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Après le tourisme exotique, les vacances lubriques, le capital donne congé aux voyages de masse toxiques (2ème partie)

par Khider Mesloub

Tourisme sexuel

Tout se consomme, la nature comme les humains. Aussi, ces dernières années, l'intérêt ne se portait plus seulement sur les paysages idylliques, la découverte des « bons sauvages », par ailleurs graduellement détruits par le capital. Le tourisme contemporain, à l'image de l'Occident libidinalement perverti, s'est sexualisé. Le touriste prédateur s'envole vers les contrées exotiques pour goûter aux charmes des corps sensuels «indigènes» juvéniles, de préférence impubères, dotés d'une volupté virginale.

Cette nouvelle consommation touristique sexuelle est la dernière forme d'exploitation capitaliste (occidentale, orientale, méridionale, septentrionale).

Certes, les anciennes puissances coloniales et impérialistes n'occupent plus les terres fertiles et fécondes des pays du Sud, mais certains de leurs lubriques habitants n'hésitent pas à s'accaparer les corps lascifs des autochtones impubères, pour assouvir leur appétence libidinale insatiable.

Ces nouvelles prestations sexuelles participent de la nouvelle industrie touristique internationale offerte aux lubriques occidentaux et orientaux riches des pays du Golfe, en quête de transcendance sensuelle exotique, de débauches orgiaques touristiques. Ces escapades libidineuses participent de la nouvelle forme de domination du mode de production capitaliste libertaire et libertin mondialisé.

Dans ce secteur lucratif et lascif du tourisme sexuel géographiquement en pleine turgescence, outre la Thaïlande, le Maroc est devenu une des destinations favorites du tourisme lubrique, l'eldorado des pédophiles. En particulier, des pédophiles français et européens, sans oublier les féodaux orientaux des pays du Golfe, adeptes des prosternations lascives. Les victimes, en majorité mineures, sont racolées par des rabatteurs en échange d'argent.

Au Maroc, cette industrie du sexe, à la prospérité et postérité garanties, a toujours été tolérée par le Makhzen, qui l'a sacrée en activité principale du pays car elle procure un certain zen à leur tempérament lascif et belliqueux.

Cette économie des amours tarifées, nullement prête à se raréfier, en particulier dans le contexte de crise sanitaire et économique actuelle, profite à de multiples acteurs de la société marocaine : tenanciers de bars, videurs de discothèques, taxieurs, policiers (qui ferment les yeux en échange de quelques billets ou faveurs sexuels gracieuses), les loueurs d'appartement, les hôteliers, qui vivent sans scrupule de l'exploitation sexuelle de leurs progénitures, leurs jeunes compatriotes livrés à la prostitution. Dans la plupart des hôtels touristiques des jeunes femmes offrent leurs services aux étrangers de passage. Globalement, ce sont majoritairement des professionnels du sexe tarifé. Mais certaines se prostituent de façon occasionnelle (pour elles, c'est un hobby tout à fait intégré dans leurs mœurs dissolues). Plus anonyme, la prostitution masculine est très répandue également. Même des enfants se livrent au racolage pour quelques dirhams. Au Maroc, tout se vend, surtout leurs dirigeants, en particulier leur roi qui vient de s'offrir libéralement aux sionistes qui ne tarderont pas à transformer le royaume en lupanar, comme les Américains, avant la révolution castriste, avaient transformé Cuba en bordel. Il n'y a pas que la prostitution «traditionnelle», qui permet aux touristes hommes de s'offrir les services sexuels de jeunes filles ou garçons. Il existe également la prostitution «cougarienne», celle qui permet aux touristes femmes occidentales, âgées entre 50 et 70 ans, de passer leurs vacances lubriques en compagnie de jeunes hommes, moyennant rétribution.

Sans conteste, pour les touristes en quête d'aventures lubriques, les conditions sont idéales : la monarchie marocaine leur garantit une royale impunité, la loi du silence et le silence de la loi. Selon les informations, le tourisme sexuel se serait considérablement développé dans le royaume chérifien, royaume qui chérit bien ses touristes libidineux. Dans la seule ville de Marrakech, les deux tiers des enfants prostitués se consacrent uniquement aux touristes. Touristes chouchoutés mais nullement chahutés, bichonnés mais jamais bastonnés, dorlotés mais aucunement menottés, par la population marocaine consentante. Contente de l'attrait touristique de son pays sexuellement dépaysant, sensuellement plaisant, voluptueusement apaisant. Le touriste ne vient pas à Marrakech pour admirer uniquement le minaret de la Koutoubia, mais, surtout, cajoler les tibias des minets.

