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Etude comparative du bâti de la vieille ville d'Oran, avant et après le séisme de 1790

par Amira Zatir*

Selon les règles parasismiques algériennes RPA 99 version 2003, la ville d'Oran est classée en zone IIa (sismicité moyenne), ce qui explique d'autre part que cette zone a été frappée par des secousses telluriques et c'est ce qu'affirment les études du CRAAG.

Le séisme le plus mémorable qu'a connu la ville d'Oran, fut celui de la nuit du 8 au 9 octobre 1790. Cet article portera sur une étude comparative du bâti de la vieille ville d'Oran avant et après 1790. Elle englobera les aspects généraux des constructions présentes à nos jours dans l'ancien noyau urbain ayant résisté à ce séisme.

1. La méthodologie d'étude adoptée

L'ancien noyau d'Oran a subi plusieurs modifications constructives et structurelles, conséquence des différents changements d'occupations et par conséquent urbains qu'a touché la ville d'Oran, et d'autre part, les dommages du bâti lors du séisme de 1790.

Il s'agit de suivre une méthode comparative de l'état des constructions traditionnelles actuellement dans la ville d'Oran, édifiées avant la date du séisme de 1790.

La démarche suivie a pour objectif d'inventorier les constructions ayant résisté au séisme de 1790 jusqu'à nos jours, en les repérant grâce à cette analyse comparative qui se base, en outre, sur un travail in situ, des témoignages et des données datant de l'époque espagnole.

2. L'activité sismique à Oran La localisation d'Oran dans la carte du zonage sismique du RPA 99 version 2003

Figure 1 : Carte du zonage sismique du territoire national

(Figure 1), indique que celle-ci se situe dans une zone de sismicité moyenne II a. En effet, Oran a reçu des secousses telluriques dont les magnitudes varient, et la plus mémorable est celle qui frappa la ville durant la nuit du 8 au 9 octobre 1790 dont l'intensité maximale à atteint ?IX-X'.

3. Etude comparative de la vieille ville et de la Casbah avant et après le séisme de 1790

Oran à l'époque de l'occupation espagnole et jusqu'à 1790 fut une véritable cité à l'aspect urbain et architectural militaire, mais dès son origine, la ville de Ouahran avait été murée, l'enceinte était construite en pisé. Le principal matériau de construction des édifices et habitations depuis la genèse de la ville était la pierre. Ce matériau fut utilisé dans les travaux d'agrandissement de la ville qui ont emmené à faire élargir le périmètre des murailles de la ville.

Figure 2 : Plan de la ville d'Oran avant le séisme de 1790

Figure 3 : Etat de la Casbah et la ville, antérieurement au séisme

L'aspect général des constructions après le séisme de 1790 a été résumé dans des rapports et des témoignages visant que les constructions espagnoles par contre les rapports décrivant l'état de conservation ou les dégâts des édifices turcs ou mauresques sont très rares.

Les investigations faites in situ révèlent la présence du sérail du Bey dans la partie Sud-Est, minaret de la mosquée de la Perle qui a su résister, ainsi qu'un bain maure.

Selon des témoignages requis dans l'étude de René LESPES, on note que la partie Est de la ville était toute bâtie à la mauresque, le nombre d'étages des maisons les plus élevées ne dépassait pas un premier étage, le matériau de construction fut les moellons et du mortier. On cite, en outre, que ces maisons étaient blanchies à la chaux.

Tableau V.1 : Résumé des dégâts occasionnés aux différents édifices à l'intérieur de l'enceinte de la ville d'Oran, après le séisme de 1790.

Les édifices mentionnés dans le tableau ci-dessus sont de constructions espagnoles ; l'état des constructions mauresques après le séisme n'est pas assez mentionné dans les témoignages faites auparavant. Néanmoins, un court passage dans l'ouvrage de René LESPES écrit sur la ville d'Oran décrit brièvement l'état des constructions mauresques après le séisme.

4. Etat actuel de la vieille ville d'Oran

Figure 4 : Vue satellitaire de la vieille ville d'Oran. Altitude: 790m.

Les constructions ayants résisté au séisme de 1790, quoique leurs structures soient en état de vestige, sauf pour quelques monuments et bâtiments, ces constructions diffèrent du point de vue désignation, architecture et époque de construction. Elles se localisent dans la vieille ville et beaucoup plus dans la Casbah.

Tableau 2 : Tableau d'état actuel des constructions dans la Casbah d'Oran

Figure 5 : Vue satellitaire de la vieille ville d'Oran. Altitude: 790m.

5. Performance des arcs et coupoles lors du séisme de 1790

Le système des arcs ainsi que les coupoles a montré une bonne performance vis-à-vis des forces sismiques. Les arcs rencontrés entouraient l'intérieur des patios, en outre, l'arc fut utilisé comme lien entre deux constructions, comme arc de décharges, et un passage vouté dans une ruelle, et d'autre part, présentant d'anciennes portes de la vieille ville.

Les arcs rencontrés dans les constructions présentes actuellement dans la vieille ville d'Oran prennent différentes formes : arc plein-cintre, arc polylobé et arc outrepassé. Les arcs créent des points d'appui, permettant le transfert des contraintes horizontales dans le sol. Il s'agit des arcs de décharges situés dans les ruelles de la Casbah, liant deux constructions. Dans ce cas, la résistance face aux risques sismiques est bonne, ces arcs sont faits de maçonneries de briques.

Figure 5 : Performance des arcs à l'intérieure de la Casbah d'Oran.

En essayant d'expliquer cette bonne performance des arcs face au séisme de 1790, et même postérieurement à cet évènement, on peut constater que ces arcs ont bien réagi face à la compression.

Figure 6 : Performance des arcs et le dôme du Hammam turc bati en 1708, situés dans la vieille ville d'Oran.

L'exemple de la vieille ville d'Oran, en dépit du manque de la documentation ?technique' qui remonte à la période espagnole, indique que les constructions pérsentes dans le site du vieil Oran, quoique dans un mauvais état, peuvent présenter des indices de résistantce face aux effets sismiques comme a été le cas pour le séisme de 1790.

Ces différentes constructions qui représentent l'ensemble d'une architecture traditionnelle, connaissent dans leur globalité une marginalisation et une absence d'une mise en valeur, comme fut le cas postérieurement à l'évènement sismique de 1790, en exploitant les matériaux des constructions en bon état d'ailleurs, pour en construire de nouvelles pendant la seconde présence turque et par la suite la période coloniale française. Les observations in situ retirées de ces constructions ont montré l'ingéniosité des techniques employées par les anciens batisseurs, notamment la bonne performance des arcs et coupoles dans la résistance aux forces sismiques, l'utilisation des murs en pierre taillée, qui figurent à nos jours dans les constructions existantes.

*Maître de conférences en architecture, Ecole Polytechnique d'Architecture et d'Urbanisme, El Harrach, Alger