impossible qu'une étincelle produite par une masse provoquée par un appareil électrique contre les moustiques se transforme aussi rapidement en un incendie qui a ravagé toutes les structures de l'hôpital. D'autant que, selon les images, la construction n'est pas en préfabriqué ou en bois. La brique rouge et la menuiserie aluminium étaient assez visibles dans les décombres causées par cet effrayant sinistre. La responsabilité humaine est flagrante. Ne serait-ce que parce que, comme l'a dit le professeur Mustapha Khiati, «les bébés prématurés ont été laissés tous seuls dans les couveuses loin de leurs mères». Les insultes obscènes des parturientes Le président de la Forem a noté que «cette manière de faire est ancienne et date des années 50». Terrassées par la terrible nouvelle, des femmes d'El Oued témoignaient de leur mauvaise prise en charge dans l'hôpital Mère et Enfant. «On nous insulte, on nous crie dessus alors qu'on est venues pour accoucher», disaient-elles. Une telle situation dégradante n'est pas nouvelle. Elle est consacrée dans l'ensemble des maternités du pays. Les mauvais esprits auront à le démentir mais les faits sont non seulement ineffaçables mais courants et quotidiens. Il y a certes des médecins, sages-femmes et infirmières qui s'acquittent de leurs tâches avec abnégation, mais tous les Algériens savent qu'ils se comptent sur les doigts d'une seule main. Il est connu que dès qu'elles commencent à crier, les parturientes sont malmenées et insultées pour leur rappeler vulgairement que quand elles ont conçu leurs bébés, elles n'avaient pas crié...La décadence du comportement d'employés qui pensent détenir le droit de vie ou de mort sur leurs patients dans l'ensemble des structures hospitalières et sanitaires du pays n'a rien d'un fait nouveau. Elle fait des ravages depuis la nuit des temps sans que les responsables ne s'en émeuvent. La sagesse populaire a toujours prié pour que l'être humain ne subisse pas les affres de «l'hospitalisation et du tribunal.» La justesse de la perception est prouvée. Qualifiés de mouroirs, les hôpitaux le sont tous même si dès leur construction ils sont équipés de matériels de dernière génération. Les pannes sont courantes et la maintenance inexistante. A partir d'El Oued, le ministre de la Santé a reconnu que «la prévention et la maintenance ne nécessitent pas de moyens, il faut que les installations soient contrôlées et vérifiées régulièrement» Ce qui n'a pas été fait à l'hôpital d'El Oued, et pas seulement. La dégradation des infrastructures nouvellement construites est flagrante, et ce par manque de suivi, de contrôle et de maintenance. Des experts ont de tout temps attiré l'attention des pouvoirs publics sur les conséquences désastreuses d'un tel laisser-aller. Des centres universitaires fraîchement réceptionnés ont leurs toilettes pourries à cause du manque d'eau et de l'indigence des individus, personnels administratifs, enseignants et étudiants. Quand les mentalités s'érigent en forces de blocage Le ministre de la Santé qui a avoué mardi dernier l'absence de maintenance et de prévention à l'hôpital d'El Oued est le même qui a vanté la décision du gouvernement Bedoui d'augmenter de 150% les salaires des médecins qui activent dans le sud du pays. Depuis la grève des médecins résidents qui a coûté très cher aux hôpitaux en services, complications médicales et même en vie (refus de prendre les prélèvements pour des analyses, d'assurer les consultations et les urgences...), le gouvernement a décidé de revoir à la hausse tout ce qui touche aux moyens financiers et matériels de cette corporation. C'est dire qu'il existe des médecins résidents qui pensent qu'ils rendent service à l'Etat en acceptant des postes dans le sud du pays et qu'ils doivent donc être rémunérés en conséquence. Pour eux, ils exercent une profession de haut niveau, voire de luxe. Les citoyens qu'ils auscultent sont forcément de seconde zone. Aucun indice d'émancipation des mentalités n'est visible dans ce fait accompli répandu dans tout le pays et dans l'ensemble des catégories socioprofessionnelles. Les exceptions seraient pour confirmer éventuellement la règle. Ce genre d'indice ne l'est ni au plan politique, ni économique, ni social, encore moins citoyen. Le changement voulu par les Algériens, s'il ne passe pas impérativement par l'assainissement mental du secteur sanitaire, de la justice et de l'éducation nationale, sera vain. L'école, la santé et le tribunal constituent incontestablement les fondements de l'Etat de droit. En Algérie, ils reflètent l'échec patent de politiques publiques populistes et la conjugaison de mentalités de gestionnaires et de citoyens érigées partout en forces de blocage. |
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