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Entre
1971 et 1973, les crises monétaires ne s'atténuent pas. Malgré le mécanisme du Serpent
monétaire européen pour stabiliser les monnaies européennes entre elles et le
dollar, la situation reste toujours conflictuelle entre les puissances
occidentales sur le plan monétaire.
Si les Banques centrales européennes refusaient de soutenir le dollar, et de plus ont adopté le régime de changes flottants pour se protéger des émissions massives de la Banque centrale américaine (Fed), les États-Unis auraient alors de grandes difficultés pour financer leurs déficits commerciaux. Vu que les changes flottants obéissent à la loi de l'offre et la demande de monnaies sur les marchés, un excès d'une monnaie sur les autres ne fera que se déprécier obligeant la Banque centrale émettrice à arrêter ses émissions monétaires voire même racheter sa propre monnaie en mettant ses devises sur les marchés. Une telle situation freinera les États-Unis d'injecter plus que nécessaire des liquides monétaires. Le problème qui se posait à cette époque est celui-ci. Puisque ce sont les États-Unis, par leurs déficits extérieurs, qui soutenaient la croissance économique mondiale, quel pays pourrait remplacer la locomotive qu'est l'Amérique sur le plan mondial ? En clair, sans ces déficits, le monde serait privé de moteur. Or, les États-Unis étaient en difficulté financière avec les pays d'Europe. Les pays d'Europe refusaient les dollars US qui n'étaient pas adossés à des contreparties productives, s'assimilant à un financement gratuit des déficits commerciaux américains par la création monétaire. Le problème des États-Unis, dans le financement de leurs déficits commerciaux avec l'Europe, reposait essentiellement sur les contreparties productives qui manquaient à leurs émissions monétaires. S'ils trouvaient les contreparties physiques nécessaires, leur problème serait résolu. Ils amèneraient leurs partenaires commerciaux européens à accepter de nouveau les dollars. Précisément, c'est là où entre la donne pétrolière. Le pétrole est utilisé dans toute activité productive ou domestique dans le monde. C'est le pétrole et le gaz qui font tourner les centrales électriques, et donc la production industrielle et manufacturière. Et aussi les transports routiers, ferroviaires, maritimes, aériens, et la vie domestique, par conséquent, le pétrole est donc partout d'une manière directe ou indirecte dans toute activité humaine. Et il est meilleur que le charbon en termes de coût d'exploitation, de transport et de pollution. Aussi, se posait cette équation pour la 1ère puissance du monde. Si l'or-métal a permis aux États-Unis d'imprimer des masses de billets de dollars et que ce n'était plus possible à l'époque, qu'ils étaient obligés de mettre fin à la convertibilité du dollar en or par l'insuffisance d'or dans leurs stocks, la solution était simplement de remplacer l'or-métal par une autre matière première qui aurait la même fonction. C'est-à-dire une matière première qui soit recherchée par l'ensemble des nations du monde. Précisément, ils avaient le pétrole des pétromonarchies arabes, presque inépuisable qu'ils n'ont pas besoin de stocker comme l'or-métal, il est, comme énergie fossile, déjà stocké dans des gisements sous terre. Et, comme ils sont les protecteurs de ceux qui détiennent les plus grands gisements du monde, i.e. les pétromonarchies arabes du Golfe, rien de plus simple que de demander à leurs protégés de facturer leurs transactions pétrolières en dollar US. C'est ce qui s'est passé lorsque les pays arabes du Golfe décidèrent d'augmenter le prix du pétrole lors de la guerre du Kippour (quatrième guerre israélo-arabe), et qui n'a été en fait qu'un moyen politique détourné pour l'Amérique de se décharger sur une partie tierce dans l'augmentation du prix du pétrole. Car si c'était réellement les pays arabes qui avaient augmenté unilatéralement le prix du pétrole, pourquoi alors maintenir les transactions pétrolières arabes en dollars ? En une autre monnaie que le dollar, c'était plus indiqué pour les pays arabes de montrer leur désapprobation de l'aide militaire que les États-Unis avaient fourni à Israël. Or, ce n'était pas le cas, le Moyen-Orient était et est toujours une chasse gardée des États-Unis, d'autant plus que la survie des régimes politiques absolutistes des pétromonarchies du Golfe dépend entièrement du parapluie nucléaire américain. En conséquence, par la donne pétrolière, les États-Unis se trouvaient libérés des contraintes européennes. En augmentant des liquidités pour financer ou plus simplement de monétiser leurs déficits extérieurs, l'Amérique répercutait en fait ses déficits extérieurs sur le reste du monde. Son statut de première puissance dans le monde le doit de nouveau à ce pouvoir de créer et d'augmenter de la monnaie à partir de rien (planche à billet) mais adossée à l'augmentation du prix du pétrole. Les pays importateurs de pétrole (Europe, Japon...) se trouvaient obligés à acheter des dollars sur les marchés pour régler leurs importations de pétrole en provenance des pays arabes. La facturation du pétrole en dollar s'est étendue aux autres membres du cartel pétrolier, l'OPEP. Aussi faut-il souligner si les États-Unis n'avaient pas procédé à la substitution de l'or-métal par l'or noir, et qu'il n'y aurait pas eu de choc pétrolier en 1973, et donc ni inflation, le monde se serait dirigé vers une déflation mondiale nous rappelant la Grande dépression des années 1930. Force de dire que la hausse du prix du pétrole suivie de la hausse des matières premières et des produits finis avait une portée historique. Elle a eu un impact positif sur l'économie mondiale puisqu'elle a maintenu les États-Unis, dans leur statut de principal moteur de l'économie mondiale, et plus encore, en leur adjoignant un deuxième moteur que sont les pays exportateurs de pétrole et de matières premières. Ce transfert du pouvoir d'achat aux pays du reste du monde a permis de doper l'industrie occidentale. Ce qui signifie en clair que ce n'est pas l'enrichissement des États-Unis et des pays arabes qui est le plus important, mais le moyen historique qui s'est développé pour préserver l'emploi en Occident et dans le monde. D'autre part, les pays d'Europe n'ont pas tant perdu puisque en tant qu'émetteurs de monnaies internationales recherchées par tous les pays du monde, et face aux déficits commerciaux enregistrés suite à la hausse des prix de pétrole, ils ont aussi, à l'instar des États-Unis, émis massivement des liquidités pour équilibrer leurs balances