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Le chef de la diplomatie de l'Angola: Le Maroc n'a pas à poser de conditions pour réintégrer l'UA

par Houari Saaïdia

  «Que les choses soient claires. Le Maroc a tout à fait le droit de faire partie de l'Union Africaine, quand bien même il en est sorti de son plein gré. Mais il est hors de question que le Maroc n'y rentre que si la République arabe sahraouie démocratique en sort. Le Sahara occidental est un Etat indépendant et membre fondateur de l'Organisation de l'Union Africaine, ancêtre de l'UA. Personne ne peut remettre en question cela».

Georges Rebelo Pinto Chikoti, ministre des Relations extérieures de la République d'Angola et représentant des pays africains membres du Conseil de sécurité des Nations Unies (A3), en réponse à une question au sujet de la demande officielle formulée par le Maroc pour la réintégration de l'UA, a catégoriquement rejeté, dans le fond et dans la forme, l'idée d'une requête d'intégration « sous condition ». « Il faut bien poser la question pour ne pas en arriver à cet imbroglio. Le Maroc veut rejoindre l'Union africaine. Tant mieux. C'est son droit. Mais, en aucun cas, il ne peut assortir cette demande d'une condition. Le Sahara occidental est un Etat indépendant qui a le droit de faire partie intégrante de l'UA, et il en est membre fondateur de fait. Cela ne peut être remis en cause par personne. Le Maroc n'a pas en revanche à occuper le territoire de cet Etat indépendant. Pas plus qu'il n'a le droit de remettre en cause l'appartenance de cet Etat à l'Union africaine, celle-là même qui avait reconnu la République arabe sahraouie démocratique et l'avait intégrée en son sein comme membre à part entière », a déclaré, hier à Oran, Georges Chikoti, qui s'exprimait en sa double qualité de chef de la diplomatie de l'Angola et représentant des pays africains membres du Conseil de sécurité des Nations Unies (le groupe A3), et ce, lors d'une conférence de presse tenue en marge du congrès africain de haut niveau sur la paix et la sécurité. En fait, c'était le conférencier lui-même qui a abordé le dossier du Sahara occidental au détour d'une petite introduction qu'il a tenu à faire avant de se livrer au jeu des questions-réponses. « Je ne clôturerai pas cette parenthèse sans évoquer le dossier lié au conflit du Sahara occidental, qui constitue un important dossier autant pour notre Union africaine que pour les Nations Unies », a-t-il noté lors de son propos introductif. De quoi provoquer presque automatiquement la question liée au fait d'actualité relatif à la demande formelle formulée par le Maroc, fin septembre 2016, ayant pour objet d'accéder à l'acte constitutif de l'Union africaine, et de la sorte en devenir membre, et tout le bruit politico-médiatique que cette démarche « surprise » du Royaume chérifien avait provoqué alors. « Pour nous, à l'Union africaine, il n'existe pas de corrélation entre les deux sujets. Nous avons, d'une part, une demande de réintégration d'un pays, qui en a le droit, et de l'autre part, un principe et un fait tout à fait indiscutables, à savoir que le Sahara occidental est un Etat indépendant et membre à part entière, fondateur même, de l'UA », a souligné encore Gorges Chikoti.

Et, a priori, ce n'est pas fortuitement qu'il a tenu à rappeler, dans le foulée, qu'à l'occasion du prochain sommet de l'Union africaine, prévu courant avril 2017 à Addis-Abeba, il y a aura l'élection de la présidence de la Commission de l'Union Africaine, pour désigner le successeur à Nkosazana Dlamini-Zuma, et ce, étant donné que ce sera par voie de vote de la Commission de l'UA que sera tranché le sort de la requête de réintégration introduite par Rabat.

Très mal perçu alors par les membres de l'OUA, ancêtre de l'UA, le départ avec fracas du Maroc, le 12 novembre 1984 au 20e sommet de l'Organisation à Addis-Abeba, l'acte récent commis par le même pays à l'occasion du sommet afro-arabe de Malabo, soit 32 ans plus tard, l'a été tout autant aux yeux des pays africains. « Le Maroc a très mal posé la question lors du sommet de Malabo et cela, à l'évidence, a déplu à l'ensemble des membres de l'Union africaine », a ajouté encore Georges Chikoti, en référence au geste, pour le moins maladroit, commis alors par le Maroc, qui, furieux de voir la présence de la délégation sahraouie (pourtant tout à fait logique et attendue), a claqué la porte du congrès, causant par sa démarche attentatoire à l'intégrité et à l'unité mêmes de l'UA, un incident de sommet avec la contribution de certains pays qui lui ont emboîté le pas.