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Yasmina Khadra fait la promotion de son nouveau roman «Les Vertueux»: «Je suis fan de ce livre, grâce à lui, je viens de franchir un cap»

par Houari Saaïdia

Il a fait théâtre comble. Même la plus belle pièce, d'ici ou d'ailleurs, ne pouvait faire autant. Pas d'entracte, pas de temps mort. Son spectacle est allé au-delà des deux heures et demie et tout le monde s'y plaisait et voulait qu'il dure encore davantage. Il a su interpréter son rôle, comme savent si bien interpréter les leurs les personnages qu'il crée dans ces romans. Et, surtout, il a su téléporter son public dans son monde à lui comme il le sait si bien faire avec ses lecteurs.

On lui connaissait bien évidement l'art d'écrire. Samedi soir, on a découvert chez lui un autre art, celui de promouvoir ce qu'il écrit. Il était très généreux et très sympa avec son public. Mais c'était sans compter sur son franc-parler, côté institutionnel et faiseurs d'opinions. A Oran, ville qu'il aime et chérit par-dessus tout, il croit être lésé et il l'est. Par ce manque d'égard et de déférence que l'on doit en principe à un aussi illustre écrivain et homme de lettres de sa dimension, en termes d'évènementiel institutionnel et de couverture médiatique. A fortiori lorsqu'il s'agit d'un enfant du pays et de la région. Et on ne peut qu'être réceptifs à ses cris de cœur tant ils paraissent sincères.

Au reste, c'était réussi sur toute la ligne son coup d'envoi, samedi à partir du Théâtre régional d'Oran, de sa campagne de promotion à travers le territoire national pour son roman nouveau-né Les Vertueux. On savait déjà, depuis quelques jours en fait, que ce roman était son préféré. Mais Yasmina Khadra nous a quand même encore surpris, et quelque part intrigués, en confessant qu'il en est lui-même «fan de ce livre», qu'il va bientôt «franchir un cap après ce roman» et que toutes ses œuvres antérieures sont une chose, mais «celui-là en est une autre». Ce dernier paraîtra, en France, chez les éditions Mialet-Barrault (ayant déjà édité son dernier roman Pour l'Amour d'Elena) et en Algérie, chez Casbah Editions. Il sera disponible en librairie à partir du 24 août prochain. Cet aveu rendrait l'attente de cette sortie encore plus pénible pour les lecteurs qui auraient hâte de découvrir sur le nouveau roman qu'allait devenir leur favori à eux aussi. L'auteur de Ce que le jour doit à la nuit, À quoi rêvent les singes, l'Attentat et bien d'autres merveilles a néanmoins levé un petit coin du voile sur son nouvel ouvrage. Le résumé de la quatrième de couverture nous donne, de son côté, un aperçu sur l'histoire de ce roman. «J'ai vécu ce que j'avais à vivre et aimé du mieux que j'ai pu. Si je n'ai pas eu de chance ou si je l'ai ratée d'un cheveu, si j'ai fauté quelque part sans faire exprès, si j'ai perdu toutes mes batailles, mes défaites ont du mérite ? elles sont la preuve que je me suis battu. Algérie, 1914. Yacine Chéraga n'avait jamais quitté son douar lorsqu'il est envoyé en France se battre contre les Boches. De retour au pays après la guerre, d'autres aventures incroyables l'attendent. Traqué, malmené par le sort, il n'aura, pour faire face à l'adversité, que la pureté de son amour et son indéfectible humanité. Les Vertueux est un roman majeur, la plus impressionnante des œuvres de Yasmina Khadra », peut-on y lire.

Voici un récit quasi intégral de la conférence-présentation donnée par Yasmina Khadra sous forme de question/réponse animée par le biais d'un modérateur d'audience.

Le modérateur : On est ici dans le théâtre. On va donc commencer par ce rapport particulier qu'a Yasmina Khadra avec le théâtre. Avec l'expression théâtrale d'une manière générale.