commerciales. Ce qui nous fait dire que le pouvoir de seigneuriage sur le monde, appelé encore le pouvoir exorbitant qu'ont les États-Unis, est, dans un certain sens, partagé avec l'Europe et le Japon. A chaque déficit commercial, les États-Unis émettant plus de dollars, ils sont suivis par les pays européens. Ce surplus de création monétaire sans fin, sans contreparties de richesses productives, adossé au pétrole et qui a impacté les autres matières premières et produits finis, et qui, néanmoins nécessaire pour financer les déficits occidentaux, en particulier américain, et permis des excédents commerciaux aux pays du reste du monde qui ont besoin de devises internationales pour leur commerce extérieur, a de nouveau provoqué, en mars 1979, un second choc pétrolier. Le grand inconvénient dans ces émissions monétaires de part et d'autre de l'Atlantique est qu'elles ont fait monter l'inflation. Une spirale inflationniste s'est engendrée qui, à deux chiffres, mettait en danger le système monétaire international, rendant vulnérable le commerce extérieur aux chocs de change. Aussi peut-on dire que si la hausse du pétrole a permis d'équilibrer dans une certaine mesure les échanges économiques entre le Nord et le Nord, et le Nord riche et le Sud pauvre, tout n'est pas acquis avec le pétrole bien qu'il relève de conjonctures historiques de portée mondiale dans l'équilibre de puissance. Comme on le verra dans la disparition de l'URSS qui s'est opérée sans guerre, uniquement par le travail des forces économiques. Krachs pétroliers, endettement mondial, chute du mur de Berlin, fin de l'URSS Evidemment le processus inflationniste comme il s'était développé ne pouvait durer indéfiniment. La spirale des déficits occidentaux et leur monétisation nécessitaient forcément un troisième choc pétrolier. D'autant plus que les pays arabes, d'Afrique et d'Amérique du Sud n'ont pas fait bon usage de la masse de pétrodollars qu'ils ont reçus. Des usines clés en main, produits en main, n'ont jamais réellement fonctionné. Des détournements massifs de capitaux arabes, africains et sud-américains sont allés grossir les avoirs des banques américaines et européennes. Et étrangement, le recyclage des pétrodollars que les pays arabes, africains, sud-américains, investissaient en Occident, et généralement aux États-Unis pour éviter une dépréciation du dollar, ce qui, trop forte, annulerait le principe d'usage même du pétrodollar, a aussi un paradoxe, celui des prêts que leur concèdent les institutions multilatérales telles le FMI et la Banque mondiale. Provenant en bonne partie de leurs placements, les pétrodollars leur sont retournés sous forme de prêts, les ligotant en fait dans l'endettement. Le plus incroyable, les pays arabes, par exemple, ne comprenaient pas le processus, pensant même qu'ils allaient, par l'arme pétrolière, imposer un Nouvel Ordre Economique International (NOEI), alors qu'en réalité, ils n'étaient que des instruments dans la stratégie américaine pour dominer le monde. Et c'est ce qui s'opéra à la fin de l'année 1979, le nouveau gouverneur de la Banque centrale américaine, Paul Volcker, pour combattre la spirale inflationniste, relevait brusquement le taux d'intérêt directeur à court terme, le faisant passer de 10 % à plus de 20 %. L'inflation atteignait cette année 15%. Si la mesure prise par la Fed a été sévère mais nécessaire pour lutter contre l'inflation, en revanche, les pays du reste du monde ont été frappés soudainement par l'endettement. Du jour au lendemain, les dettes libellées en dollars montèrent, vu la hausse des taux d'intérêt américain et l'appréciation considérable du dollar sur les marchés monétaires. L'afflux massif de capitaux vers les États-Unis a porté le taux de change du dollar à des sommets sans précédent. De même, les Banques centrales de France, du Royaume-Uni, d'Allemagne et du Japon qui ont tous relevé leur taux directeur pour lutter contre l'inflation et limiter la fuite des capitaux, ont, de même que les États-Unis, fait exploser les dettes extérieures contractées par les pays du reste du monde. L'inflation certes a fortement baissé, passant de 15% à 3,2%, en 1983, mais à quel prix ? Un endettement généralisé du reste du monde. Une grave récession a sévi aux États-Unis, en 1982. Le taux de chômage aux États-Unis a doublé, passant de 5,7 % en 1979 à 10,8 % en 1982, et 10,4 % en 1983 (Données statistiques américaines). La Fed, en serrant le robinet monétaire a, par l'endettement, mis en difficulté pratiquement l'ensemble des pays du monde. Une politique d'austérité à l'échelle mondiale. D'autre part, les États-Unis se sont lancés dans des réductions massives d'impôts dopant la consommation intérieure, des dépenses d'armements (guerre des étoiles), ce qui a creusé encore plus les déficits budgétaires et courants durant les deux mandats de l'administration Reagan. Il est évident qu'en augmentant le taux d'intérêt et en diminuant les émissions monétaires, donc siphonnant les liquidités internationales attirées par la hausse du taux d'intérêt, le taux de change du dollar US s'appréciant et en même temps faisant baisser l'inflation, le pouvoir financier américain a sans difficulté financé ses déficits budgétaires et courants. Qu'il répercute en fait sur le reste du monde. La hausse du prix du pétrole maintenue après le deuxième krach pétrolier - le prix du baril est passé de 12 dollars à 36 dollars, dans la première moitié de la décennie 1980 -, a permis de contrecarrer la dépréciation du dollar US par la demande de dollars pour le règlement des importations pétrolières en provenance des pays d'OPEP. Bien que l'inflation ait fortement baissé aussi en Europe et au Japon, leurs monnaies se sont fortement dépréciées face au dollar. A cette situation conflictuelle entre les États-Unis et l'Europe, la hausse des prix du pétrole (2ème choc pétrolier) a engendré encore plus de déficits de leurs balances commerciales. C'est ainsi que le franc français est passé de 4,066388 FR/USD, en décembre 1979, à 10,111696 FR/USD, en mars 1985. Le deutschemark de 1,735014 DEM/USD, en décembre 1979, à 3,110070 DEM/dollar, en mai 1985. La livre sterling 0,454852 GBP/USD, en décembre 1979, à 0,911996 GBP/USD, en février 1985. Le taux de change du dollar a pratiquement doublé, en 1985, face aux monnaies européennes. (fxtop.com/fr/historique-taux-change) Mais les pays les plus touchés restent les pays du reste du monde qui ne sont pas émetteurs de monnaies internationales, par la hausse drastique de l'endettement vis-à-vis de l'Occident. Une inversion de transfert de richesses s'est