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Culture :
OUVERTURE CE SOIR DU 78ème FESTIVAL DE CANNES - CHRONIQUE DES ANNÉES D'AVANT
par Cannes : TEWFIK HAKEM ![]() De
toutes les sélections du Festival, y compris la plus prestigieuse, La
Compétition Officielle, notre envoyé spécial à Cannes a tendance à s'intéresser
à celles consacrées aux vieux films restaurés. Effet d'âge ou effets de l'âge ?
Chronique d'une édition à plus d'un titre pas comme les autres.
D'abord éliminer ensuite choisir. On n'ira pas voir le dernier Mission impossible, ça au moins c'est sûr. On n'a rien contre Tom Cruise, mais depuis que Tom Cruise ne ressemble plus à Tom Cruise, la franchise n'a plus aucun intérêt, nous semble-t-il. On aime toujours Robert De Niro et de le savoir toujours vivant et encore capable de traverser l'Atlantique nous réjouit, mais pour sa master-classe on cède notre place, tout le mal qu'il aura raison de répéter sur Donald Trump sera assez vite relayé par les réseaux sociaux, contrairement aux relevés de sa taxe carbone. On n'ira sans doute pas voir le nouveau dernier film des frères Dardenne, pour autant on n'a rien contre les Belges, adorables pour la plupart, et on souhaite bonne chance à Jessica, Perla, Julie, Ariane et Naïma, les protagonistes de Jeunes mères, drame social avec des adolescentes hébergées dans une maison maternelle qui les aide dans leur vie de jeune mère. Les deux frères Jean-Pierre et Luc Dardenne seront peut-être les premiers à décrocher une troisième Palme d'or (Après Rosetta (1999) et L'Enfant (2005), si ça arrive on sera bien sûr les premiers à les applaudir, ça n'empêche pas. En compétition officielle, les deux films qu'on attend avec le minimum syndical de fébrilité, voire plus, sont La petite dernière de Hafsia Herzi (France) et Les Aigles de la République de Tarik Saleh (Suède). Le premier parce que adapté d'un livre qu'on a aimé, «La petite dernière», Mâazouza (Editions Noir sur Blanc, 2020), premier roman sensible (auto-fiction) de Fatima Das. Pour celles et ceux qui ne l'ont pas lu, sa fiche Wikipédia le résume bien. Aussi parce que l'adaptation est cosignée et réalisée par la précieuse Hafsia Herzi. Révélée par Adelatif Kéchiche dans La Graine et le Mulet, l'actrice franco-algéro-tunisienne prouve depuis quelques années qu'en plus d'être très belle et très bonne comédienne, elle peut être aussi toute habile, modeste et rayonnante dans la réalisation. Pour Les Aigles de la République de Tarik Saleh, réalisateur suédois originaire d'Egypte (très beau pays où il lui est vivement interdit d'y revenir), on aimerait être une fois de plus surpris et secoué par son cinéma et ses audaces. Jusqu'à présent, on n'a pas été déçu. Après Cairo-Confidential (2019) où il a réussi à rendre anecdotique le L.A Confidential dont il reprenait pourtant les codes, la consécration avec La Conspiration du Caire (2022), époustouflant thriller dans les arcanes d'Al-Azhar, film de genre qui renvoie au grenier de l'histoire tous les Da Vinci Code et Au Nom de la Rose du monde. L'autre raison concerne le casting alléchant du film : face à l'acteur fétiche du réalisateur, l'incroyable Fares Fares, libano-suédois, lui, on retrouve notre star montante, Lyna Khoudri, franco-algérienne, elle. Tous les deux, ils seront «égyptianisés» par Tarek Saleh. Le synopsis de son troisième film, dernier opus de sa trilogie du Caire, donne envie : l'intrigue se déroule dans les milieux du cinéma égyptien ! LA PALESTINE EN FORCE Dans les autres sélections, on suivra avec intérêt le nouveau film de la tunisienne Erige Sehiri, Promis le ciel (ouverture d'Un Certain Regard), ainsi que le premier long de l'égyptien Mourad Mostafa Aïsha can't fly away. C'est peu de dire que tout le monde attend avec impatience le nouveau film des frères palestiniens Arab et Tarzan Nasser Once upon a time in Gaza (Un Certain Regard). Le drame palestinien, la destruction de Ghaza, l'impuissance