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Devant être la rampe de lancement du développement national durable: l'école algérienne doit revoir sa copie (3ème partie)

par Chaib Aïssa-Khaled*

Notons que l'enrichissement de la personnalité n'a jamais été consacré. En effet, mégalomane et confondant le bien avec sa volonté, des pans entiers du personnel qui est aujourd'hui encore en charge du pilotage de la mission éducative et de l'acte pédagogique, n'ont jamais rien compris à la mission originelle qui devrait être la leur, structurer une société de savoir et d'action. Moralité, la mauvaise gestion de la mission éducative et de l'acte pédagogique, n'a fait, en conséquence, qu'enkyster cette indigence culturelle qui tente de faire de nous une population haineuse et violente. Elle n'a fait que témoigner du peu d'intérêt à effectuer des examens critiques objectifs de la politique éducative jusque-là adoptée.

Huitième action: les préoccupations politiques, idéologiques et administratives ne supplanteront plus les impératifs pédagogiques

La forte centralisation de la décision, l'absence de procédures fiables dans la conception, l'élaboration, l'actualisation et l'évaluation des plans de formation, la marginalisation des compétences du terrain, l'administratisation de la gestion de la mission éducative et la bureaucratisation de la gestion de l'acte pédagogique marquées en sus par l'exclusion de l'avis et du point de vue de l'élève, ont contribué à fragiliser le système éducatif et culturel algérien, n'auront plus droit de cité. Cela signifie que la recherche de l'optimisation du rendement scolaire performant, ne sera plus occultée au profit d'une vulgaire statistique descriptive se limitant à mettre politiquement en évidence des bilans essentiellement quantitatifs, (nombre d'établissements scolaires inscrits et réalisés ?de surcroît dans la précipitation - ; nombre d'élèves inscrits - les exclus sont laissés pour compte - ; nombre de postes budgétaires ouverts ? ceux qui sont recrutés et parce non formés pour la cause, jettent de la pédagogie plutôt qu'ils n'en dispensent (...etc.)

Désormais, ceux qui se succéderont dans la gestion de la mission éducative et dans celle de l'acte pédagogique, ne s'encoconneront plus dans ce qu'ils croient être leur charisme. Ils ne s'attelleront plus à de faux réajustements de parcours, c'est-à-dire qu'ils ne tenteront plus de réorienter hâtivement les trajectoires tracées. Plutôt que d'obéir à des orientations farfelues qu'elles soient politiques, idéologiques ou même administratives comme ce le fut, ils agiront.

Cela dit, pour avoir été longtemps soumise à ce diktat, l'école algérienne ne saura devenir intelligente et s'interroger sur le processus à adopter pour assurer une scolarité performante et une réussite scolaire de qualité que s les décideurs politiques (ministères qui se succéderont et leurs relais départementaux en l'occurrence, les directions départementales de l'éducation) :

- admettent que des seuils préoccupants sont franchis dans la dégradation de l'environnement socioculturel algérien ;

- cessent de théoriser leurs analyses et leurs évaluations en les stérilisant à coup de discours chiffrés ;

- souscrivent clairement et sans bavure à une stratégie éducative et culturelle déconnectée de l'omnipotence des déterminismes politiques, idéologiques ou administratifs qui ont fait de l'Algérie un pays certes scolarisé, mais combien mal scolarisé.

- cessent de marginaliser, d'ignorer même les initiatives et mettent l'Institut pédagogique national à leur disposition. (Notons que ce dernier, bien qu'il soit une institution chargée d'engager et de promouvoir des réflexions pour améliorer la gestion de la mission éducative et celle de l'acte pédagogique, est un espace qui ne sert pratiquement à rien. Aucune recherche n'y est engagée, aucune édition d'idées-forces ne se fait, aucune contribution n'y est permise, encore moins considérée, encore moins encouragée).

Ne s'enfermant plus dans leur cocon qui s'est d'ailleurs rigidifié au fil des années au point de devenir une hygiène de vie et ne s'empêtrant plus de leurs programmes d'action ubuesque, les responsables politiques, administratifs et pédagogiques auront à définir un plan de formation qui s'accorderait aux défis de l'heure et qui sera en mesure de former le citoyen autonome et responsable, le citoyen artisan de son évolution au profit du développement durable. Ils sauront débattre de la gestion de la mission éducative et opter pour celle qui consiste à investir dans l'avenir en édifiant une école qui n'opposera pas de résistance à l'évolution culturelle, (scientifique et technologique), qui est en train de faire le sort des nations, qui se confortera par conséquent dans ses attributions originelles, qui s'investira pour ce faire dans une démarche novatrice en adéquation avec les objectifs d'une réforme créatrice de renaissance devant être imminente parce qu'elle s'inscrit non seulement comme un impératif mais surtout, comme un inéluctable.