produite, dans les années 1980, dans le monde. Si, dans les années 1970, une partie de la richesse mondiale s'est transférée au reste du monde, en particulier vers les pays exportateurs de pétrole, dans les années 1980, la richesse s'est inversée, elle s'est transférée vers les États-Unis, l'Europe et le Japon. On comprend pourquoi les États-Unis, par ces deux donnes géostratégiques majeures, le dollar et le pétrole - le pétrodollar -, régnaient et continuent de régner en maître sur le monde. Les États-Unis ont pratiquement une liberté totale dans les émissions monétaires dans le monde. Comme l'a affirmé, en 1972, John Connally, secrétaire d'Etat au Trésor sous la présidence Nixon : « Le dollar est notre monnaie mais votre problème ». Cependant, au-delà des problèmes de l'empire américain, la politique monétaire ultra-restrictive menée par les États-Unis s'avérait nécessaire car elle extirpait le mal à la racine. Destructrice quant à la valeur du travail, à la valeur de l'argent, à la valeur des biens, l'inflation, si elle s'était poursuivie, aurait constitué un danger pour l'économie mondiale. De plus, le succès de la politique monétaire et financière, la dépendance du reste du monde des marchés financiers, surtout avec la nouvelle donne l'endettement mondial, les États-Unis et l'Europe ont opté pour la dérégulation de leurs systèmes financiers. L'Occident trouvait rentable de libéraliser la finance mondiale. Une dérégulation des marchés financiers dans le monde permettait à l'Amérique et à l'Europe, grâce au recyclage des pétrodollars et à l'endettement, d'ouvrir les barrières protectionnistes qu'opposaient nombre d'États du reste du monde à l'Occident pour protéger leurs économies. Cependant, cette situation d'endettement mondial va avoir des conséquences graves sur les pays hors-Occident. En effet, des continents entiers (Afrique, Amérique du Sud, une partie de l'Asie, et le bloc socialiste de l'Est) ployaient sous le poids de l'endettement, dans les années 1980. Une situation de marasme et de faillite économique pour une grande partie du monde a fini par provoquer, en 1986, un contrechoc pétrolier. Le prix du baril de pétrole a atteint 8 dollars. En 1985, les grands pays occidentaux, prévoyant le retournement pétrolier, ont anticipé l'atterrissage en douceur du dollar. Grâce à la concertation des Banquiers centraux occidentaux, et les Accords de Plaza (New York) sur les taux de change, le 22 septembre 1985, les monnaies européennes ont fortement baissé face au dollar. Le franc français est passé de 8,665503 FR/USD, en septembre 1985, à 5,536810 FR/USD en décembre 1987. (Taux de change moyen mensuel) Même évolution pour le deutschemark et la livre sterling. Ce contrechoc pétrolier a eu aussi des conséquences sur les États-Unis. La crise de l'endettement mondial était telle qu'avec des prix très bas du pétrole, la Fed américaine s'est trouvée en difficulté dans les émissions monétaires ex nihilo pour financer les déficits commerciaux. Cherchant à aspirer les capitaux dans le monde comme en 1979, par une hausse du taux d'intérêt de la Fed, les États-Unis ont amené la RFA à anticiper, la Bundesbank a relevé son taux d'intérêt directeur pour parer une fuite de capitaux allemands vers les États-Unis. Ce qui provoqua une riposte immédiate de la Fed. Une injection massive de liquidités en dollars, créant une panique des investisseurs, et des retraits massifs de capitaux, se solda par un krach de Wall Street, le 19 octobre 1987. Selon les médias, 1000 milliards de dollars de capitalisation boursière se sont évaporés en une journée. Le voyage éclair du nouveau gouverneur de la Fed, Alan Greenspan, et du secrétaire américain du Trésor, James Baker, pour rencontrer en Allemagne, le ministre allemand de l'économie, Gerhard Stoltenberg, et le président de la Bundesbank, Karl Otto Poehl, ont permis de trouver un compromis, ce qui a permis d'enrayer la baisse du dollar et mis fin à la crise. Ce qu'il faut souligner c'est que l'endettement mondial a provoqué de profonds changements géopolitiques dans le monde. Chute du mur de Berlin, en 1989, fin de l'Union soviétique, en décembre 1991, éclatement de la Fédération de Yougoslavie, en 1992. Les États-Unis, à la tête d'une coalition internationale, sont entrés en guerre contre l'Irak, en 1991. Un autre événement majeur. La Chine se convertit à l'économie socialiste de marché, en 1980. Le Japon lui aussi s'est trouvé dans l'œil du cyclone. Depuis la réévaluation de sa monnaie par les accords de Plaza - le taux de change du yen est passé de 236,739103, en septembre 1985, à 127,701089 JPY/USD, en février 1989 - il a été frappé par la plus grave crise immobilière, financière et boursière de son histoire, en 1990. L'indice-phare de la Bourse Kabuto-cho de Tokyo, le Nikkei 225, est passé de son sommet historique de 38 957,44, le 29 décembre 1989, à 15 000, en 1992. Après plus de deux décennies depuis la crise boursière, le Japon est toujours enlisé dans la déflation. 2. Le pouvoir exorbitant du dollar et les pays émergents, les moteurs qui ont tiré l'économie mondiale dans les années 1990 Le retournement de la politique monétaire fortement restrictive de la Réserve fédérale américaine portait en elle cette grande mutation du monde qui a commencé à paraître dès le début des années 1980. Le monde tel qu'il était configuré était instable. Deux mondes s'affrontaient depuis 1945. Un monde devait disparaître. Le moins viable était le régime soviétique. Certes, ce régime était nécessaire pour la fécondation du nouveau monde tel qu'il était apparu à la fin de la Deuxième Guerre mondiale et le recouvrement des indépendances des pays colonisés, mais la situation a changé avec la montée de nouvelles puissances régionales. De plus, via leur absorption mondiale, les pays du reste du monde ont joué un rôle stabilisateur dans la croissance de l'économie mondiale. Et c'est une évidence « sans le reste du monde, les crises monétaires au début des années 1970 restant toujours pendantes, l'Occident serait parti pour une autre crise économique mondiale, comparable à celle de 1929 ». En outre, sur le plan démographique, les progrès dans les sciences, la technologie, l'industrie, l'agriculture, la médecine ont pour ainsi dire dopé la croissance de la population mondiale. De 2,2 milliards d'êtres humains en 1945, la population mondiale passait, en 1975, à 4 milliards. 