Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

NI OFFRE NI DEMANDE

par Abdou BENABBOU

L'ENIEM est à l'arrêt. L'essoufflement qui l'a étranglée a poussé à la mise en berne pour que les couleurs de celle que l'on considérait comme une pionnière de l'industrie algérienne soient ternies. On est aux antipodes des moments où les pattes blanches des privilégiés bénéficiaient des bons rares, clés de sésames des dégourdis, leur permettant d'arracher un assortiment d'appareils électroménagers. Malheureux Houari Boumediene, lui qui croyait dur comme fer qu'un peuple pouvait se suffire de se nourrir de cailloux et de pierrailles pour être heureux. La désillusion est achevée et l'on n'est pas loin de cette prophétie et les travailleurs de l'ENIEM, avec les bras croisés, ne sont qu'une infime partie d'une force dite faussement vive qui est condamnée à se familiariser avec un présent et un futur maudits. La rocaille a un espace infini entre la facture d'électricité déshonorée et un smig non garanti. Celui qui a faim n'a pas la tête dans le frigo et ceux qui font son montage ont oublié que quand il n'y a rien à y mettre, il ne sert à rien. On a fini par comprendre que l'offre ne devance jamais la demande. Et quand bien même des fabricants auraient quelque chose à offrir, ils seront face au désert du négoce.

C'est que la source du mal ne se limite pas à une histoire de rupture d'approvisionnement de pièces détachées. Tous ceux qui râlent aujourd'hui contre l'arrêt de l'importation de composants ont conscience que le marché n'a plus la simplicité d'offrir à n'importe quel opérateur l'aisance de produire et de commercer. Depuis plus d'un demi-siècle on a ricané de la règle qui exigeait que vendre ne signifie pas écouler et que l'économie est une chasse gardée pour ceux qui savent garder les pieds sur terre.

Alors on improvisera faute de mieux pour répondre non pas à la bonne tracée du futur, mais au lourd poids de l'instantané car même la mendicité sinon la solidarité ont pris dans les moments présents des consonances marchandes pour lesquelles le besogneux doit se plier.