Pour jouer donc dans la cours des grands, l'Algérie devra engager une refondation pure et simple de tous les segments de son système éducatif, (pédagogie, espace scolaire, formation des enseignants, langues à enseigner, conception et élaboration des programmes d'étude, organisation des rythmes scolaires, encadrements, pédagogique et administratif, évaluations systémique et formative, orientation scolaire, profils de sortie, examens et concours nationaux... etc.). A ce propos, elle considérera l'éducation et l'instruction comme étant les facteurs de libération, d'émancipation et de progrès. Cela signifie que la gestion de celles-ci ne devra plus être la chasse gardée de ceux qui se sont érigés en théoriciens et en barons de l'Ecole, relever de leur monopole exclusif ou laissée à l'appréciation de leur seule discrétion. Constituant une priorité de la nation, le centre même de ses préoccupations, la gestion de la mission éducative et celle de l'acte pédagogique, concerneront toutes les bonnes volontés aptes à engager des réflexions.

Notons au passage que ce souci n'a pas été pris en compte vu que l'échec scolaire qui aurait pu être l'exception est, aujourd'hui, érigé en norme avec la bénédiction d'une administration qui a, tout bonnement, fait dans des stratégies-tactiques extravagantes.

A l'avenir, cette administration ne se limitera pas à avoir l'air d'avoir l'air. Elle agira pour que l'école algérienne sorte de son isolement et devienne celle avec laquelle il faudra compter. Elle regardera dans le rétroviseur pour constater que l'échec de son entreprise a été fracassant.

1) Les gestionnaires financiers ne se limiteront plus à penser budget avant de penser pédagogie

Dorénavant, les préoccupations administratives ne supplanteront pas les impératifs pédagogiques. Autrement dit, le mouvement continu des compressions budgétaires et qui a eu un impact négatif profond sur la pratique de la gestion de la mission éducative en général et sur celle de l'acte pédagogique en particulier en imprimant à l'institution scolaire, ce caractère d?immobilisme qui a défiguré son action, ne devra plus demeurer plus en tête d'affiche.

Désormais, les gestionnaires financiers libérés du diktat administratif hurluberlu qui les a tant garrottés, ne rationaliseront plus leurs dépenses. En professionnels, ils prendront seulement acte des attentes pédagogiques qui continuent, par nature, à s'exprimer et à s'accroître. A la phase de mise en place de ce qui devrait être un service pédagogique amélioré et perfectionné, cessera de succéder une ère d'austérité, de restriction, quand bien même en cette période de crise qui sévit. Une école performante ne pourra être que l'embrayage sur un essor économique et social certain et la rampe de lancement du développement durable Alors, messieurs, on ne comptera plus, on investira mais à bon escient. Autrement dit, on pensera «pédagogie» avant de penser «budget». Les limitations financières imposées par réflexe administratif, ne seront plus un réflexe de gestion.

Méditons à ce propos cette réflexion d'Abraham Lincoln qui rétorqua à son ministre de l'Education nationale, «Essayez donc l'ignorance !», lorsque celui-ci lui dit : «L'éducation revient trop chère à l'Etat». De la sorte, les modes de financement du fonctionnement de l'action éducative, de formation et de recherche, ne devenant plus restrictifs, ils ne scléroseront plus l'initiative et ne lamineront plus la performance.

2) Les Inspecteurs d'enseignement, les Chefs des établissements scolaires et les Enseignants, qui ne devront plus être garrottés par des directives administratives mais motivés, accompliront leur mission de façon pleine et entière

a) Les Inspecteurs d'enseignement ne devront plus faire dans ce mutisme et cautionné l'échec scolaire

Motivés et surtout pourvus de courage professionnel, ils n'abandonneront plus l'école aux caprices de ceux qui veulent en faire le lieu de tous les enjeux. Ainsi, ils ne contribueront plus à la promotion de ce discours-carotte des uns, de ce discours-passion des autres, de ce discours-rotatoire de tous. L'école qu'ils encadreront, ne demeurant plus cette école à laquelle lui sont tracées les limites de son expression, l'échec et la déperdition scolaires, la difficile adaptation des bacheliers à l'enseignement supérieur et la dégradation des comportements et des réflexes au profit de l'émergence d'instincts insolites normalisés à ce jour, ne le seront plus.