25 ans plus tard, elle est à 6,1 milliards. Aujourd'hui, les services de l'ONU en comptent 7,794 milliards d'êtres humains vivant sur Terre. Et le monde se régionalisait en grands ensembles économiques. De vastes blocs économiques de libre-échange se construisaient pour parer aux crises économiques, ce qui leur octroie plus de résilience. Ceux qui n'entrent pas dans des ensembles économiques sont beaucoup plus vulnérables. Cette option s'appliquera même à l'Empire américain. La crise de l'endettement mondial et les difficultés économiques, financières, monétaires et militaires que rencontraient les États-Unis, pourtant première puissance du monde, les ont poussés à copier l'Europe. Ils se sont engagés dans une vaste zone de libre-échange, à l'échelle du sous-continent américain. En s'unissant au Canada et au Mexique dans l'ALENA, les États-Unis entendaient renforcer leur économie et celles de leurs voisins immédiats pour opposer une zone nord-américaine aux autres zones de libre-échange dans le monde. Le traité l'ALENA est entré en vigueur le 1er janvier 1994. La Fédération de Russie a fait de même avec la CEI (Communautés des États Indépendants). En Europe, l'organisation à l'échelle communautaire s'est affinée avec le traité de Maastricht, en 1992, qui institue une Union européenne et prévoie le lancement d'une zone monétaire, la zone euro. Le 1er janvier 1999, l'euro devient la monnaie officielle dans onze des quinze pays de l'Union. L'Amérique du Sud se régionalisait aussi. Une communauté économique regroupant plusieurs pays d'Amérique du Sud, le MERCOSUR, est lancée en 1991. En Asie, l'ASEAN+3 (Corée du Sud, le Japon et la Chine) est lancé en mai 2000 à Chiang Mai. Tous ces marchés régionaux visaient à faire front à la nouvelle donne du monde, la mondialisation. Seuls les pays arabes et africains manquent à l'appel. Les regroupements économiques dans le monde arabe et africain sont encore au stade de balbutiement. Ainsi constate-t-on que la régionalisation du monde à marche forcée témoigne que le monde est devenu à la fois trop grand, trop petit et surtout trop complexe. Cette régionalisation est marquée par une nouvelle donne, la troisième révolution industrielle, c'est-à-dire les Nouvelles technologiques de l'information et de la communication (NTIC). Internet constitue aujourd'hui un formidable instrument mondial d'information, de communication, d'une base de données unique au monde. Dans toutes les langues, dans toutes les disciplines scientifiques, technologiques, économiques, financières, monétaires, militaires, culturelles, médicales..., il contribue au rapprochement des peuples. Un simple clic et vous avez toutes les informations sur le monde, qui se comptent par milliers, centaines de milliers et millions de sites. Des renseignements et des explications sur n'importe quel domaine de la vie humaine sont donnés. Internet fait désormais partie du quotidien des êtres humains. Un autre aspect de l'économie mondiale qui a révolutionné les échanges et le commerce mondial, c'est la libéralisation financière (investissements massifs américains, européens, japonais et des pays riches asiatiques) qui a fait des prodiges. C'est elle qui a permis les délocalisations d'entreprises occidentales et non occidentales au coût de main-d'œuvre élevé comparativement aux pays à faible coût de main-d'œuvre. La libéralisation financière, les réformes et l'ouverture des pays d'accueil favorisant les délocalisations ont fortement stimulé l'économie mondiale. Un cycle de croissance économique vertueux qui s'est opéré entre 1993 et 2000 dans le monde a favorisé l'Occident, en tant que maître de l'œuvre de cette libéralisation puisqu'il leur a permis de sortir de la récession, d'abord les États-Unis en 1991-1992 et l'Europe en 1993-1994. Bien sûr, ces récessions sont en rapport au marasme économique mondial qui a sévi au cours de la décennie 1980. Et, de nouveau la dynamique des pays du reste du monde qui s'est matérialisée avec leur industrialisation, dont les pays que l'on appelle désormais les pays émergents, a tiré l'économie mondiale. Ils sont à l'origine de la nouvelle institution mondiale, le G20, groupant chefs d'Etats et de gouvernements. Créés en 1999 à Washington, le G20 est susceptible de remplacer le G7, club des pays riches défendant leur position dans le monde. Malgré les crises mexicaine de 1994, asiatique de 1997 et russe et brésilienne et le mini-contrechoc pétrolier en 1998, la croissance économique mondiale est repartie avec l'accélération de la frénésie de la consommation en Occident et dans le monde. Le boom des valeurs technologiques sera aussi très motivant dans la croissance mondiale. La Chine, bénéficiant du transfert massif d'entreprises occidentales y compris des NPI asiatiques, devenait un véritable eldorado pour les pays développés dans la production industrielle et manufacturière de masse. Elle se constitue progressivement en atelier du monde. Si tout globalement était positif en termes de croissance économique mondiale, la hausse du taux d'intérêt de la Banque centrale américaine, en 1999, et la hausse des prix du pétrole qui ont commencé la même année - le prix du baril a atteint 36 dollars à l'été 2000 -, en réponse à la nouvelle monnaie européenne (lancée le 1er janvier 1999) et qui cherche à partager le droit de seigneuriage (pouvoir exorbitant) sur le monde dont bénéficie le plus, le dollar US, et donc les États-Unis, va se terminer par l'éclatement de la bulle de l'indice des valeurs technologiques Nasdaq, à Wall Street (New York). Et ce dû à l'afflux massif de capitaux entre 1997 et 2000, suite aux crises asiatiques, russe et brésilienne, attirés par la hausse du taux d'intérêt de la Fed américaine. Ont joué aussi dans cette crise la perte de compétitivité de l'économie américaine, déjà structurelle par les délocalisations vers l'Asie, la Chine, en particulier, et un dollar fort renchéri par la hausse du taux d'intérêt directeur américain. Ce qu'Alan Greenspan, le président de la Fed, appelait l'exubérance financière n'a été en réalité que le résultat de manipulations monétaires de la Fed, qui entraient dans une stratégie financière américaine globale pour dominer le monde. Sauf que la faible compétitivité économique américaine y compris les autres économies occidentales face à la montée des pays émergents ne font que provoquer des crises économiques et financières à répétition dans les années 1990. Mais ce qui est nouveau, ce sont les délocalisations en Chine qui vont décupler sa puissance économique la transformant en premier pays exportateur du monde. Des exportations tous azimuts vers l'Asie, l'Australie, l'Europe, l'Afrique, l'Amérique du Sud, les États-Unis. Le made in China est partout dans le monde. Principal moteur mondial, entraînant avec elle toutes les économies du monde, une dépendance va s'installer entre la Chine, l'Occident et le reste du monde. 