Yasmina Khadra : Je suis très content de rencontrer enfin les Oranais car cela fait longtemps qu'on ne s'est pas croisés. Wahrane m'est très chère. Elle a été le personnage de beaucoup de mes romans et elle le sera dans mon prochain. Le livre, c'est l'intimité. Le théâtre, c'est la convivialité. Dans un livre, on est seul, face à un monde imaginaire. Mais au théâtre, on est plusieurs. On est presque en famille. J'ai un profond attachement au quatrième art. Moi-même j'ai fait des pièces théâtrales avec Slimane Benaïssa quand j'étais jeune.

C'était certes des pièces assez dérisoires sur la délinquance et bien d'autres sujets. Et, ensuite, j'ai eu l'immense bonheur de voir certains de mes romans adaptés au théâtre. Il y en a cinq ou six, je crois. Il y en a même qui ont été adaptés au théâtre latino-américain, notamment en Equateur et au Mexique. Il y en a certains qui ont été adaptés en Afrique subsaharienne, entre autres, le Congo Kinshasa. Le théâtre permet par ailleurs d'élargir l'audience de ses livres. Ceci dit, je suis un grand adepte respectueux des prestations théâtrales.

Le modérateur : Cela m'amène presque forcément à la question suivante : avez-vous une préférence pour un type précis d'adaptation ou, disons, une affection particulière ?

Yasmina Khadra : Moi, je suis un grand admirateur des artistes. Quel qu'en soit l'art. Chaque artiste a le droit d'interpréter mes œuvres en fonction de ses sensibilités. Je ne peux rien lui imposer; il est dans sa souveraineté. Or, il est vrai, il y a eu des adaptations cinématographiques de certains de mes romans où ce n'était pas tel que je le voulais. Je me rappelle le personnage de Kosinska. C'était quelqu'un qui était enfermé dans sa schizophrénie, dans sa paranoïa. Il n'y a que lui face à ses fantasmes. Cependant, quand j'ai vu l'adaptation, il y avait le père, la mère, la terre... Ce n'était pas ça du tout que je voulais. Mais je respecte. Il faut accepter, l'artiste est souverain. C'est un génie qui essaye de donner au texte une représentation personnelle. Déjà le fait qu'un réalisateur ou un dramaturge s'intéresse à mon ouvrage est en soi un grand honneur pour moi. Après, s'il passe peu ou prou à côté, je ne peux qu'être indulgent avec lui... L'essentiel, c'est d'œuvrer toujours dans les arts. Même si on est un peu malhabile. Si on n'échoue pas, on ne peut pas prendre conscience de ses erreurs. C'est en se corrigeant qu'on peut avancer dans la vie.

Le modérateur : Est-ce parce que vous aimez la solitude et travailler seul plutôt qu'en collectif que vous préférez n'écrire que les romans ?

Yasmina Khadra : Ce n'est pas une question de travail en solo ou en groupe. C'est une question de souveraineté. Quand on est romancier, on est souverain de notre œuvre. On traduit tout ce qui nous interpelle comme imaginaire. J'aime pouvoir créer un monde qui est à moi. Après, je le propose au lectorat. Il y en aura ceux qui vont l'accepter et ceux qui vont le rejeter. Ma satisfaction, c'est d'avoir fait œuvre... J'aime la fiction par ailleurs. Quand je suis devant mon écran et que cet écran est vide que je commence à habiller mes émotions, je suis dans mon monde à moi. Je suis beaucoup plus à l'aise dans le roman que dans l'essai ou la biographie.

Le modérateur : Ici, nous sommes au Théâtre régional d'Oran, chez Mourad Senoussi. On est chez Abderrahmane Kaki, chez Abdelkader Alloula... Est-ce qu'il y a dans le patrimoine théâtral algérien des personnages qui vous parlent plus que d'autres ?

