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Imam Khomeyni... : Ou comment l'histoire de l'Iran présente son premier ayatollah

par G. O.



Né le 24 septembre 1902 à Khomein -d'où son patronyme-, l'imam Ruhallah al-Musavi Khomeyni avait passé 15 ans de sa vie en exil sous les pressions et les intimidations du régime du Shah Mohamed Reza Pahlavi. Elevé dans une famille religieuse dont le père avait étudié la théologie à Nadjaf en Irak, Khomeyni avait donc un cap tout tracé. Il avait opté pour les mêmes études que son père qu'il n'a pas connu puisqu'il avait, disent les Iraniens, succombé à la torture sous le régime de Reza Khan, père du dernier Shah d'Iran, et ce 6 mois après sa naissance. Il étudiera à Arak puis à Qom pour atteindre, est-il noté, «le niveau de l'Ijtihad» et être compté parmi «les plus grands maîtres dans la Hawza» (école de théologie scientifique de Qom). Il se mettra aussi à l'écriture pour consacrer «sa pensée» et sa vision de l'Islam. Il était convaincu, selon les Iraniens, qu'il était investi d'une mission «divine». Très jeune, il se lance dans «la lutte islamique. Il écrira ainsi «kachf el asrar (dévoilement des secrets)» par lequel, est-il souligné, «il révèle les complots du colonialisme contre le monde musulman et lève le voile sur le rôle du Shah en Iran». Ce dernier est considéré comme «traître et valet des Américains». Premier principe que l'Imam à sacralisé «ne jamais séparer la politique de la religion parce que la laïcité, selon la vision occidentale, avait des projets colonialistes». A partir de là, il manifestera publiquement tout au long de sa vie, son hostilité au régime du Shah.

«REVOLUTION BLANCHE» CONTRE «REVOLUTION VERTE»

Agacé par sa ténacité, les Etats-Unis présidés alors par Kennedy, prirent les choses en mains et décident de «réformer l'Iran». Ils lui organiseront «la Révolution blanche» semblable à celle «orange» fomentée dans les pays de l'Est et plus tard ce que les «intellectuels et politiques» appellent pompeusement «les printemps arabes». Khomeyni avait déclaré à ses adeptes que «dans son apparence, la révolution blanche montrait de la clémence mais dans le fond, elle n'était que torture, servilité, anéantissement (...). Elle ne servait en réalité qu'à l'élimination de l'âme musulmane et du rôle du clergé en Iran, comme elle visait à conférer l'hégémonie à l'occidentalisation et l'inféodation à l'Amérique». L'Imam criera et complot et appellera les Iraniens à le déjouer. Il déclarera même le jour de l'an iranien (Nowrouz) jour de deuil national pour dénoncer le référendum que le Shah voulait organiser pour faire adopter son plan de réformes. C'est alors l'affrontement. Khomeyni appellera à «révéler la vérité parce que c'est une obligation religieuse puisque l'injustice est devenue un pêché et les fondements de l'Islam, le Coran et la religion, exposés à un grave danger (...)». Il profitera de la célébration de Achoura à Qom pour s'adresser aux Iraniens et dénoncer la répression du Shah. En 1973, il sera mis aux arrêts et emmené à Téhéran après que son domicile à Qom fût assiégé par les forces du régime pahlavi. Les Iraniens se soulèvent et occupent la rue pour exiger sa libération. C'est ce qui sera fait après 9 mois de détention. D'autres confrontations opposeront l'Imam Khomeyni et le Shah. Cette fois, il est arrêté mais emmené à l'aéroport pour un exil forcé. Il ira en Turquie puis en Irak, à Nadjaf, où il écrira «Velayat el-Faqih, où les fondements du gouvernement islamique».

RECUEILLEMENT DE DEUX MILLIONS D'ADEPTES

En 1978 ses adeptes en Iran se soulèveront pour protester contre un article jugé diffamatoire à l'encontre de leur Imam. L'armée du Shah charge et tire sur la foule. Première et seule exigence des révoltés «le retour de Khomeyni». Dans la même année, le régime baâthiste de Saddam Hussein lui demande «de garder le silence ou de quitter l'Irak». Il sera interdit d'entrée au Koweït. Il choisira la France comme dernier pays d'exil même s'il lui a été demandé aussi «de garder le silence». Il répondra d'ailleurs «je dirai ce que j'ai à dire même si je dois aller d'aéroport en aéroport». Il s'installa à Neauphle-le-Château, dans la région parisienne et continuera à diriger de là-bas «sa révolution en Iran».

Les Iraniens le lui rendaient bien. Ils avaient occupé la plus grande place de Téhéran pour exiger son retour. L'on dit qu'il y a eu plus de 5000 morts. La loi martiale est proclamée par le Shah. A partir de son exil français Khomeyni continuera à appeler l'armée à la désertion et le peuple à la désobéissance civile. Ses appels furent entendus et exécutés. Le régime du Shah est tombé et l'Imam Khomeyni rentre au pays le 1er février 1979. En quelques jours à peine, et malgré de fortes pressions de ce qui restait du régime pahlavi, il dotera le pays d'une constitution, d'un Parlement (madjlis), d'un président de la République, d'un gouvernement et d'un Conseil constitutionnel. Il instaure ainsi la première république islamique dans le monde contemporain. Il est inhumé près du cimetière Beheshté Zahra à 25 km de Téhéran sur la route de Qom. Son mausolée est ces jours-ci visité par près de deux millions de personnes venues de toutes les régions d'Iran, et d'autres pays comme l'Egypte, le Liban, la Syrie, la Palestine et surtout d'Irak.