3. Les paradoxes de la guerre en Irak, du pétrole et de l'or dans la croissance économique mondiale dans les années 2000-2008 Le monde en janvier 2001 commence par l'entrée en récession de la première puissance du monde. Malgré les baisses précipitées du taux d'intérêt de la Fed qui l'a ramené de 6,5% en janvier à 1,75% en décembre 2001 (onze baisses), la situation financière américaine n'a pas cessé de se détériorer. La chute des indices boursiers, à Wall Street, s'étendait à toutes les places financières du monde. Mais un événement majeur va survenir et changer le cours de l'histoire. C'est l'attaque terroriste contre le World Trade Center, le 11 septembre 2001. La guerre menée en Afghanistan en 2001 et la chute du régime des Talibans influent peu sur l'économie américaine. Le marasme économique reste pressant partout dans le monde. Les crises boursières en cascades se poursuivent aux États-Unis et dans le monde, entre 2001 et 2002. Ce n'est qu'en 2003, avec l'occupation de Bagdad par les troupes américaines et l'euphorie de la victoire militaire que la reprise économique a commencé aux États-Unis. Comment comprendre ces crises boursières en cascade, entre 2001 et 2002 ? L'élément essentiel qui explique cette situation de crises boursières est la perte de compétitivité des pays occidentaux face à la montée en puissance des pays émergents. Malgré les baisses des taux d'intérêt aux États-Unis, en Europe et au Japon, presque au plancher, les différents plans de relance peinaient à relever les économies occidentales. Que reste-t-il à l'Amérique ? Son seul atout stratégique au niveau mondial est son droit de seigneuriage sur le monde, qui passe par le dollar, en tant que monnaie de facturation des transactions pétrolières des pays arabes. Qu'elle doit défendre coûte que coûte, le pétrodollar étant vital pour la 1ère puissance du monde. Depuis l'avènement de l'euro, la monnaie unique de la zone euro, la décision de l'Irak (sous embargo) de facturer ses exportations pétrolières contre nourritures en euros et non en dollar ouvrait une brèche au système monétaire international dominé par les États-Unis. Ce que les pouvoirs politiques et monétaires américains ne pouvaient accepter, l'hégémonie monétaire des États-Unis était en jeu. Si l'euro était utilisé dans la facturation des transactions pétrolières des autres pays arabes, les États-Unis ne pourraient alors plus bénéficier du pouvoir exorbitant de s'endetter gratuitement vis-à-vis de l'étranger. On comprend dès lors pourquoi les armes de destructions massives (ADM) n'étaient qu'un prétexte nécessaire pour les États-Unis d'attaquer l'Irak et mettre fin au pétroeuro irakien. Sauf que, ironie de l'histoire, la guerre contre l'Irak lancée en 2003 va prendre une tournure totalement différente. Elle s'avèrera un véritable désastre pour les États-Unis, en fait un Viêt Nam-bis au point qu'ils furent obligés d'évacuer leurs forces armées en décembre 2011, conformément aux accords irako-étasuniens (accords de la SOFA, 2008). Les plans américains sont totalement bouleversés. Les États-Unis, au départ, pensaient démettre le régime irakien et le remplacer par un régime aligné à eux comme les monarchies du Golfe, puis, dans un deuxième temps, démettre le régime islamiste iranien. C'est le contraire qui s'est produit, c'est l'Iran qui a triomphé et, par son programme d'enrichissement nucléaire secret dévoilé au grand jour en 2002, lui a permis de peser sur le situation géostratégique du Moyen-Orient. Donc, une guerre, au final, sans aucun gain pour les États-Unis. Pire s'est joint un 2ème désastre, celui de la crise des créances hypothécaires à risque dite en anglais subprimes. Une formidable bulle spéculative sur l'immobilier est montée de toutes pièces aux États-Unis. Utilisant tous les agents économiques américains, en particulier les ménages insolvables et encouragés par les banques pour contracter des crédits immobiliers, la bulle spéculative dans l'immobilier n'était qu'un moyen pour relancer l'économie américaine puisqu'il faut le rappeler, le marché des actions en bourse était en berne depuis les crises boursières en cascade entre 2001 et 2002. Par conséquent, la pierre était le seul créneau viable pour le pouvoir financier américain pour procurer une prospérité artificielle, et donc une image positive d'une Amérique victorieuse. Si les États-Unis s'étaient bien maintenus en Irak, les pouvoirs financiers auraient certainement pris des mesures pour atténuer la crise des subprimes, et donc elle n'aurait pas eu les conséquences qui ont commencé à apparaître dès 2006. Mais, avec les graves difficultés que rencontraient les forces américaines en Irak, la montée artificielle de l'immobilier américain grâce aux injections monétaires massives opérées par la Fed multipliées par le système financier américain ne pouvait se poursuivre indéfiniment. La Fed, ayant pris des précautions, parallèlement aux injections massives de liquidités, n'a pas cessé de relever le taux d'intérêt directeur. De juin 2003, à 1%, le taux d'intérêt directeur de la Fed passait, le 30 juin 2004, à 1,25%. En 17 hausses au total, depuis son niveau de 2003, le taux directeur a atteint 5,25% le 29 juin 2006. Cette hausse ininterrompue du taux d'intérêt américain, qui mettait en difficulté les ménages américains fragiles, a été le détonateur qui a fait éclater la bulle immobilière, en 2007. Le monde entier prit connaissance de cette crise des subprimes, qui porte sur les crédits hypothécaires à risque. Une année après, à l'été 2008, la crise immobilière se transforme en crise financière américaine puis mondiale. L'économie américaine s'est arrêtée du fait de la perte de confiance entre les banques dont les bilans, pour la plupart, étaient truffés de créances immobilières à risque. Il a fallu l'intervention de l'Etat fédéral américain, avec des plans de sauvetage massifs, pour débloquer l'économie américaine et ramener la confiance entre banques dans le financement de l'économie. Mais si la crise immobilière et financière a frappé durement l'Occident, il n'en est pas de même pour les pays du reste du monde. Les liquidités massives injectées, à partir de 2003, étaient telles que la hausse du prix du pétrole ne suffisait pas pour arrêter la dépréciation du dollar. Le prix du baril de pétrole a atteint 80 dollars en 2006, plus de 100 dollars entre 2007 et 2008. L'euro, en novembre 2003, cotait 1,20 dollar, en 2004, 1,35 dollar. Tout