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Le monde perd pied

par Abdou BENABBOU

Une personne en mal de santé est soignée par un médecin. Une automobile en panne a recours à un mécanicien. Mais à qui la terre devra-t-elle s'adresser quand sa folie perdure et semble vouloir aller à l'exagération ?

Les alertes contre le dérèglement climatique se multiplient au rythme des crues et des inondations qu'accompagnent dans un paradoxe troublant des sécheresses impériales en déroutant et en entremêlant les saisons. Aucun pays au monde n'est épargné par les broderies maintenant incalculables d'un climat pourvoyant à répétition les déluges et le tarissement des eaux provoquant en même temps des morts par milliers. Là subites, ici des décès par agonies lentes.

Qui aurait cru, il y a des décennies encore, que les déserts changeraient d'adresses pour que les contrées hier verdoyantes adoptent dans la douleur et le drame des visages du Ténéré ?

Mieux encore : la fatidique danse à deux temps du climat désespère en obligeant plusieurs régions du monde à réclamer en alternance de quoi étancher leurs soifs et à maudire ensuite les catastrophiques inondations répétitives qui rasent villes et maisons. Les séismes, les volcans et les typhons se mettent de la partie pour que les riches perdent leurs âmes et leurs raisons.

A la violence du climat répondent les violences humaines amplifiées. Le dérèglement climatique a changé la face de la nature, mais il a aussi dénaturé celle de l'homme.

Les providences climatiques qui nourrissaient les hommes ont définitivement disparu. A leurs désertions suivent de profondes gerçures sociales et économiques mettant à rude épreuve peuples et Etats. Les ressources alimentaires tarissent et le coût de la vie n'obéit qu'aux spectaculaires caprices de l'inflation. Désarçonné, le monde perd pied et s'est lancé dans la recherche de faux saints.

La curieuse et fâcheuse malédiction veut qu'elle sème en plus la folie des hommes convaincus que les issues ne sont que dans la profusion injuste du semage outrancier des guerres et des conflits.