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Des pannes à venir

par Akram Belkaïd, Paris

La grande panne n’aura duré que quelques heures mais elle sonne comme un avertissement majeur pour l’économie mondiale. Lundi 4 octobre, le réseau social Facebook ainsi que ses dépendances et filiales (messageries WhatsApp et Messenger, réseau Instagram) ont cessé de fonctionner durant plusieurs heures. Des centaines de millions d’utilisateurs ont été directement pénalisés. Dans le même temps, les internautes se ruaient sur d’autres réseaux comme Twitter ou les messageries Telegram ou Signal. D’autres redécouvraient les joies du message «sms» ou celles de la lecture ou de la télévision.

Une dépendance importante

Cette panne nous dit que des millions d’usagers sont trop dépendants des réseaux. Dans de nombreux pays, notamment au Maghreb, Facebook n’est pas simplement un lieu d’échanges. C’est le média numéro un pour s’informer, pour échanger avec ses proches, pour passer des annonces, pour acheter ou vendre ou, enfin, pour commenter la situation politique. Le Krach de lundi, qui demeure en partie inexpliqué malgré le discours de Facebook, est donc un avertissement de taille. Une trop grande dépendance à n’importe quel réseau est une immense vulnérabilité et cela oblige à y réfléchir.

La seule solution immédiate serait de diversifier ses canaux. D’ailleurs, nombre d’internautes l’ont compris en s’inscrivant pour la première fois sur des réseaux qu’ils n’utilisaient pas (ce qui n’a pas manqué de provoquer des messages ironiques des «vétérans» comme ce fut le cas sur Twitter). Mais cela ne suffit pas. Car, lundi dernier, Internet continuait de fonctionner et donc offrait ces solutions de repli. Qu’en serait-il si le réseau venait entièrement à cesser de fonctionner. Les Algériens connaissent cette situation puisqu’il arrive que la Toile soit inaccessible pendant plusieurs jours en raison des épreuves du baccalauréat. Mais dans ce cas, il s’agit d’une interruption limitée dans le temps et chacun peut l’anticiper. Quid d’une interruption de plusieurs semaines ?

Anticipation nécessaire

L’économie mondiale est désormais totalement dépendante d’Internet et, pour reprendre une expression américaine, «it’s not granted». En clair, le web n’est pas exempt de failles ni de faiblesses intrinsèques, cela sans compter les risques d’attaques massives de la part de pirates ou de n’importe quelle puissance. Il ne s’agit pas ici de faire du catastrophisme digne d’un film de série B mais de rappeler que plusieurs armées du monde intègrent ce scénario d’une panne majeure-et durable-d’Internet dans leurs scénarios de prospective.

Dans certains cas, par exemple, il est recommandé aux gouvernements de continuer à maintenir en état de marche les réseaux d’antan : téléphonie fixe - que plus personne ou presque n’utilise en Occident - télex, télécopie voire télégrammes et pneumatiques. Ces derniers mots peuvent faire sourire mais l’affaire est sérieuse. Pour dire les choses autrement, trop de gouvernements, de pouvoirs locaux ou même de particuliers font une confiance absolue à l’existant. Il ne s’agit pas de tomber dans le survivalisme à l’américaine en se préparant au pire, mais simplement de faire preuve d’un minimum d’anticipation. Car, il ne faut pas s’y tromper : il y aura d’autres pannes.