au long des années 2003-2008, il fluctuait entre 1,30 et 1,40 dollar. Même le cours de l'or était de la partie pour éviter une dépréciation massive du dollar par rapport à l'euro, la livre sterling et le yen, vu la masse de dollars dans le monde, sans commune mesure avec les autres monnaies internationales. Une situation de dépréciation ininterrompue qui serait insoutenable et pouvait provoquer un krach historique du dollar, mettant en danger tout le système monétaire international, avec des conséquences incalculables pour l'économie mondiale. Le cours du prix de l'once d'or est passé d'environ 300 dollars, en 2002, à 1000 dollars en 2008. Les transactions étant facturées en dollar, si le prix du métal jaune n'avait pas augmenté fortement, les cours du pétrole auraient probablement atteint les 200 dollars le baril. Et toutes ces augmentations du prix du pétrole et de l'or étaient en lien direct avec les dépenses de guerre et la consommation en Amérique. En juillet 2008, au plus haut de la crise, le prix du baril de pétrole a atteint 147 dollars, et le dollar sa plus forte dépréciation. L'euro a atteint un plafond, 1,6 dollar pour un euro. La fin de l'été 2008, la crise était à son sommet. Face à la crise financière mondiale, les États-Unis, pour la contrer, mettent en œuvre de grands moyens financiers. Ayant déjà injecté des liquidités en 2007 pour venir en aide aux banques, la Fed poursuit sa stratégie d'assouplissement monétaire non conventionnel ou Quantitative easing, en 2008. Le plan de sauvetage historique des banques de 700 milliards de dollars US, appelé Plan Paulson, a été adopté par le Congrès américain, le 3 octobre 2008, il constitue une partie du programme non conventionnel dit Quantitative easing 1. Que peut-on dire de la crise financière de 2008 ? Ce qu'on relève, au-delà de toute considération sur cette crise, c'est que de nouveau le pétrole a joué un rôle de premier plan dans la crise comme dans les guerres menées par les États-Unis. N'ont-ils pas mené la guerre contre l'Irak pour pérenniser leur emprise sur le Moyen-Orient, et donc sur le pétrole et son prérequis qu'est le dollar ? Sans le dollar, le pétrole aurait été une matière énergétique comme les autres sans portée géostratégique. Et, paradoxalement, cette guerre pour le pétrole, à partir de 2003, et les déficits publics et courants américains qui ont explosé, financés par la création monétaire ex nihilo (à partir de rien) ont permis aux pays émergents, en particulier la Chine, devenue le premier moteur tirant l'économie mondiale, et les pays exportateurs de pétrole d'enregistrer des excédents commerciaux massifs. Grâce à la forte montée des cours pétroliers, et à la facturation des exportations pétrolières des pays OPEP en dollar, durant pratiquement toute la décennie 2000. C'est ainsi que les réserves de change accumulées par les pays émergents et exportateurs de pétrole ont explosé entre 1999 et 2008. Les chiffres donnés par la Banque mondiale pour ces pays sont éloquents. En 2008, les réserves de change de la Chine passent de 161,414 M$ (milliards de dollars), en 1999, à 1966 M$. Les réserves de changes de la Russie de 12,325 M$, en 1999, à 426,279 M$, en 2008, de l'Arabie Saoudite de 18,321 M$, en 1999, à 451,279 M$, en 2008, de l'Inde de 36,005 M$, en 1999, à 257,423 M$, en 2008, du Brésil de 36,342 M$, en 1999, à 193,783 M$, en 2008, de l'Afrique du Sud de 7,497 M$, en 1999, à 34,07 M$, en 2008, de l'Algérie de 6,146 M$, en 1999, à 148,099 M$, en 2008. Alors que les dettes publiques occidentales ont augmenté fortement. Dont la dette extérieure est en forte hausse puisque corrélée à la hausse des réserves de change des pays du reste du monde. C'est ainsi que la dette publique des États-Unis est passé de 37,612 % du PIB, en 1999, à 64,032 % du PIB, en 2008. Celle du Royaume-Uni de 43, 62 % du PIB, en 1999, à 55,601 % du PIB, en 2008, de la France de 58,869 % du PIB, en 1999, à 64,901 % du PIB, en 2008, de l'Allemagne de 39,15 % du PIB, en 1999, à 41,987 % du PIB, en 2008, du Japon de 93,328 % du PIB, en 1999, à 139,798 % du PIB, en 2008. Cette situation complexe qui se termine négativement pour l'Occident va ouvrir voie à une nouvelle stratégie de défense pour parer à son endettement excessif. 4. Le rôle des quantitative easing dans la reprise économique mondiale Qui a gagné dans la crise financière de 2008 ? D'évidence, il apparaît que les grands perdants sont les économies occidentales qui ont été fortement secouées par la crise financière, en raison du dopage spéculatif de l'immobilier et de la consommation tirée artificiellement par les subprimes, crise qui est devenue mondiale. Il faut rappeler que le taux d'intérêt directeur américain, après 10 baisses, a été ramené de 5,25%, en 2007, à 0,25%, le 16 décembre 2008. Il restera inchangé pendant sept années, jusqu'en 2015. Pour parer à la crise, différents plans de sauvetage des banques (dont le plan Paulson en 2008) sous l'administration Bush, et des plans de relance après l'investiture d'Obama, ont été mis en œuvre dans le cadre du Quantitative easing 1 (QE1). En 2009, la situation économique des économies occidentales se détériore, obligeant les Banquiers centraux (Fed, BCE, BoE, BoJ), lors de leur sommet au G7 et à Jackson Hole, d'apporter une réponse fiable à la récession qui s'est généralisée à tout l'Occident, en 2009. La Réserve fédérale américaine (Fed) lance un deuxième Quantitative easing (QE2), en 2010. Après le Quantitative easing1 (QE1) américain qui a débuté en 2007 et pris fin en juin 2009, d'un montant de rachats de créances publiques et privées de 1700 milliards de dollars, un deuxième programme QE2 a pris effet, le 3 novembre 2010. La Fed rachetait pour un montant de 600 milliards de dollars de bons de Trésor américains et de titres privées (créances hypothécaires à risque), aux banques américaines, jusqu'à la fin du deuxième trimestre de 2011. Le montant du QE2 est passé à 1000 milliards de dollars, en juin 2011. De nouveau, en septembre 2011, et toujours pour baisser les taux d'intérêt des titres publics, la Fed lance l'opération twist. Semblable au QE2 sauf que les liquidités injectées étaient stérilisées, c'est-à-dire sans création monétaire. En fait, l'opération twist était un programme d'allongement des échéances, appelé « Matury Extension Program », qui consistait à vendre des bons de Trésor d'une échéance de moins de trois ans et, d'un montant équivalent, acheter des titres d'échéances plus longue, comprise entre 6 et 30 ans. Ce programme, d'une ampleur initiale de 400 milliards de dollars, et devait se