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Première apparition depuis plus d'un mois d'absence: Tebboune rassure

par Ghania Oukazi

De son lieu de convalescence à l'étranger, le Président Abdelmadjid Tebboune a promis aux Algériens qu'il reviendra bientôt au pays et qu'il poursuivra la mise en œuvre du processus politique devant intervenir après l'adoption de la constitution.

Le président de la République s'est adressé, hier, au peuple algérien à travers une vidéo diffusée sur son compte Twiter. Il lui a rappelé qu'«il y a près de deux mois, j'ai été transféré en urgence vers l'étranger après avoir été contaminé par le COVID 19».

Aujourd'hui, dit-il «Alhamdoulillah, grâce à Dieu et aussi à nos médecins de l'Hôpital militaire et aux médecins allemands, mon rétablissement commence à se réaliser». Il pense que «ça prendra peut-être une semaine, deux ou trois autres semaines supplémentaires, mais inchallah, je reprendrai mes forces physiques». Il affirme que «mon absence du pays ne signifie pas que j'ai oublié le pays, je suis ce qui s'y passe d'heure en heure et en cas de nécessité, je donne des instructions à la présidence». En notant que son élection a eu lieu il y a une année, il dira « à propos des élections (législatives et locales ndlr), j'ai demandé à la présidence de voir avec la commission pour rédiger la nouvelle loi électorale, dans les plus brefs délais, j'espère dans10 ou 15 jours, pour lancer l'opération qui suit l'adoption de la constitution». Pour montrer qu'il est bien au courant de ce qui se passe en Algérie, il précisera que « de 1.300 cas de contamination par le COVID-19, on est à près de 520 cas» et rendra hommage «à ceux qui ont contribué à cette baisse». Au plan économique, le Président Tebboune pense que « ça marche, le budget pour 2021 montre qu'on suit ce que nous avons tracé, ça signifie que les bas salaires ne doivent être aucunement touchés par de nouvelles taxes». Il instruit «particulièrement le ministre de l'Intérieur et les walis, notamment après la chute des pluies et des neiges, pour appliquer, à la lettre, ce que nous avons convenu, ensemble, au profit des zones d'ombres et assurer en particulier le transport scolaire et les repas chauds aux élèves». Il lancera «Alhamdoulillah pour la rentrée scolaire et universitaire».

«Je souhaite être parmi vous très vite»

Le président de la république s'est prononcé sur «les situations politiques dans la région» en déclarant qu'«on s'y attendait, l'Algérie ne peut être déstabilisée, l'Algérie est forte et est plus forte que ce que pensent certains». Il paraphrasera Abderrahmane Ethaalibi pour prôner le bien-être au pays». Il dira aux Algériens en dernier que « je souhaite être parmi vous très vite, dans de très brefs délais».

En choisissant de paraître dans une vidéo, donc image à l'appui, le président de la République a voulu mettre un terme aux nombreuses supputations sur son état de santé.

Il a voulu rassurer le peuple algérien qu'il est en phase de convalescence et qu'il rentrera bientôt au pays. La complexité de la conjoncture nationale et régionale l'ont obligé à montrer aux Algériens qu'il est en vie et même bientôt rétabli. L'on se rend bien compte que ce qui se passe dans la région se trame avec une situation politique interne complexe.

Au-delà des prières et des souhaits, la réponse aux provocations étrangères imposent, cependant, aux gouvernants nationaux la mise au point de plans de riposte rigoureux au plan civil et militaire. L'on pense que le dernier éditorial de la revue ?El Djeich' n'est pas un simple verbiage. Il doit certainement dénoter d'une vision de défense réfléchie. Reste que l'appel à la consolidation du front interne devant se tenir « prêt » pour « toute éventualité » ne peut avoir aucun écho palpable sur le terrain tant que le pays manque de leaders et d'avant-garde. Révolu déjà le temps du « hirak » et des figures qu'il a mis en avant, sans aucune alternative politique digne de ce nom. Le pays est sans conteste, sans président de la République depuis 50 jours, depuis le 17 octobre dernier, jour où un Conseil des ministres a été annulé. Abdelmadjid Tebboune ne peut, depuis ce jour là, exercer aucune de ses fonctions présidentielles constitutionnelles même si, hier, il a déclaré qu'il instruit la présidence en cas de nécessité. Le déni risque de faire très mal à une Algérie dont toutes les frontières sont en feu. Le temps presse et les menaces pèsent lourdement sur les territoires alors qu'aucune alternative n'a pointé d'un quelconque horizon national. Le personnel politique se terre en attendant, en évidence, que l'état-major de l'ANP décide d'agir.

La nécessité d'alternatives d'urgences

La Constitution lui donne tous les droits en ces temps de guerre. «L'Armée Nationale Populaire a pour mission permanente la sauvegarde de l'indépendance nationale et la défense de la souveraineté nationale. Elle est chargée d'assurer la défense de l'unité et de l'intégrité territoriale du pays, ainsi que la protection de son espace terrestre, aérien et maritime» dit la Constitution. «L'armée nationale populaire défend les intérêts vitaux et stratégiques du pays conformément aux dispositions constitutionnelles». Mais la loi suprême dit surtout que «Le président de la République est le Chef suprême des Forces Armées de la République et le responsable de la Défense nationale; il arrête et conduit la politique extérieure de la Nation (...)». «Le président de la République, Chef de l'Etat, incarne l'unité de la Nation et veille, en toutes circonstances, à l'intégrité du territoire et à la souveraineté nationale.

Il est garant de la Constitution et veille à son respect. Il incarne l'Etat, dans le pays et à l'étranger. Il s'adresse directement à la Nation».

Ses prérogatives et d'autres multiples sont inscrites dans le chapitre définissant constitutionnellement «l'organisation et (la séparation) des pouvoirs». L'on ne sait même pas si, avant son départ en Allemagne Tebboune a pu déléguer au Premier ministre (...), certaines de ses prérogatives comme l'autorise la Constitution.

Bien qu'il se veut rassurant, son message aux Algériens est diffusé dans une situation de flou politique généralisé qui doit impérativement obliger, intellectuels et politiques, à s'organiser pour constituer une élite capable de proposer des alternatives d'urgence. Certes, le président de la République souhaite et promet de revenir au pays «très vite», mais si son absence s'étire dans le temps, elle défigure davantage l'architecture des pouvoirs et leurs prérogatives et précipite l'Algérie dans une situation de non constitutionnalité avérée. Ce qui appelle à sa sauvegarde immédiate et ce, par la remise en l'état de la légalité de ses institutions principales à commencer par le Conseil de la nation.