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La République bâillonnée: Quand Macron orchestre la censure

par Salah Lakoues

La France aime à se présenter comme la patrie des droits de l'homme. Mais derrière le vernis républicain, un système de contrôle et de censure se déploie. Depuis l'opération palestinienne « Déluge d'Al Aqsa », cette réalité éclate au grand jour : le débat est confisqué, les opinions dissidentes criminalisées, la liberté d'expression méthodiquement étouffée.

Les Twitter Files l'ont révélé : Emmanuel Macron n'a pas hésité à intervenir directement auprès de dirigeants de plateformes comme Twitter pour influencer la modération, exiger des suppressions de contenus et obtenir des données sensibles. La manœuvre est subtile : ne plus censurer frontalement, mais déléguer à des ONG-écrans le soin d'imposer le silence. C'est la «censure par procuration», hypocrite et redoutable.

Et cette emprise numérique se double d'un verrouillage médiatique. Les grands médias français ne sont plus des contre-pouvoirs, mais les relais d'intérêts privés et politiques. Vincent Bolloré contrôle CNews et Europe 1, transformant l'information en propagande idéologique. Bernard Arnault, patron de LVMH, détient Les Échos et Le Parisien, où l'économique et le politique se confondent. Xavier Niel, via Le Monde, pèse dans l'orientation éditoriale d'un journal longtemps considéré comme un phare du pluralisme. La famille Dassault, avec Le Figaro, continue de mettre son empire au service d'un agenda conservateur. Comment parler de presse libre quand quelques milliardaires dictent ce que des millions de citoyens lisent, entendent et regardent chaque jour ?

Mais ce verrouillage ne repose pas seulement sur les propriétaires. Il s'incarne aussi dans les éditorialistes-stars, omniprésents sur les plateaux, qui recyclent à longueur de journée, les récits convenus du pouvoir. Qu'il s'agisse de Pascal Praud qui transforme CNews en tribune d'opinion partisane, de Jean-Jacques Bourdin ou de Yves Calvi qui, sous couvert de débats « équilibrés », fabriquent des consensus orientés, tous participent à ce brouillage systématique. Ils donnent l'illusion du pluralisme tout en traçant des lignes rouges invisibles : défendre la Palestine devient extrémiste, critiquer l'OTAN devient suspect, contester l'ordre néolibéral devient marginal.

Dans ce paysage asphyxié, le citoyen ne débat plus : il subit. L'antisionisme est criminalisé, assimilé à l'antisémitisme. Le soutien au peuple palestinien est qualifié de terrorisme. Et toute voix critique est marginalisée, taxée de complotiste ou de radicalisée. La République a cessé d'écouter, elle impose.

Le plus inquiétant, c'est que ce basculement n'est pas une dérive accidentelle, mais un projet assumé. Sous prétexte de lutter contre la haine, la pédocriminalité ou le terrorisme, le pouvoir construit un Big Brother à la française : surveillance, fichage, censure préventive. Derrière les grands mots se cache une obsession : étouffer les contre-récits, empêcher l'émergence d'une conscience critique.

Or une démocratie qui confond autorité et autoritarisme n'est plus une démocratie. Elle devient une façade, une vitrine derrière laquelle prospère un système de contrôle.

La France mérite mieux que cette descente programmée. Elle mérite une presse indépendante, un espace numérique libéré des manipulations, et un pluralisme réel. Car si nous acceptons aujourd'hui que la solidarité avec la Palestine soit étouffée, demain, ce seront toutes nos libertés qui disparaîtront sous les applaudissements forcés d'une République devenue spectre.