
La libération de l'otage français par la branche maghrébine d'Al-Qaida
(AQMI), en échange de quatre terroristes libérés par les autorités maliennes,
survient sur fond d'une crise diplomatique entre l'Algérie et le Mali. «La
décision du Mali ne sert ni la région, ni sa stabilité, ni le combat mené
contre le terrorisme». Le ton est, on ne peut plus clair, à la fermeté et à la
colère chez le ministre des Affaires étrangères, M. Mourad Medelci, qui s'était
exprimé hier à Mascate, sur la libération scandaleuse par Bamako de terroristes
recherchés par plusieurs pays. Lors d'une conférence de presse tenue à la
clôture des travaux de la 5e commission mixte algéro-omanaise, M. Medelci a usé
d'un ton consterné devant les journalistes. Il a affirmé que la décision du
rappel de l'ambassadeur d'Algérie à Bamako était «une manière de protester»
contre la décision des autorités maliennes. L'Algérie et la Mauritanie ont
vivement exprimé leur mécontentement à l'égard des autorités maliennes et ont
rappelé leurs ambassadeurs en poste à Bamako. La libération de l'humanitaire
français de 61 ans, M. Camatte, en échange de la mise en liberté de quatre
islamistes (deux Algériens, un Burkinabé, un Mauritanien) qui étaient réclamés
par Al-Qaïda au Mali, est en effet un acte gravissime. Face à cet événement
dangereux, le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères,
Valero, a tenté de dédouaner le gouvernement français. M. Valero a nié, hier,
tout versement par le gouvernement français d'une rançon pour obtenir la
libération de Pierre Camatte, au Mali par l'Aqmi, et s'est dit «solidaire des
Etats de la région contre cette menace terroriste». Voilà ainsi un pays qui
négocie avec des terroristes et qui obtient la libération d'un de ses
ressortissants au prix de libération de terroristes, qui parle de «solidarité».
Plus grave encore, lors d'une conversation téléphonique, le président français
Nicolas Sarkozy va jusqu'à remercier, mardi, «chaleureusement son homologue
malien Amadou Toumani Touré, pour la gestion de cette crise, et l'a assuré du
soutien de la France dans la lutte contre le terrorisme». «De très nombreux
paramètres, qui dépassent les développements de ces derniers jours, rentrent en
ligne de compte, s'agissant des conditions de la libération de Pierre Camatte
et des moyens mis en œuvre dans la région pour lutter contre Al-Qaïda», a tenté
de s'expliquer M. Valero, sans être plus précis.
De son côté, l'Algérie qualifie
la libération des terroristes de «dangereuse». Les terroristes libérés sont, en
effet, accusés par Alger d'avoir participé à des attentats sanglants dans leur
pays. Un acte qui viole les conventions de lutte contre le terrorisme. Le
département de Medelci a dénoncé la transgression par les autorités maliennes
de la convention bilatérale de coopération judiciaire qui lie les deux pays et
au nom de laquelle une demande d'extradition des deux terroristes algériens
libérés, avait été formulée en septembre 2009 et réitérée durant le mois en
cours. Cette libération viole ainsi les résolutions du Conseil de sécurité des
Nations unies et les engagements bilatéraux, régionaux et internationaux de
lutte contre le terrorisme.