Yasmina Khadra : Nous avons une perception d'infériorité de soi. Nous pensons que tout doit nous venir d'ailleurs, que l'excellence est de l'autre bout du monde et que nous, nous sommes toujours dans l'apprentissage. Dans ce pays, il y avait -et il y a toujours- des gens qui étaient des génies incommensurables. Que ce Kaki ou Alloula, ils ont la même pointure que celle des plus grands dramaturges au monde. Je me rappelle, par ailleurs, que les Algériens étaient de grands fans du théâtre dans les années 70. Je souhaite du fond de mon âme que le théâtre, le cinéma, la culture, la littérature reviennent dans ce pays. Un pays où il n'y a pas la culture est un pays en état de putrescence, en voie de disparition. La décomposition commence lorsqu'on n'a plus de repères. On est dans la vulnérabilité, la petitesse, et cela aggrave le sentiment d'animosité et d'antipathie envers tout ce qui est beau, magnifique. Et c'est de là que commence l'anéantissement de soi-même.

Le modérateur : Ceux qui sont familiers de vos textes connaissent votre talent à transformer les mots en images, à leur donner une visualisation que l'on ne trouve rarement ici et ailleurs. D'où vous vient ce talent ? Est-ce un talent que vous avez acquis de votre petite expérience cinématographique durant votre jeunesse ou qui vous est intrinsèque ?

Yasmina Khadra : Non, il m'appartient. Quand on écrit, soit on est soi-même, soit on essaye de mimer quelqu'un. Je connais pas mal d'écrivains algériens qui essayent d'imiter les autres souvent avec un style trop français, comme on dit. Le juste, c'est d'être soi-même. Nous, nous sommes un peuple visuel. On perçoit et on appréhende le monde qui nous entoure essentiellement avec notre sens visuel. Et plus particulièrement au désert du Sahara d'où je viens. Quand on est dans cette façon de voir le monde, on peut trouver les mots et les adjoindre à des images. Ce n'est pas que je n'aime pas le cinématographique, mais quand j'écris, j'essaye de ravir à ma façon le lecteur à son environnement et l'engager dans un milieu imaginaire où il vit. Je veux qu'il sente les odeurs qu'il perçoit d'une personne fâchée, par exemple. Et qu'il partage tout avec elle. Le vrai écrivain, ce n'est pas celui qui met des mots sur les images mais plutôt les émotions sur les images. Mon but est que le lecteur trouve dans chaque page ce qui le transporte et le transpose dans un autre univers. En même temps, je travaille sur la psychologie, la philosophie, le dialogue... Tout cela permet au lecteur d'être en osmose avec ce que je lui raconte. Pour moi, un roman qui ne palpite pas entre mes doigts est une lettre morte... C'est comme ça que je construits mes romans.

Le modérateur : Et quelle est la source de cette construction ? Cela vous vient d'une inspiration, d'une intuition ou d'un travail d'athlète ?

Yasmina Khadra : C'est un travail titanesque. Je commence toujours par imager l'histoire, c'est pour cela que l'image est omniprésente dans mes textes. Le plus grand effort que je dois déployer, c'est comment écrire en français ce que je ne ressens pas en français. Ensuite, j'essaye au fil du texte d'installer ma scène, mon décor... Il faut toujours savoir élaguer quand on écrit, il faut savoir être économe. Il faut que le texte soit percutent, incisif, ne lâche plus rien.

Le modérateur : Vous vous relisez Yasmina Khadra ?

Yasmina Khadra : Je suis mon plus grand lecteur.

Modérateur : On trouve toujours cette envie de voyager et d'errer à travers vos textes. Vous-mêmes êtes un grand voyageur.

Yasmina Khadra : Il faut peut-être revenir à mon enfance. Mon père m'a pris par les mains et m'a mis dans une école de cadets. A cet âge-là, on a besoin de sa maman, de son quartier, de son jardin, de son épicier... Et là, je me retrouve coincé entre les murailles qui m'ont confisqué le monde. Dans une atmosphère quasi carcérale entre les mains d'hommes qui n'avaient aucune idée sur la pédagogie d'enfant. Qui essayent de donner le meilleur d'eux-mêmes. Or, c'était quoi le meilleur d'eux-mêmes si ce n'est d'être sévères. Non pas pour élever des enfants mais pour dresser des hommes de demain. Et c'est pour cela que le livre a été pour moi un sauveur. Car le livre était cette brèche que je taillais dans les murailles, qui m'interdisaient de voir le monde. On entendait même le bruit de la circulation.