du monde face à cette tragédie humaine à grande échelle, hanteront ce Festival de Cannes, y compris en ouverture de La Quinzaine des Cinéastes, avec le film «Yes» de l'israélien Nadiv Lapid et avec le court-métrage du «Palestinien de l'intérieur», Tawfeek Barhom. I'm Glad You're Dead Now est la première réalisation de l'acteur remarqué dans Le Chanteur de Gazade Hany Abu-Assad, La Conspiration du Caire» de Tarek Saleh, Les Fantômes de Jonathan Millet en attendant de le découvrir dans le dernier film de Terrence Malick The Way of the Wind. On attend de voir qui, depuis Cannes, osera prendre la parole et avec quels mots pour dénoncer la guerre qui transforme chaque jour un peu plus la bande de Ghaza en «fosse commune». VIEUX FILMS SUR GRAND ECRAN Est-ce parce qu'elle nous éloigne autant que possible de notre flippant présent que la sélection «Ciné-Classics» -consacrée aux films anciens restaurés- devient notre centre d'intérêt premier à Cannes ? Ou est-ce l'effet de l'âge, la nostalgie comme plaisir ultime des chibanis ? Ou alors, plus prosaïquement, parce qu'il est plus facile de faire de bons choix quand on puise dans la liste des films qui ont su résister à l'épreuve du temps ? Cette année, comment rater Des jours et des nuits dans la forêt, un des rares Satyajit Ray (1970) qu'on n'a pas déjà revu plein de fois ? Le réalisateur Wes Anderson, par ailleurs en compétition avec un nouveau film, viendra présenter le film de Satyajit Ray en tant que membre du conseil d'administration de la Film Foundation qui a participé à la restauration du film indien. Tout aussi tentants ; Floating Clouds (Nuages flottants) de Mikio Naruse (1955, Japon), Gehenu Lamai (The Girls) de Sumitra Peries (1978, Sri Lanka), et encore une autre pépite à découvrir «Saïd Effendi (Saeed Effendi) de Kameran Hosni (1955, Irak), qui sera présenté, entre autres, par le Dr Hassan Al-Sudani, en sa qualité de «président du Comité pour la mémoire visuelle de l'Irak» pour reprendre le titre exact. Depuis des années, on ne voit les films que sur petit écran (télévision, ordinateur, téléphone), revoir un vieux film restauré sur grand écran provoque un état d'enchantement qui transcende la cinéphilie. C'est également dans le programme de Ciné-Classics qu'on découvrira, enfin, la version restaurée de Chroniques des années de braise de Mohamed Lakhdar-Hamina, 50 ans après avoir décroché la Palme d'Or. Le centenaire de The Gold Rush de Charlie Chaplin en pré-ouverture et un hommage au grand maître du cinéma hongrois István Szabó, en sa présence ! Revoir À toute épreuve de John Woo ne se refuse pas, et le film argentin Más allá del olvido, dont Thierry Frémeaux, le délégué général du Festival de Cannes, se demande si Alfred Hitchcock ne s'en serait pas inspiré pour Vertigo, pourrait être une bonne rétro-découverte. Enfin, Quentin Tarantino est attendu pour une rencontre autour de George Sherman, un réalisateur des westerns qui a attendu longtemps avant d'être considéré et apprécié en tant qu'auteur. On aura sans doute pas le temps de revoir Vol au-dessus d'un nid de coucous réalisé il y a 50 ans par Milos Forman, ni replonger dans le Barry Lyndon de Stanley Kubrick sorti la même année. Pour les cinquantenaires et plus, Ciné-Classics, c'est vraiment la classe ! D'autres grands classiques restaurés seront projetés en plein air dans le cadre du Cinéma de la Plage, dont le très raï Duel au soleil de King Vidor (1946) avec Jennifer Jones et Gregory Peck et l'archi-culte Sunset Blvd- Boulevard du crépuscule de Billy Wilder (1950), avec Gloria Swansson, William Holden, Erich von Stroheim et Buster Keaton dans son propre rôle ! Et, toujours en plein air, le tout dernier film du gitan algérois Tony Gatlif, Ange, avec dans le rôle principal le chanteur Arthur H, ce qui promet, après la projection, une belle fête sous les étoiles. Si la météo est clémente. |
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