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Le fin mot

par Abdelkrim Zerzouri

Alors qu'une loi visant le contrôle de l'immigration et l'amélioration de l'intégration a été votée, en France, il y a moins d'une année, le nouveau gouvernement, à peine installé, revient sur ce dossier en annonçant qu'une nouvelle loi sur l'immigration sera soumise au Parlement, au début de l'année 2025.

Une annonce qui a fait tiquer l'ex- Premier ministre, Gabriel Attal, ainsi qu'une bonne partie de la classe politique. « Faire une loi pour une loi, sans nous expliquer ce qu'il y aurait dedans, ne me semble pas totalement prioritaire. Faire une loi pour une loi, ça n'a pas de sens », a considéré l'ex- Premier ministre. Mais, pour d'autres observateurs, cela n'est pas étonnant, la loi sur l'immigration étant devenue un classique de la politique française, vu les nombreuses lois qui ont imprimé ce dossier durant les vingt dernières années.

Mais, cette fois-ci, on relève qu'on fait dans la précipitation dans un domaine où les premiers décrets d'application de la loi « Immigration », adoptée en décembre 2023, viennent à peine d'être publiés au Journal officiel (les 14 et 16 juillet 2024), concernant notamment le délai d'édiction d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) pour les demandeurs d'asile, le contrat d'engagement au respect des principes de la République que doivent désormais signer les étrangers souhaitant un titre de séjour, ou encore les modalités de l'assignation à résidence pour les demandeurs d'asile, et plusieurs autres décrets attendent encore. Pourquoi a-t-on besoin, donc, de revenir sur le sujet ? Est-ce pour faire plaisir au courant politique de l'extrême droite, qui ne cache pas sa satisfaction de voir le gouvernement se préparer à présenter cette nouvelle loi sur l'immigration devant le Parlement au début de l'année 2025 ? Peut être bien que cette nouvelle loi va toucher ou changer certaines dispositions, notamment le durcissement des conditions de régularisation des sans-papiers et l'allongement des délais de détention des migrants clandestins jugés dangereux, mais cela ne nécessite pas d'y aller dans l'urgence ou d'une manière prioritaire, comme l'a fait remarquer l'ex- Premier ministre Gabriel Attal, à moins de vouloir caresser dans le sens du poil une partie importante de l'Assemblée et faire passer sous son nez des projets de lois qui font polémiques, dont le déficit du budget. On croyait à un échec de l'extrême droite lors des dernières législatives, mais il s'avère que ce mouvement tient en otage l'Assemblée française grâce à sa capacité de bloquer les projets de lois et autres menaces de motion de censure de tout ce qui n'est pas du goût de son projet politique. Dans cette optique, des jours sombres attendent les communautés de l'immigration en France, elles qui croyaient que le péril extrémiste a été évité avec l'installation en force des représentants du Nouveau front populaire (NFP) au sein de la nouvelle Assemblée française. Selon le topo de cette nouvelle Assemblée, il n'y a pas que l'extrême droite qui fait « sa loi ».

D'autres forces politiques, majoritairement représentées, peuvent également agir de la même manière que l'extrême droite mais dans le sens contraire. Qui aura le fin mot ? Certainement pas l'immigré, qui sera sacrifié sur l'autel de l'intérêt politique des uns et des autres.