|
![]() ![]() ![]()
Culture :
78ème FESTIVAL DE CANNES - LES CRITIQUES ARABES UNANIMEMENT OFFUSQUÉS PAR «LA PETITE DERNIÈRE» DE HAFSIA HERZI
par Cannes : TEWFIK HAKEM ![]() En
compétition officielle, le troisième long-métrage en tant que réalisatrice de
la comédienne Hafsia Herzi a été unanimement rejeté
par les critiques arabes accrédités à Cannes. Explications.
Et un festival de cinéma de plus dans la région Mena ! Le petit Qatar, lui aussi, veut et va avoir son Festival International de Cinéma. L'annonce a été faite lors d'une réception sans alcool dans la très luxueuse Plage du Carlton, à Cannes, en présence du grand cinéaste palestinien Elia Suleiman. Ainsi, Doha veut concurrencer Le Caire, Djeddah (Red Sea IFF), Gouna (mer Rouge, Egypte), Marrakech, et Carthage. Déjà que la concurrence était rude entre eux, maintenant ça va être la guerre ! Chaque festival, ou presque, exige des exclusivités en ce qui concerne les films, et tout le monde espère faire venir chez lui les plus grosses stars, quitte à les payer très cher. Dans cette course aux surenchères entre enfants gâtés, les stars arabes ou d'origine arabe qui ont une renommée internationale sont très convoitées. Parmi elles, deux noms reviennent avec insistance. Tahar Rahim (de préférence avec son épouse Leïla Bekhti) et Hafsia Herzi. Qui sera le premier à les faire venir ? Le match oppose surtout le riche et saoudien Red Sea International Film (dont l'ingénierie est assurée par les Anglais et les Américains ) au marocain Marrakech Film Festival (orchestré par les Français), les autres se contentent de ce qui reste sur le marché. Depardieu à El-Gouna et de Mathieu Kassovitz au Caire, par exemple. Contre mauvaise fortune, bon cœur : à contre-courant le Festival de Carthage et ses salles bondées préfère miser sur le cinéma d'auteur «On n'a pas de gros chèques pour les stars internationales mais on a encore des films et des cinéphiles tunisiens», clame le Festival des cinémas arabes et africains qui applique la devise des RCB («A Béjaïa, la star c'est le public»). Jusqu'à la semaine dernière donc, tous les festivals arabes rêvaient d'inviter Hafsia Herzi. Aujourd'hui, aucun festival de la région n'en veut. Depuis que son troisième long-métrage en tant que réalisatrice «La Petite dernière» adapté du roman de Fatima Daas a été projeté à Cannes dans le cadre de la Compétition officielle, Hafsia Herzi n'est plus du tout en odeur de sainteté chez les accrédités de la presse et des festivals arabes à Cannes. La raison de ce spectaculaire et radical désamour ? Le sujet de son film qui raconte, pourtant avec pudeur et finesse, les désarrois d'une jeune adolescente française d'origine algérienne et de classe sociale modeste, Fatima, musulmane pratiquante qui découvre dans la douleur son homosexualité. Rien à voir avec «La vie d'Adèle» de son compatriote et mentor Abdelatif Kechiche qui, sur le même sujet, avait remporté la palme d'or ici, «La Petite dernière» est pudique et profondément humain. Cela n'empêche pas les Arabes d'être unis contre ce «film honni». À défaut de Hafsia Herzi, les festivals de la région Mena se tournent vers Lyna Khoudri, elle aussi très convoitée. Enfin, par pas tous ! Les deux festivals égyptiens, El-Gouna (privé) et le Festival du Caire (le doyen des festivals étatiques) qui insistaient ces dernières années pour l'inviter et l'honorer, n'en veulent désormais plus. La raison est tout aussi tordue. Lyna Khoudri joue dans le dernier film de l'égypto-suédois Tarek Saleh, considéré comme un traître à la nation depuis qu'il a tourné «Cairo Confidential» (thriller sur les magouilles politico-financières dans l'Egypte de Moubarek). Les agents de Hafsia Herzi et de Lyna Khoudri peuvent enfin respirer, ils ne seront plus harcelés par les festivals de la région au moins pour quelques années. Parions que les Rencontres de Béjaïa vont rafler la mise en invitant Hafsia Herzi pour fêter leur 20 ans, avec la projection de «La petite dernière» dans le cadre d'une journée spéciale LGBT+ dans le monde arabe -on a dit monde arabe pas kabyle !- la morale des moralistes sera sauve et qu'Oran déroulera le tapis rouge à Lyna Khoudri, avec ou sans Karim Benzema (rien n'est officiel pour le moment). Quant au festival de Annaba, il se fera un plaisir de programmer les deux films vus à Cannes qui traitent du racisme anti-migrants sub-sahariens, en Tunisie («Promis le ciel» d'Erige Sahiri) et en Egypte («Aïcha can't fly» de Morad Mustapha). Deux films d'ores et déjà accusés par les médias du Caire et de Tunis de «ternir l'image du pays». À part ça, la jeune et jolie femme en total hidjab noir qui déambule dans les salons du célèbre Majestic hôtel s'appelle Sheikha Jawaher, elle est à Cannes pour faire la promo d'un autre nouveau festival de cinéma : le Festival international des films pour enfants et adolescents de Sharjah. |
|