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Santé : Les docents reviennent à la charge

par Ghania Oukazi

Les maîtres de conférence de classe (A) en appellent au président de la République et au 1er ministre pour leur permettre de passer le concours de la chefferie de service prévu pour le mois de juin prochain.

Leurs deux lettres ont été envoyées hier, une à la présidence de la république et une autre au palais du Gouvernement. C'est l'ultime recours auquel les maîtres de conférence (A) s'accrochent pour faire valoir leur droit de passer le concours de la chefferie de service fixé pour juin prochain et pour lequel le ministère de la Santé a ouvert des postes dans les centres hospitalo-universitaires (CHU) du pays. Désignés par le passé par «Docents» ou «professeurs agrégés», cette classe de médecins peine à faire entendre sa voix auprès de la tutelle qui, «à cause d'une erreur administrative», la prive de son droit d'accéder à la chefferie de service par voie de concours. Ces professeurs insistent depuis quelques temps à le faire comprendre à «ceux qui décident» mais en vain. Quelques-uns d'entre eux nous ont saisis pour nous expliquer de quoi il retourne et nous faire part de leur désarroi.

La genèse du problème remonte à juin 2011 lorsque ces maîtres de conférence ont passé l'examen de leur classement en tant que tels. Une fois les résultats parus publiquement, des confrères à eux de deux ou trois spécialités s'étaient sentis lésés et ont, par conséquence, adressé des recours à la tutelle. «Au lieu de valider et de prescrire la nomination des candidats qui ont réussi au concours quelques jours après l'annonce des résultats, c'est-à-dire en juin 2011, l'administration a laissé traîner le dossier à cause des recours qu'elle avait reçu des mécontents et ne l'a fait qu'en décembre 2011, ce qui nous a privé des 6 mois qui manquent aujourd'hui pour nous permettre de passer le concours de la chefferie de service,» nous dit un de leur représentants.            Ce retard pénalise aujourd'hui les maîtres de conférence(A) parce qu'ils n'accumulent pas deux années de nomination, comme exigé par la circulaire interministérielle n2 du 25 mars 2013 complétant celle n1 du 20 février 2013 relative au concours de nomination au poste supérieur de chef de service hospitalo-universitaire au titre de l'année 2013.

«LES CONCOURS ET LES EXAMENS NE FONT PAS PARTIE DES PREROGATIVES DU SYNDICAT»

La circulaire n2 fixe les conditions de candidature à la chefferie de service et précise que «le concours est ouvert aux enseignants chercheurs hospitalo-universitaires en position d'activité, justifiant de l'appartenance aux grades suivants : aux professeurs, aux maîtres de conférence classe A ayant deux années d'exercice dans ce grade et aux chefs de service justifiant de quatre années d'exercice en cette qualité.»

Entre autres démarches qu'ils ont entreprises, l'envoi la semaine dernière d'une lettre aux ministres de la Santé et de l'Enseignement supérieur. Le collectif des maîtres de conférence (A) demandent par cette correspondance «un report officiel de la date du concours de la chefferie de service -prévu entre mai et juin- pour décembre 2013.» Ils rappellent d'ailleurs que «nous avons le regret de vous faire connaître que la date de nomination des maîtres de conférence(A) a été amputée de 6 mois à cause d'une erreur administrative ainsi que d'une négligence(?)». Ils notent en outre que « (?), la pédagogie ainsi que les concours et les examens ne font pas partie des prérogatives du syndicat.» Une remarque par laquelle ils affirment «dénoncer le forcing du syndicat pour que le concours se fasse en juin et non en décembre comme nous le demandons,» nous disent des membres du collectif. «Des adhérents du syndicat convoitent certains postes de chefferie de service, ce qui les arrange parce que si le concours aura lieu en juin, il y aura plus de postes que de candidats, comme ça ils auront l'embarras du choix,» nous expliquent-ils.