terminer fin juin 2012, a été prolongé jusqu'à fin 2012. L'opération Twist n'a pas augmenté le bilan de la Fed. Le 13 septembre 2012, la Fed lance un 3ème programme de quantitative easing (QE3). Elle décide d'acheter pour 85 milliards de dollars d'actifs (dettes souveraines et créances privées) par mois, avec toujours le même objectif : peser sur les taux obligataires à la baisse et favoriser la reprise économique. La nouvelle présidente de la Banque centrale américaine, Janet Yellen, qui a remplacé Ben Bernanke, en février 2014, poursuit le QE3, programmé pour se terminer en octobre 2014, avec une diminution progressive d'un montant de 10 milliards de dollars par mois du montant initial de 85 M$. Le taux d'intérêt directeur de la Fed maintenu au plancher et le taux de chômage aux États-Unis continuant à se réduire. Les Banques centrales de la zone euro, du Royaume-Uni et du Japon suivent pratiquement la même politique monétaire que la Fed. L'objectif visé reste toujours la baisse des taux des titres publics et obligataires, la relance économique et éviter des écarts trop importants entre les monnaies occidentales. La zone euro a créé un Fond européen de stabilisation financière (FESF) de 440 milliards d'euros, en mai 2010. Ce fonds sert à racheter des dettes publiques et privées et à octroyer des prêts aux pays membres de la zone euro contre des garanties. Il sera remplacé par le Mécanisme européen de stabilisation (MES), en octobre 2012, pour un montant de 700 milliards d'euros. Le 22 janvier 2015, un Quantitative easing (QE) est lancé par la Banque centrale européenne (BCE), il prend effet en mars 2015 et court jusqu'en septembre 2016. Le rachat d'actifs par mois est fixé à 60 milliards d'euros par mois. Le 8 décembre 2016, le programme d'achat d'obligations souveraines a été prolongé jusqu'en mars 2017, le montant porté à 80 milliards de dollars par mois, avant d'être ramené à 60 milliards par mois entre avril et décembre 2017. La BCE ayant consacré à ce programme d'assouplissement quantitatif (QE) 1400 milliards d'euros depuis son lancement en mars 2015. (Site eurostat) Le Royaume-Uni a procédé à plusieurs QE. De même pour le Japon, des QE dits abenomics (du nom du Premier ministre Shinzo Abe) ont été lancés. Ce que l'on constate dans ces politiques d'assouplissement monétaire non conventionnel menées par les quatre grandes Banques centrales du monde, c'est qu'elles ont été accompagnées par une forte hausse des prix du pétrole. Hormis la période entre fin de l'été 2008 et mi-2009, où le cours a chuté, autour de 40 dollars, le prix du baril est rapidement remonté fin 2009, à plus de 70 dollars. En 2010, il était à 90 dollars. En 2011, à 110 dollars. A partir de cette date, le prix du pétrole s'est situé entre 110 et 130 dollars le baril. A partir de l'été 2014, avec la fin programmée du QE3 en octobre 2014, les prix du pétrole a commencé à se retourner. En décembre 2014, le prix du baril de pétrole a fortement baissé, à 60 dollars. Même évolution pour le prix de l'or. Comme la hausse des années 2001-2008, le cours de l'or est aussi de la partie pour éviter une dépréciation accrue du dollar face aux autres monnaies internationales. C'est ainsi qu'avec les quantitative easing déclenchés dès 2008, le prix de l'once d'or a atteint un record à 1967 dollars US, en août 2011. (Données de france-inflation.com/cours_de_l_or_historique). L'or jouant, au même titre que le pétrole, de pondérateur dans les émissions monétaires ex nihilo pour les rachats de titres publics et privés. Donc, sans la hausse du prix du pétrole et de l'or, les QE seraient impossibles à mettre en œuvre. La dépréciation continue du dollar amènerait les autorités monétaires américaines à mettre fin aux émissions monétaires sans contreparties productives. Et donc à résorber les déficits commerciaux par les propres moyens de la superpuissance, c'est-à-dire en diminuant les importations, à augmenter les impôts, à exporter plus de biens et services. Le monde alors aurait perdu un moteur vital pour la croissance économique mondiale. Pour ce qui est des intérêts que procurent les quantitative easing émis par les pays occidentaux, les premiers bénéficiaires sont certes les pays occidentaux puisque ces formidables masses de liquidités créées à partir de rien (pouvoir exorbitant) leur ont permis de sauver leurs systèmes bancaires et relancer leurs économies. Certains pays ont touché le fonds, l'exemple de la Grèce. Les QE ont aussi dopé la croissance économique mondiale, notamment les pays émergents et exportateurs de pétrole qui ont enregistré des excédents commerciaux interrompus jusqu'en 2014, et donc à accumuler des réserves de change. Les réserves de change de la Chine sont passés de 1,966 billion (1966 M$), en 2008, à 3,9 billion, en 2014. Les réserves de change de l'Arabie Saoudite, premier producteur et premier exportateur des pays de l'OPEP, sont passés de 451,279 M$ (milliards de dollars), en 2008, à 744,441 M$, en 2014. Pour l'Algérie, de 148,079 M$, en 2008, à 186,351 M$, en 2014. (Données Banque mondiale). La dette extérieure de l'Algérie est pratiquement remboursée, elle s'établit à 3,719 milliards de dollars. Corrélativement, les dettes publiques occidentales, à partir de 2008, ont explosé. La dette publique des États-Unis est passée de 64,062% du PIB, en 2008, à 96,372% du PIB, en 2014. La dette publique du Royaume-Uni est passée de 55,601% du PIB, en 2008, à 107,231% du PIB, en 2014. Il en va de même pour les autres pays. 5. La stratégie de défense de l'Occident face au reste du monde 5.1. L'objectif des quantitative easing pour désendetter l'Occident et diminuer les réserves de change accumulés par les pays du reste du monde Qu'en est-il réellement des quantitative easing menés par la Réserve fédérale américaine pendant sept années ? Et pourquoi commencés avec la crise financière en 2008, ils s'arrêtent brusquement au deuxième semestre de 2014 ? La réduction du QE3 par tranche de 10 milliards de dollars sur les 85 milliards de dollars mensuels débutée au début de l'année et, après huit mois, la Fed met fin au QE3. Quatre questions importantes se posent. La première, pourquoi la mise en œuvre des trois programmes QE1, 2 et 3, aux États-Unis, ont été accompagnés par une forte hausse du prix du baril de pétrole ? La deuxième, pourquoi les banques américaines commerciales ont été lestées d'une formidable masse de liquidités, dont une grande partie s'est retrouvée dans leurs comptes qu'elles ont auprès de leur Banque centrale (Fed) ? Ces masses de liquidités ont été pour ainsi dire stérilisées, ce