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Devant être la rampe de lancement du développement national durable: l'école algérienne doit revoir sa copie (6ème partie)

par Chaib Aïssa-Khaled*

b) elle lui apprendra à se dissocier de lui-même et de retrouver au plus profond de son être, l'unité de ses aspirations pour qu'elles l'incitent à réaliser en fonction des données qu'il aura comprises, retenues et assimilées, une œuvre qui sera la sienne.

- Balisant l'évolution civilisationnelle, l'accélération du progrès scientifique et technologique et l'aspiration de la société algérienne à vouloir évoluer au rythme de l'international, elle canalisera le cheminement de la transition d'un paradigme éducatif dominant parce qu'il a prouvé ses limites, vers un paradigme authentiquement novateur et qui permettra de cerner dans des dimensions, de moins en moins relatives, les changements appropriés à opérer à cet effet. (Le modèle éducatif existant s'est purement et simplement atrophié vu que ceux qui l'ont conçu et qui ont eu à le gérer, se sont éloignés de la pédagogie pour s'abandonner sur la pente d'un «administratisme» béat). Opérer ces changements ne signifie pas ajuster celui-ci aux préoccupations de l'heure, mais envisager de nouvelles dispositions qui :

a) encourageront la créativité et non cette passivité qui prévaut ;

b) promouvront des actions concertées et les initiatives qui jusque-là se sont hélas heurtées à un manque de coordination ou à la limite à l'interdit institutionnel et qui se sont par conséquent résolues à fonctionner à court terme, parfois même à vide ;

c) n'examineront plus le système éducatif de l'extérieur mais du «dedans» ;

d) évalueront les pratiques de gestion de la mission éducative et de l'acte pédagogique en n'usant plus de vulgaires contrôles bureaucratiques, mais en optant pour une véritable identification des problèmes et en définissant des mécanismes de soutien et de suivi à la planification à long terme pour qu'elle ne devienne une «fuite en avant», car comment peut-on faire évoluer la mission de l'école et procéder aux réajustements qui s'imposent, si on ne se préoccupe pas d'en suivre de manière critique la trajectoire, si au lieu de l'évaluer rigoureusement dans son unicité on n'en considère que des segments.

La gestion de la mission éducative et celle de l'acte pédagogique telle que pratiquée par une technocratie qui persiste à cautionner l'indigence socioculturelle algérienne, témoignent jusqu'à aujourd'hui du peu d'intérêt qu'elle a à effectuer des examens critiques objectifs de la politique éducative et culturelle développée et à en évaluer les résultats atteints.

En tous cas, l'opinion avisée déplore cette réticence à mettre en place des mécanismes susceptibles d'assurer une évaluation systémique périodique, en vue de juger de la concrétisation des objectifs fixés. Ceux qui en ont la charge se contentent de rendre compte des activités réalisées sans pour autant mesurer l'impact réel de celles-ci sur l'amélioration de la qualité du service.

De toutes manières et malgré les obstacles qui peuvent être nombreux et les résistances qui peuvent être acharnées à l'endroit de la mise en application de cette politique éducative et culturelle créatrice de renaissance, l'heure est venue pour l'Ecole algérienne de mesurer, (d'apprécier), au regard de l'enjeu, les chemins de l'avenir, de dépasser les pesanteurs et les controverses stériles et de s'attacher à définir, à ériger et à consolider ce projet éducatif parce qu'il permet aux Algériennes et aux Algériens, de conquérir leur avenir par une intégration active au progrès universel. L'heure est venue pour l'Ecole algérienne de finir avec l'âge ingrat. Cinquante ans c'est somme toute, un âge suffisamment avancé pour qu'elle prétende à l'âge de raison et devienne une «Ecole intelligente».

Développer une politique éducative créatrice de renaissance, c'est développer une politique éducative porteuse d'avenir, une politique éducative qui aura pour mission de former le citoyen algérien porte-parole de son temps, un citoyen algérien en mesure de raisonner logiquement et de juger avec méthode et nanti de compétences générales et de qualifications spécialisées,

A propos du choix de politiques éducatives et culturelles

Les choix de politiques éducatives et culturelles devant être par essence ceux des peuples, ils feront l'objet de consensus qui soient l'expression de larges débats démocratiques portant non seulement sur les moyens à mettre en œuvre mais aussi sur les objectifs à réaliser et sur les finalités à atteindre. Il s'agit, de toutes les façons, de dissiper l'ignorance et la précarité sociale qu'elle engendre ainsi que les maux qui lui sont associés, de réussir une meilleure insertion des jeunes dans la société humaine, de promouvoir dans les faits l'égalité des chances de succès, d'instaurer des modalités de partage plus équitables de l'épanouissement social, de veiller à la consolidation du processus démocratique parce que seule la démocratie peut permettre aux Etats de droit le respect de tous les droits.

Débattre des choix de politiques éducatives et culturelles, c'est ne pas perdre de vue le rôle crucial que l'école a à jouer dans l'édification d'un monde plus solidaire c'est-à-dire, dans la formation des individus ayant un sens aigu de leur interdépendance et de leur destinée commune pour dynamiser un développement qui soit à la fois humain et durable. Il est donc impératif que tous ceux qui auront à définir des paradigmes éducatifs et culturels, ne perdent pas de vue que l'école est un laboratoire où s'élaborent les attitudes, les aptitudes, les comportements et les valeurs nécessaires à l'accomplissement du développement durable. En outre, Ils ne doivent pas perdre de vue qu'elle est un espace où s'accomplira la formation du citoyen éclairé et qui admet que le développement n'est pas un phénomène naturel qu'il faut subir et auquel il faut s'adapter le mieux possible, mais l'expression d'un impératif social et politique à mettre en œuvre et sur lequel, en tant qu'acteur économique, politique et social, il doit peser.

Cependant, dans la formulation des politiques éducatives et culturelles il importe de prendre acte des préoccupations des citoyens, (leurs aspirations, leurs ambitions, leurs besoins et leurs contraintes), tant au niveau mondial que local, des objectifs et des finalités que développent une connaissance universelle et une information singulière, de leurs impacts à long terme et à court terme et des intérêts qu'elles suscitent aux plans spirituel et matériel. Il importe en outre de considérer l'extraordinaire essor des connaissances, de réfléchir aux méthodes et aux procédés permettant leur assimilation et leur exploitation et de circonscrire leurs utilités pour la cité.

A suivre...

*Directeur départemental de l'Education - Ancien Professeur INRE. Auteur. Dernier ouvrage paru aux Editions El Maârifa : «Comment mettre en état un Etat qui était dans tous ses états»