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Recouvrement de l'impôt foncier : L'Etat veut responsabiliser les communes

par Moncef Wafi

Actuellement recouvré par les services du ministère des Finances, l'Etat veut charger les communes de l'impôt foncier. Selon Azzedine Kerri, directeur des Finances locales au département de Ould Kablia, le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales travaille pour arriver à une décentralisation du recouvrement de l'impôt foncier et le processus du transfert des prérogatives en est « au stade de réflexion » pour mettre en place les textes réglementaires qui permettront aux communes de recouvrer directement l'impôt foncier et prétendre à « un rendement fiscal beaucoup plus conséquent ». Rappelons que 60 à 65% des ressources des communes sont composées de recettes fiscales, 20 à 30% de dotations de l'Etat et 10% de ressources patrimoniales qui représentent leur autofinancement. Cette volonté de renforcer les ressources communales passe par de plus grandes responsabilités fiscales données aux élus locaux pour recouvrer notamment l'impôt foncier, générateur d'une quote-part conséquente pour renflouer les caisses communales, mais dont le recouvrement demeure « très faible » actuellement à cause, explique-t-on, de la faiblesse des moyens de l'administration fiscale. L'impôt foncier, constitué des taxes sur la propriété bâtie et non bâtie et de la taxe sur l'enlèvement des ordures ménagères ou taxe d'assainissement, est destiné exclusivement aux communes alors qu'il représente à peine 3% de l'ensemble de leurs recettes fiscales. Cependant cette décision, si elle venait à être entérinée, risque de rencontrer les mêmes problèmes qu'une précédente expérience de décentralisation du recouvrement de la taxe d'assainissement au niveau de la commune tentée en 2003 mais qui avait connu un échec du fait que les communes « n'avaient ni la compétence technique nécessaire ni le temps pour assurer une telle mission », a rappelé M. Kerri. Ce dernier estime que la solution doit passer par sous-traiter le recouvrement avec des agents « recouvreurs » qui seront payés en pourcentage des sommes recouvrées. L'objectif assigné à cette nouvelle disposition, selon M. Kerri, serait que l'impôt foncier arrivé à 20% de l'ensemble des recettes fiscales communales ainsi que des produits patrimoniaux, comme les revenus d'exploitation, des loyers et des concessions, à 25%, pour arriver en fin des comptes à avoir 45% de recettes pérennes et stables. Il a proposé pour y arriver d'autoriser les communes à conventionner des huissiers de justice ou des administrateurs de biens immobiliers afin de leur déléguer la mission de recouvrement de certaines taxes. Par ailleurs, le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales tend à former les élus locaux pour qu'ils arrivent à maîtriser le gisement patrimonial communal et améliorer le rendement de leurs ressources.

Cette démarche vise à « valoriser le patrimoine existant des communes », selon M. Kerri, et à la commune, dès lors, de créer, entre autres, des projets pourvoyeurs de fonds municipaux comme des marchés de proximité ou l'aménagement des stations thermales données en concession. Le but de ces formations, à travers une série de séminaires pris en charge par le Fonds commun des collectivités locales (FCCL) est d'aider les élus locaux à maîtriser et perfectionner l'outil comptable et cerner toutes les ressources fiscales dont pourraient jouir à l'avenir leurs communes. « Beaucoup d'élus ignorent les potentialités fiscales de leurs communes et montrent une certaine passivité vis-à-vis de la recherche des ressources », regrette le représentant de l'Intérieur. Et c'est cette méconnaissance du patrimoine communal par la majorité des élus qui serait derrière la faiblesse des ressources fiscales. Ce cycle de formation englobera tous les volets de la finance locale: service public, patrimoine, marchés publics, gestion des ressources humaines et développement local ; ce qui induira une plus grande implication de l'élu dans la recherche ou même le recouvrement des taxes et ressources financières. M. Kerri a tenu à souligner que 1.000 communes sur les 1.541 que compte le pays ne disposent pas d'un gisement fiscal à cause de leur vocation pastorale ou agricole, deux segments entièrement défiscalisés en Algérie. Quant à la réorganisation attendue du FCCL, il a rappelé que le fonds qui prenait en charge jusqu'à présent les dépenses obligatoires des communes (salaires, éclairage, enlèvement des ordures, entretien de la voirie, écoles, crèches, mosquées et cimetières, transport scolaire) s'intéressera davantage aux dépenses de développement des communes. Ainsi, le FCCL, alimenté par les communes elles-mêmes, financera en partie des projets productifs de revenus. Pour information, les recettes attribuées au FCCL ont atteint 123 milliards (mds) de DA en 2012 contre 102 mds de DA en 2011. L'ensemble des recettes fiscales destinées aux collectivités locales, y compris le concours du FCCL, ont atteint 368 mds de DA en 2012 contre 337 mds de DA en 2011.