On était isolé, y compris en nous-mêmes. C'est pour cela que quand j'écris, j'aime voyager, changer d'air. Ecrire pour moi, c'est récupérer tout ce qu'on m'a confisqué. J'aime m'attarder sur les villages et les villes. On a tellement été formatés qu'on pense qu'on est différents des autres. Mais c'est faux. J'ai beaucoup voyagé à travers le monde et je sais que tous les peuples se ressemblent, sentent la même chose et réagissent de la même sorte dans la joie et dans la peine, dans le bonheur et dans l'adversité. J'ai été dans les pays les plus reculés, où j'étais très peu lu. Il y avait quelques lecteurs qui venaient me voir. Ils étaient comme tous les autres. La littérature est là pour dire que nous pouvons se parler et nous tolérer.

Le modérateur : J'aime beaucoup votre conception lorsque vous dites que le littérateur est un démolisseur des murs et des croyances.

Yasmina Khadra : Encore une fois, on a été formaté. On renonce à notre libre arbitre. On est impressionné, intimidé, par l'opinion des autres. C'est là où l'on enterre sa singularité et on devient l'otage de n'importe quel mouvement, parce qu'on a perdu notre liberté de penser. Je me rappelle des Japonais, ils ont mis beaucoup de temps à traduire mes livres. Pourtant ils venaient chaque année au Salon de Frankfurt et à celui d'Alger pour en acheter. Et quand ils ont fini par me traduire, ça a fait plein d'articles sur des journaux japonais à grand tirage. Et c'est ainsi grâce à mes livres qu'on a ouvert une branche de la littérature algérienne à l'Université de Tokyo... La littérature n'a pas d'identité. C'est une sorte d'alchimie qui nous permet de restituer notre humanité. On devient humain quand on lit. Qu'on soit au Congo Brazzaville, à Sri Lanka ou à Lesotho, c'est pareil, tout nous parle et nous communique, on le perçoit avec intelligence. Seul le discernement nous fait adorer ou ne pas adorer ce qu'on reçoit, y adhérer ou ne pas y adhérer. C'est le livre qui est le meilleur ami de l'homme. Ce n'est ni le chien, ni le cheval ni encore moins le fusil.

Le modérateur : Vous avez une littérature qui touche presque à tout de la vie de la société algérienne. Comment parvenez-vous à surfer sur autant de thématiques et, dans le même temps, à rester attentif à tout ce qui se passe à travers le monde ?

Yasmina Khadra : Il est grand temps d'écrire sur le monde. Pourquoi laisser seuls les Occidentaux écrire sur le monde. En plus, eux quand ils parlent du monde, ils le font souvent dans la fausseté, avec des clichés, des aprioris... Nous avons quelques choses à dire sur le monde. Nous avons à donner et pas seulement à recevoir. J'ai voyagé dans des pays reclus, le Brésil, le Mexique, l'Australie... et on m'a posé la question de savoir qui sont mes auteurs préférés. J'y ai répondu qu'il y avait, entre autres, Naguib Mahfouz et Taha Hussein. Mais là-bas, les gens ne connaissent pas ces écrivains. Ou plutôt, ça ne les intéresse pas. Un prix Nobel de littérature qui ne les intéresse pas. C'est terrible ! Alors on est là pour dire que nous avons notre mot à dire au monde sur le monde. J'ai écris sur pas moins de 25 villes algériennes, mais j'ai le droit d'écrire sur le Mexique, parce que j'y ai vécu, sur l'Irak, parce que j'y étais, sur l'Afghanistan, car son problème m'intéresse... J'ai le droit de voyager tout en faisant voyager mon lecteur. C'est ce que je dis toujours aux jeunes écrivains de mon pays : évitez la protestation et l'identitaire. Tout le monde en a des problèmes. Il n'y en a pas un seul pays sur cette planète qui vit dans la quiétude la plus euphorique. Il faut échapper à cette espèce d'engrenages de ses propres déboires. Il faut s'ouvrir sur la littérature universelle.

