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Déplacés et exodes forcés

par Abdou BENABBOU

Peut-on imaginer un seul instant que toute la population suisse de plus de sept millions d'habitants soit déplacée ? Une telle pensée supposerait un haut degré de débilité. Pourtant les incroyables retournements de l'histoire ont souvent démontré qu'à l'impossible elle n'est jamais tenue. Elle n'en est pas à sa dernière entourloupe. Le monde a été souvent fait et défait. Il a, régulièrement à travers les siècles, enfanté des civilisations pour les voir ensuite s'écrouler. Pour que les humains repartent indéfiniment à la recherche de nouvelles statures.

Pour le moment, l'incroyable se produit au cœur de l'Afrique où une population de près de huit millions de Centrafricains sont soumis à un bannissement insensé. D'autres par milliers au Soudan et dans les proximités sous des cieux stériles n'ont plus leurs sorts entre les mains.

L'exode forcé de millions d'êtres déplacés n'est pas une particularité de la République centrafricaine. Il est aujourd'hui un label sombre sans que personne ne puisse avec exactitude déterminer les causes et situer les responsabilités. Certaines sont dues à des avidités monstrueuses identifiées qu'animent la force des bombardements et de l'injustice. D'autres naissent sous la férule des dictatures réunies des criminels pensants, et de la folie du climat. En étant chambardées, les existences n'accordent plus aucun sens aux destins des millions de désespérés quand ils ont perdu leur humanité.

Entrevoir leur immense drame vécu n'est à la portée d'aucun esprit. Son poids laisse l'imagination hagarde pour dérouter les suppositions qui ne seront que lointaines de la réalité. L'errance, la misère et la faim laissent penser en finalité que les vies humaines ne sont que dans l'effacement tragique.

Alors les Suisses, comme de nombreux d'autres, en se blottissant dans un semblant de nids douillets devraient se demander quel réel statut doit avoir leur profil d'humain quand de toute évidence l'humanisme a disparu.