De façon générale, le tourisme est à l'aventure ce que la prostituée est à l'amante. Il est vénal et chronométré, et surtout il multiple les clients pour enrichir ses maquereaux financiers. C'est une entreprise de racolage. Les campagnes de publicité pour aguicher les clients sont envahissantes. Au plan des séjours, les parcours touristiques sont balisés, biaisés, banalisés. Ils sont soumis au conformisme. En lieu et place de l'aventure, le tourisme privilégie la visite guidée, téléguidée, l'atmosphère enguirlandée. Privilégie les nuits des chambres d'hôtel aseptisées aux nuits à la belle étoile naturellement climatisée. L'ensauvagement par l'esprit au corps ensauvagé. Les voyages aux pays des merveilles aux aventures dans les merveilles des pays. En un mot, un tourisme mis au format d'un centre de loisirs, à l'instar de Disneyland. Un tourisme sous cellophane. Un tourisme chloroformé.

En comparaison, jadis, nos ancêtres, sans voyagistes ni transporteurs, parcouraient la terre avec plus d'esprit aventurier que nos touristes dépressifs contemporains. Ils emportaient dans leurs pérégrinations pédestres interminables, à dos d'âne ou à cheval pour les plus nantis, pour seul bagage, leur viatique. Et pour seule quête : la spiritualité et l'apaisement de l'âme. Dans leurs itinéraires, motivés parfois par le pèlerinage, ils trouvaient partout gîte et couvert mis gracieusement à leur disposition par les habitants des villages traversés. Cet esprit d'hospitalité était la règle, la coutume millénaire en vigueur dans toutes les anciennes sociétés traditionnelles.

De nos jours, sur le chemin de la route, un voyageur, tenté par l'aventure, ne rencontre que portes closes et terrains clôturés. Qu'indifférence et méfiance. Cherche-t-il un endroit où passer la nuit ? Aucun espace sans clôtures ne s'offre au voyageur aventurier impécunieux : aucune âme charitable ne lui fournira gîte et couvert, ni portion de jardin pour la nuit. En revanche, l'endroit traversé exhibe une multitude de panneaux sur lesquels sont indiqués les noms des nombreux hôtels et auberges. Cette offre marchande de notre société capitaliste moderne marque la différence fondamentale avec l'invitation gratuite des sociétés traditionnelles où toutes les maisons étaient dépourvues de serrures, comme les cœurs de leurs habitants n'étaient pas verrouillés par l'individualisme, l'égoïsme. Elle marque la différence entre le gîte payant et l'hospitalité désintéressée. Entre la société marchande et la société du don. Entre la société capitaliste régie par la carte bleue et la société traditionnelle gouvernée par le cœur blanc.

Désert touristique algérien

Quant à notre cher pays l'Algérie, il a toujours été en délicatesse avec le tourisme. Assurément, en Algérie, le tourisme ne décolle pas. Pourtant le pays recèle des trésors touristiques splendides. En dépit de ses multiples atouts enchanteurs, l'Algérie n'attire pas les investisseurs dans le secteur du tourisme. Donc les touristes. Pourtant, pourvue d'un littoral de 1.600 kilomètres, l'Algérie constitue une destination idéale pour le tourisme. Sans oublier d'autres merveilles, tels les vestiges romains, les gravures rupestres, le majestueux désert. Néanmoins, le tourisme sommeille sous le soleil ardent réchauffant, irradiant uniquement les habitants algériens, sous le ciel bleu azur réservé aux seuls citoyens algériens. Et pour cause.

Nombre d'Algériens intéressés, notamment la corporation affairiste sévissant dans le commerce, déplorent l'absence d'investissement dans le secteur du tourisme. En effet, l'activité touristique en Algérie ne parvient pas à se réveiller de sa léthargie économique. Actuellement, en Algérie, ce secteur touristique fait l'objet d'un immense investissement verbal politique par les acteurs de la représentation nationale et commerciale pour redynamiser le tourisme. Toutes les solutions sont proposées par les affairistes du secteur touristique, ces requins financiers pressés de transformer les côtes balnéaires algériennes en complexes bétonnés lucratifs pour eux, mais écologiquement et architecturalement répulsifs aux yeux des Algériens.