DE L'ERREUR MEDICALE A L'ERREUR ADMINISTRATIVE

Des voix s'élèvent même pour dénoncer « des pratiques de régionalisme, de clanisme et de clientélisme qui ont plongé le secteur de la santé dans un marasme profond.» Ils crient même au scandale. « Au lieu d'équiper les hôpitaux de moyens pour bien soigner les malades et éviter le laisser-aller et même les erreurs médicales qui sont aujourd'hui légion, ils s'acharnent à marginaliser une catégorie de professeurs agrégés à cause d'une stupide erreur administrative,» dénoncent des membres du collectif des maîtres de conférence (A). Nous avons tenté hier de joindre le responsable de leur syndicat, Pr. Rachid Belhadj, mais nos appels n'ont pas abouti. Les maîtres de conférence(A) précisent que «des postes de chefferie de service au niveau de certaines wilayas de l'intérieur du pays sont occupés depuis longtemps à titre intérimaire, par des professeurs agrégés qui y ont été envoyés alors que les services étaient vides, ils ont trimé pour les faire fonctionner, seulement, ils n'ont pas les deux ans requis pour pouvoir passer le concours, ce qui signifie qu'ils n'ont pas droit au concours de juin, ce qui n'est pas normal, mais injuste et désolant.» Du côté du ministère de la Santé, l'on nous susurre que «le ministre a mal reçu la semaine dernière, les représentants du syndicat», ce qui représente chez les maîtres de conférence qui s'estiment lésés « un bon signe qui pourrait dire, et on l'espère bien, que le ministre s'est rendu compte que c'est une erreur de faire passer le concours en juin.» De proches assistants de Abdelaziz Ziari nous disent même que « le ministre a reconnu avoir été berné en signant la circulaire qui fixe les conditions qui ferment les portes à la classe A.» Au ministère de l'Enseignement supérieur, le cabinet de Rachid Hraoubia reconnaît que« l'administration centrale a une part de responsabilité dans cette situation.» L'on nous explique à ce niveau que « les maîtres de conférence (A) ont été nommés en décembre 2011 alors qu'ils avaient passé leur concours 6 mois avant, c'est-à-dire en juin 2011, ce qui n'est pas normal parce que la réglementation exige que la confirmation de la nomination ne doit pas dépasser 15 jours à partir de l'annonce des résultats.» L'on dit du ministre de l'Enseignement qu' «il est pris entre deux feux, la légalité de la chose et les pressions du syndicat.» Une commission devait être mise en place pour faire examiner la question par les deux ministères, mais l'on nous précise que «rien n'a été fait à ce jour.»

DES CHEFS DE SERVICES INVALIDES ENCORE EN POSTE

Les maîtres de conférence(A) nous indiquent que « la solution à cette exclusion qui ne dit pas son nom est simple : soit les deux ministres s'entendent pour reporter le concours de juin à décembre prochain, soit ils signent un arrêté dans lequel ils valident notre nomination à partir de la publication des résultats c'est-à-dire juin 2011, comme ça, on aura bouclé nos deux ans de service et on pourra ainsi reconquérir notre droit de passer le concours de la chefferie de service conformément à la circulaire interministérielle n2.» Ils sont près de 80 maîtres de conférence(A) à réclamer ce droit. «Un grand nombre de postes de chefferie de service sont tenus depuis de longues années par des responsables qui ont largement dépassé l'âge de la retraite et en plus ils sont malades, parfois même invalides,» notent-ils de surcroît. L'on nous signale que « le syndicat a proposé aux deux ministères de permettre le concours en juin et d'en programmer un second en décembre prochain.» Réaction immédiate des maîtres de conférence(A) «il est impossible qu'un autre concours soit prévu en décembre prochain, ça n'a jamais existé dans les annales des concours dans le secteur, il n'y en aura un autre que dans 6 ou 7 ans, beaucoup d'entre nous auront alors atteint l'âge de la retraite, ce n'est pas juste !» Nous apprenons que dans les deux lettres qu'ils ont envoyées au président de la République et au 1er ministre, les maîtres de conférence(A) demandent comme ultime revendication que les 6 mois « volés» leur soient inscrits dans leur cursus professionnel « non pas pour en être payé ni pour passer le concours mais pour qu'ils soient calculés dans notre carrière, c'est un droit pour lequel nous avons travaillé laborieusement.»