Le modérateur : Si on essaye de faire une analyse rétrospective dans le cheminement de vos œuvres, disons entre Le privilège du Phénix et les Vertueux dont on va parler tout à l'heure, on remarquerait une évolution dans la construction de vos textes littéraires. Entre ces deux séquences de création, vous étiez sur un genre qui vous a rendu célèbre, dans lequel vous avez été particulièrement excellent. Je parle en l'occurrence du Polar. Pas plus tard qu'aujourd'hui, des gens m'ont dit : «Oh, c'est dommage que Yasmina Khadra n'écrive plus des romans policiers, lui qui excellait dans ce domaine». Qu'est-ce que vous en pensez ?

Yasmina Khadra : Oh, je ne suis pas un ségrégationniste. Il n'y a pas pour moi une littérature blanche et une littérature policière. Il n'y a que le talent d'écrivain. Même le terme «genre» est arbitraire. Il y a d'abord l'écrivain. Il y a des écrivains qui peuvent écrire des romans policiers avec qualité, avec des textes sublimes. Le roman policier a considérablement vulgarisé les problèmes de la société. Parfois, il nous propose des solutions et nous montre la voie...

Le modérateur : Attendez, attendez !... Ma question est directe : est-ce que vous prenez ces remarques des gens qui disent que Yasmina Khadra n'écrit plus des polars comme étant des reproches, oui ou non ?

Yasmina Khadra : Non, c'est plutôt une exigence. Ce sont les lecteurs qui nous font. Qu'est-ce qu'un écrivain ? C'est un faiseur de livres. Mais le fabriquant de l'écrivain, c'est le lecteur. S'il n'y a pas de lecteur, on en est qu'une lettre morte. J'aime beaucoup cette métaphore. Mais, sincèrement, ce sont les personnages qui imposent le genre. D'ailleurs, c'est comme ça que le commissaire Llob s'est imposé à moi (dans Double Blanc, publié en 1995). J'étais aux fins fonds de Tamanrasset, ils avaient besoin de me joindre un commissaire qui serait susceptible d'aiguiller un peu mes journées car il n'y avait rien là-bas. Déjà à Oran, il n'y a rien, alors à Tamanrasset... ? A part le vent de sable et les mirages... Puis, il y a Les Anneaux du Seigneur, c'est terrible, j'étais engagé dans la lutte antiterroriste, dans un texte aussi brutal, aussi enténébré. Ça ne faisait qu'accentuer cette angoisse qui était en moi. Pas uniquement pour moi-même, mais aussi pour tout mon pays que je voyais partir en fumée. C'est le commissaire Llob qui m'a permis de raconter la décennie noire dans une sorte de lucidité. Il me fallait rester lucide avec le commissaire Llob, parce que lui il était plus vaillant que moi, plus courageux, honnête. Puis il avait ce regard, disons pas cynique mais ironique sur la tragédie. En fait, il avait tout compris et tous les Algériens se sont reconnus en lui. Puis, il y a des sujets qui m'interpellent. Je ne peux pas rester comme ça... Je ne peux pas prendre ma plume et dire je vais commencer par la fin. Il y a des gens qui commencent par une phrase et ne savent plus où ils vont. Si je n'ai pas la chute, si je n'ai pas la fin, tous les personnages, enfin tout, je ne peux pas commencer. J'aurais le sentiment de tricher. Il faut que j'aie une certaine assurance d'aboutissement de mon œuvre. Et, moi, je change de styles aussi. C'est d'ailleurs ça qui m'a rendu suspect en France, car ils n'arrivent pas à comprendre comment... D'ailleurs, il y a eu un panel d'écrivains, des experts de haut rang qui avaient disséqué Morituri, les Anneaux du Seigneur et Pour l'amour d'Eléna. Ils sont arrivés à ce constat sans appel que celui qui a écrit Morituri n'a rien à avoir avec les Anneaux du Seigneur qui, lui, n'a rien à avoir avec celui qui a écrit Pour l'amour d'Eléna. C'est comme ça que la polémique a commencé : qui a écrit quoi ? C'est un vrai combat !...