Ils n'applaudiront plus, comme par le passé, des réformettes « éclair », (ficelées en deux temps trois mouvements). Ils agiront et donneront plutôt le coup de pied dans la fourmilière. Ils débattront avec les enseignants émargeant à leurs circonscriptions pédagogiques des objectifs des réformes proposées pour en cerner la signification, circonscrire la pertinence des principes qui les animent et celle des finalités auxquelles elles doivent aboutir.

N'emboîtant plus, systématiquement, le pas aux réformettes en tous genres, ils ne piloteront plus leur mission au jugé comme se le fut. Ils apprendront à se réformer eux-mêmes et à se forger des aptitudes professionnelles. Ne devant plus se complaire dans ce qu'ils croient être ce charisme qu'ils délectaient telle une narcose, ils s'érigeront en force de proposition pour extraire l'école algérienne à la logique de l'inertie qui est en phase de la laminer. Ils ne prêteront plus main-forte à tous ceux qui s'ingénient à creuser le ghetto de « l'absurde ». Mieux encore et nantis de la capacité de discerner les urgences ou de prendre » les virages » qui s'imposeront, ils ne s'investiront plus, comme par le passé, dans la recherche d'accommodements provisoires, d'aménagements transitoires, de formules suffisamment « biscornues » pour en fait ne rien changer au désordre des choses.

Réformés, ils ne théâtraliseront plus le drame à coup de bilans quantitatifs, histoire d'anesthésier les opinions. Réformés, ils ne s'obstineront plus à légiférer l'incohérence administrative qui sévit, si bien que la pédagogie qui, ayant du mal à se frayer un chemin, est devenue cette pédagogie de « l'urgence » qui a eu le mérite de former en peu de temps davantage d'esprits mal formés. Ne cautionnant plus ce genre de réformettes qui se sont succédé, ils ne favoriseront plus cette émergence de pans entiers de la société qui, nourrissant une platitude éducative et culturelle démesurément indigente, répriment voire méprisent la réflexion et ses objectifs, sacralisent l'ignorance et les maux qu'elle engendre, refusent d'élaborer leur intuition.

b) Si les Inspecteurs d'enseignement ne cautionneront plus l'échec scolaire, les Chefs des établissements scolaires devront cesser de le promouvoir

Il est à noter que beaucoup d'entre les Chefs des établissements scolaires sont ceux dit de la 25ème heure, ceux qui mal armés intellectuellement, manquent de ce savoir générateur du savoir-être et du savoir-faire et ceux qui, désarmés culturellement, sont convaincus qu'ils sont parfaits, irréprochables, puissants, au-dessus de tout soupçon. Ils s'enlisent alors démesurément dans un bureaucratisme exacerbant. S'ils ne font pas dans le wait and see, ou se terrent quand l'argument à opposer leur fait défaut. Ils se limitent à rendre compte de quelques activités entreprises sporadiquement au gré de l'humeur, ou se contentent de faire semblant. Mesurer l'impact réel de celles-ci en vue d'améliorer l'activité du service, c'est trop leur demander. (Le réflexe à l'initiative est le grand absent). Ne devant plus être inféodés au professionnalisme contingenté, ils n'adopteront plus cette attitude de défense contre tout ce qui ne leur ressemble pas, contre ce qu'ils ne peuvent gérer. En professionnels avérés et motivés pour la cause, ils s'appliqueront à changer beaucoup de choses quand bien même dans le désordre des choses, ce qui devrait pourtant être la pierre angulaire de leur mission et celle de la mission des Inspecteurs et des enseignants et pourquoi pas, celle des parents d'élèves qui devront impérativement cesser d'être un vulgaire applaudimètre et de donner leur progéniture aux injures du temps en démissionnant de leur responsabilité. N'étant plus inféodés au professionnalisme contingenté, ils affronteront le rigorisme de la raison, la sévérité de la vérité, l'impartialité de la justice et la rigueur de la justesse. Ils ne «s'emmitoufleront» plus dans une espèce de rationalisme morbide comme ils ne feront plus dans une espèce de fierté très mal placée.

Ne se contentant plus de confondre le bien avec leur volonté, ils ne nourriront plus cette platitude professionnelle démesurée par laquelle ils se distinguaient. Ils ne donneront plus l'impression de promouvoir une école lépreuse. La dégradation exponentielle de l'immobilier et des mobiliers des équipements scolaires qui ne les inquiétait pas outre mesure ne sera plus de mise. Ils ne se limiteront plus à informer la tutelle et sans plus. Veiller à leur entretien relèvera désormais de leur mission. Les élèves abusés par l'échec scolaire qui les taraude et les enseignants désabusés et abandonnés sur la pente de leur imagination féconde en subtilités superflues et qui se renvoient, les uns les autres, l'image dévalorisée d'eux-mêmes, ne demeurera plus le benjamin de leurs soucis. Et quand des reproches leur seront faits sur leur gestion, ils ne vous renverront plus comme par le passé et toute honte bue, à ce minable expédient, « c'est la formation que nous avons reçue ». Sic !!!