D'aucuns suggèrent, pour booster le tourisme en Algérie, de favoriser le tourisme cynégétique ou chasse touristique. Rassurez-vous : il ne s'agit pas de « tourisme génésique », à la manière marocaine, autrement dit chasse de la chair fraîche humaine. Le tourisme cynégétique, destiné à une clientèle fortunée, permet aux richissimes de se livrer à la chasse du gibier. Mais ces lubriques touristes se livrent souvent aux deux formes de tourisme : cynégétique et génésique, notamment au Maroc abondamment pourvu de gibiers.

Une chose est sûre : l'activité touristique n'est pas près de décoller. Pour preuve, ces vingt dernières années, l'Algérie n'a attiré que 3.000 touristes par an. Chiffre ridiculement dérisoire comparé aux autres pays voisins, la Tunisie et le Maroc. En 2018, le nombre de touristes venus en Algérie n'a pas excédé 2.000 visiteurs. Le secteur du tourisme a été négligé sous le règne de Bouteflika, en particulier par ses acolytes ministériels et affairistes écornifleurs, occupés à exporter leurs richesses spoliées vers les pays étrangers, expatrier leurs progénitures et familles dans les contrées riches.

À cet égard, il est utile de relever que, sur la carte touristique mondiale, l'Algérie demeure toujours inexistante, inconnue du système GPS des voyagistes. Depuis 30 ans, l'Algérie est absente sur la carte touristique internationale. Pourtant, ces dernières années, à la suite de la baisse du prix du pétrole, dans le cadre du projet de diversification de l'économie algérienne principalement tributaire des hydrocarbures, l'activité touristique a été inscrite dans le programme de réorientation de l'économie. En dépit de la volonté affichée par le pouvoir de promouvoir et de relancer l'activité touristique, on n'assiste à aucun redémarrage de ce secteur déserté par les investisseurs. Outre l'indigence de la politique de promotion du tourisme en Algérie, vient se greffer le problème de l'obtention du visa algérien pour les nombreux voyageurs désireux de visiter l'Algérie.

Aujourd'hui, au plan des infrastructures touristiques, l'Algérie ne dispose que de 60.000 lits en bord de mer dont moins de 10% correspondent aux normes internationales. À l'échelle nationale, l'Algérie compte seulement un peu plus de 110.000 lits. En outre, pour des raisons de sécurité, de nombreux sites touristiques, tel le Hoggar, sont fermés aux étrangers. Au reste, sur le plan rapport qualité/prix, en termes d'attractivité tarifaire, l'Algérie demeure parmi les destinations les plus onéreuses de l'Afrique du Nord. Juste pour le prix du billet d'avion, le coût du voyage est exorbitant. Sans compter le coût du séjour très élevé comparé aux autres pays voisins.

Néanmoins, eu égard à notre analyse critique du tourisme, en général, décrite plus haut, contrairement aux thuriféraires du libéralisme, partisans de l'ouverture de l'Algérie au tourisme, on peut conclure que la décision de fermer les frontières au tourisme international dans les années 80 a été un choix politique légitime. En effet, à la faveur de l'augmentation considérable des recettes pétrolières, dès les années 1990 / 2000 l'Algérie avait tourné le dos au tourisme exogène, le tourisme réceptif international. Pour promouvoir et investir dans le tourisme endogène, destiné aux seuls citoyens algériens.

En outre, ce choix de se détourner du tourisme international avait été motivé par des raisons de préservation des traditions algériennes susceptibles d'être corrompues par l'invasion des touristes occidentaux porteurs de cultures étrangères dissolvantes (sic). Cette crainte du saccage du patrimoine culturel algérien par les hordes touristiques occidentales et/ou orientales est fondée. De même, la peur de la pollution immorale de l'Algérie par ses multitudes occidentales/orientales libidineuses est motivée. L'Algérie a eu raison de refuser de transformer le pays en dépotoir « déculturatoire » touristique, en bordel des Occidentaux ou des Orientaux, en contrée exotique exploitée par le capital financier international. Le tourisme est le colonialisme contemporain de l'Occidental pauvre, cet idiot heureux appartenant à la petite et moyenne bourgeoisie, infatué de son aliénation, qui, l'espace de quelques jours, pétri de relents colonialistes et paternalistes, peut se croire riche dans un pays pauvre, se comporter en territoire conquis par la grâce de ses dollars ou euros amassés par son esclavage salarié. Par ailleurs, le secteur touristique est très aléatoire, entièrement tributaire des caprices des touristes, des effets de mode, et, aujourd'hui, des vicissitudes géostratégiques ou sanitaires. Un pays dépendant des recettes du tourisme s'expose aux retournements de situation géostratégiques et sanitaires, au basculement des habitudes des consommateurs de voyage.

A suivre...