qui en clair signifie qu'elles ne sont pas utilisées dans les crédits que ces banques accordent à l'économie. Alors qu'elles auraient dû fortement soutenir la relance économique, et donc plus rapidement relancer l'économie américaine. Les QE ont duré sept années, ce qui est long, La troisième question. Pourquoi l'inflation est restée faible alors que normalement elle aurait dû remonter ? La courbe de Phillips montre bien qu'au fur et à mesure que le chômage baisse, l'inflation s'accroît. Or, c'est le contraire qui s'est produit. Certes, au plus haut de la récession, en 2009, le taux d'inflation était négatif, -0,36%, il est ensuite remonté, en 2011, il a atteint 3,16%. A partir de cette date, il baisse malgré les injections massives de liquidités monétaires par la Fed américaine. En 2012, le taux d'inflation était de 2,07%, en 2013, de 1,46%, en 2014, de 1,62%, en 2015, de 0,12%. (Données Banque mondiales) Les États-Unis étaient en déflation, alors que l'inflation aurait dû remonter puisque le chômage a baissé fortement. La quatrième question, pourquoi le prix du baril de pétrole a fortement chuté, en concomitance avec la fin des quantitative easing américains ? La réponse parle d'elle-même, il existe un lien entre les quantitative easing et la hausse du prix du baril de pétrole. La mise en œuvre des programmes QE lancés par la Banque centrale américaine s'accompagnent de la hausse des prix du pétrole, pour la raison évoquée supra. La hausse des prix du pétrole constitue, par la forte demande des dollars sur les marchés, les contreparties productives qui manquaient aux émissions monétaires ex nihilo. Comme si le pétrole de l'OPEP appartenait aux États-Unis et les pays importateurs de pétrole (Europe, Japon, Chine...) doivent s'adresser à l'Amérique pour se procurer les dollars et importer des pays d'OPEP le pétrole. Le lien entre les QE et la hausse du prix du pétrole est incontestable. Comme dans les hausses et krachs pétroliers précédents. La hausse du prix du pétrole sert de contreparties productives aux émissions monétaires ex nihilo de la Fed. Sans la hausse du prix du pétrole, la Banque centrale américaine ne peut émettre des masses de liquidités en dollars, ex nihilo (adossés à rien), sinon à provoquer une dépréciation continue du dollar US qui se terminerait par une hyperinflation, un krach du dollar. Tous les investisseurs du monde fuiraient le dollar, mettant fin au privilège exorbitant du dollar. Maintenant il faut s'interroger pourquoi la déflation ? Il faut souligner que les pays d'Europe et le Japon dont les politiques monétaires sont synchronisées avec la politique monétaire américaine se trouvent aussi dans la même situation déflationniste. Les programmes de quantitative easing en fait s'instituent en stratégie des pays occidentaux face aux pays émergents et exportateurs de pétrole. Depuis 2003, ces pays se sont enrichis, accumulant des excédents commerciaux. Et donc accumulaient de formidables réserves de change. Cela s'est opéré en deux temps. Le premier temps de 2003, avec la guerre en Irak, jusqu'au déclenchement de la crise financière de 2008 (subprimes). Le deuxième temps, durant la mise en œuvre des programmes de quantitative easing aux États-Unis et des plans de rachats de dettes souveraines en Europe et au Japon, de 2008 à 2014. Les pays d'Europe et du Japon sont, avec les États-Unis, les principaux émetteurs des grandes monnaies internationales et qu'utilise le FMI dans son actif de réserve international, le DTS. Les programmes des QE que ces pays ont menés portent sur les rachats de titres souverains (bons de Trésor, obligations) et des titres privés, en particulier les créances hypothécaires à risque (subprimes). Pour les titres publics, leurs rachats massifs a été opéré alors que les prix étaient ont été très bas, le krach immobilier ayant impacté le marché obligataire. Pour les titres privés, ils sont adossés à des contreparties physiques réelles. Les habitats qu'ils soient saisis ou les délais rallongés pour les crédits à rembourser ont toujours de la valeur, de plus les Banques centrales les ont acquis à bas prix. Pour les États-Unis comme pour les pays d'Europe, lorsque le marché immobilier se reprend, les Banques centrales, remettant sur le marché les titres privés, feront même des bénéfices. Les remboursements par la revente de ces titres leur permettront de détruire les liquidités qu'elles avaient créées pour leurs achats. Au final, la création de liquidités à partir de rien pour les subprimes n'aura été que temporaire puisque ces liquidités ont été ensuite détruites. Concernant les bénéfices de leurs ventes, la Fed comme les autres Banques centrales occidentales les reverseront à leurs Trésors respectifs. Concernant maintenant le rachat des dettes souveraines. C'est le problème N°1 puisqu'il concerne la dette publique qui englobe la dette extérieure. Ce sont environ, à cette époque, selon les médias, 8 000 milliards de dollars de dette américaine détenue par les pays étrangers. Une importante part de la dette extérieure des pays d'Europe est aussi détenue par les pays étrangers. Beaucoup moins pour le Japon, dont la dette publique est détenue en grande partie par les nationaux. Il existe donc un impératif pour les pays occidentaux de dégonfler leurs dettes extérieures ce qui va permettre de diminuer leur dettes publiques. Dans plusieurs pays en Europe et aux États-Unis, elles avoisinent les 100% voire les dépassent. Précisément les dettes extérieures sont corrélées aux réserves de change essentiellement détenues par les pays émergents dont la Chine a la plus grande partie, environ 4000 milliards de dollars en 2014, et les pays exportateurs de pétrole dont l'Arabie saoudite, la Russie et l'Algérie. Quel lien existe-t-il entre les dettes extérieures occidentales, et donc les réserves de change détenues par les pays étrangers, et les quantitative easing ? La réponse parle d'elle-même. Si la Banque centrale américaine avait racheté massivement des titres de Trésor détenus par des Américains qui, contre leurs titres, avaient été remboursés, ces derniers se seraient amenés à les investir, à consommer ? Que serait-il passé ? Comme les créneaux pour investir sont très étroits, par perte de compétitivité et délocalisations d'entreprises en Chine et dans les autres pays à faible coût de main-d'œuvre, cela passera essentiellement dans les spéculations en Bourse (hausse des actions) et dans la consommation. Ce qui entraîne plus d'importation de Chine et d'autres pays. A suivre... |
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