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Départ des médecins algériens à l'étranger: Quel remède ?

par A. Z.

La saignée provoquée par les départs des médecins algériens à l'étranger n'a pas trouvé remède. Pis, la situation s'aggrave avec un nombre de plus en plus croissant de médecins algériens qui choisissent de s'installer sous d'autres cieux.

C'est le président de l'Ordre national des médecins, le Dr Mohamed Berkani, qui tire pour la énième fois la sonnette d'alarme. «Il y a énormément de départs. Au niveau de notre structure (ndlr : l'Ordre national des médecins), nous sommes sollicités pour des documents demandés à nos médecins par les institutions étrangères. Dans la seule région d'Alger, nous avons une trentaine de demandes de départs par semaine. C'est une véritable hémorragie ! » a-t-il déclaré, hier, avec grand regret. «Les médecins algériens reçoivent une formation solide, selon les standards et normes internationaux, reste seulement à leur offrir les conditions socioprofessionnelles nécessaires afin de les pérenniser dans notre pays, car il est dommageable de former pour les autres», a-t-il relevé. Pour le Dr Berkani, «pour parer à cette hémorragie, il faut s'assurer que ces jeunes diplômés exercent leur métier de médecin. Il faut également leur offrir des solutions socioprofessionnelles évolutives dans le temps».

Dernièrement, le professeur Rachid Belhadj, président du Syndicat national des professeurs et chercheurs universitaires et directeur des activités médicales et paramédicales à l'hôpital Mustapha Pacha d'Alger, faisait le même constat à propos de ces médecins algériens qui partent s'installer à l'étranger.

Lors d'une intervention sur les ondes de la Chaîne 3, le professeur Rachid Belhadj relevait que chaque année, l'Algérie enregistre des «départs massifs» de ses médecins vers l'étranger. C'est «une véritable saignée pour le système de santé et pour tout le pays». «Rien que durant l'année 2022, nous avons recensé le départ de 80 hospitalo-universitaires entre radiologues, ophtalmologues, dermatologues, urologues et réanimateurs», révélait-il.

Une véritable perte pour le pays, selon le professeur Rachid Belhadj. Le comble de l'ironie, c'est que l'Algérie transfère des malades à l'étranger pour se faire soigner par ces compétences qu'elle a elle-même formées. Plaidant en faveur d'une réelle prise en charge des préoccupations de la corporation, le représentant des professeurs chercheurs a soutenu qu'il est temps «de revoir le suivi des carrières et la formation de ce corps», tout en annonçant que des négociations sur le statut des hospitalo-universitaires ont été ouvertes, avec le ministère de la Santé, pour améliorer les rétributions et l'organisation du travail. Se penchant sur le même mal, le Docteur Lyes Merabet, président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP), avait de son côté révélé, en février dernier, avec plus de détails chiffrés, qu' «environ 1.200 médecins algériens, de différentes spécialités, s'apprêtent à partir en France pour travailler dans ses hôpitaux après leurs réussite aux épreuves de vérification des connaissances (EVC)».

Cela n'avait pas manqué de faire réagir l'ex-ministre de la Santé, Abderrahmane Benbouzid, qui avait expliqué que le phénomène ne concerne pas uniquement l'Algérie, en citant les exemples de l'Egypte et de l'Inde qui voient également leurs médecins et ingénieurs partir vers l'étranger. Préconisant une réforme du système de santé, le ministre de la Santé avait laissé entendre que «de nombreux médecins ont dépassé l'âge de la retraite et ils sont toujours en poste et ils ne permettent pas à la nouvelle génération de les remplacer. C'est ce qui fait que nous n'avons pas de postes pour les jeunes médecins». M. Benbouzid avait fait précédemment état d'une commission regroupant plusieurs ministères pour chercher les raisons ayant conduit ces médecins à faire ce choix et trouver des solutions adaptées. Non sans imputer les départs des médecins algériens à l'étranger «aux incitations dans le pays d'accueil et d'autres raisons personnelles». Le diagnostic de l'hémorragie est établi et ses causes déterminées, reste le traitement à prescrire, qui n'est pas du ressort du médecin.