Cela dit et nantis manifestement de compétences générales et de qualifications spécialisées, ils ne peineront plus à réhabiliter leur autorité si elle se verrait, quelque part, carencée. (A titre d'illustration, les veilleurs de nuit supposés veiller et garder les établissements, ne seront rétribués pour y dormir). Le simple contrôle de routine inopiné, sera de mise.

A propos de l'autorité. Ils ne l'exhiberont plus à travers des sursauts théâtralisés, en débridant simplement leurs instincts de rédempteurs. Ils n'éprouveront plus le besoin de donner un semblant d'allure pédagogique à la gestion de la mission éducative dont ils ont la charge. Au final et agissant de la sorte, ils ne s'inventeront plus ce réflexe monopolistique qui ne leur ressemble pas. Ils n'évolueront plus dans cet espèce de narcissisme professionnel. Ils ne brouteront plus dans des maquis desséché en se « ghettoisant » dans ce simplisme qui fut, malgré tout, le propre de beaucoup d'entre eux.

Par ailleurs, et par souci de ne plus se complaire dan la routine, ils prendront acte des progrès pédagogiques qui se précipitent à travers le monde. Une formation permanente et un recyclage continu battront dorénavant la mesure de la partition qui animera leur cursus professionnel.

Au lieu de s'enliser, motus et bouche cousue, dans un fonctionnariat indigent, au lieu de s'y investir pour que le spasme de la régression persiste et génère plus de désordre social, il leur appartiendra d'apprendre à être « des chefs d'établissements scolaires » au lieu de le « paraître ». Pour ce faire, ils se mettront au diapason des découvertes scientifiques et technologiques que livre chaque jour et admettront que la manière de concevoir aujourd'hui ne sera plus de mise demain et que les plans et stratégie de développement devront se conformer aux paramètres qu'impose de facto l'embrayage sur le troisième millénaire et sur son corollaire immédiat, la mondialisation de l'idée et du comportement.

c) Si les Inspecteurs d'enseignement ne devront plus cautionner l'échec scolaire, si les Chefs des établissements scolaires devront cesser de le promouvoir, les Enseignants ne s'évertueront plus à le fossiliser

Convaincus, motivés et qualifiés beaucoup les enseignants, (tous cycles confondus), ne s'investiront plus dans la reproduction de l'inertie. Ils ne se complairont dans un paradigme déphasé. Ils feront dans la promotion de la créativité. Ne faisant plus de la routine une hygiène de vie, ils inciteront leurs élèves à l'épanouissement.

Convaincus, motivés, qualifiés et ne se sentant pas donnés en pâture aux injures du temps, (à celles de la précarité sociale en particulier), les enseignants (tous cycles confondus), seront cet outil au moyen duquel le système éducatif et culturel algérien, sera le lieu où s'opéreront le sens de l'effort et du mérite, l'épanouissement intellectuel, l'ouverture de la pensée, la structuration de la mentalité scientifique, la promotion de la connaissance, l'élévation à la culture universelle. Ainsi, il ne s'écarte pas de son objectif cardinal, former l'homme du monde, celui qui ne s'enlisera pas dans ses préoccupations.

Convaincus, motivés et qualifiés, les enseignants, (tous cycles confondus), conviendront que l'échec scolaire n'est une fatalité à laquelle ils ne peuvent que faire des courbettes. Qu'il n'en est rien de cela. Qu'ils peuvent le prévenir pour peu qu'ils cessent de croupir dans cette léthargie et d'en faire une affectation définitive, pour peu qu'ils se décident de dispenser un enseignement «intelligent», un enseignement qui ne poursuivra plus des objectifs disparates et fugaces, mais qui recherchera l'optimum d'ensemble, un enseignement qui «jettera» les base de la formation du citoyen capable de se mouvoir, sans gêne et sans complexe dans un monde sans cesse actualisé, du citoyen autonome et responsable, de l'individu qui sera l'artisan de son évolution et l'architecte du progrès social et non, la promotion du «sujet» appelé à se fondre dans cet esprit étriqué qu'on a taillé pour lui dans la roche de la dérision.

L'échec scolaire qui mutile la société algérienne n'est rien d'autre que l'expression de la déliquescence qui macule l'école algérienne et que génère la délinquance de la gestion de la mission éducative et la délitescence de celle que subit celle de l'acte pédagogique. Il peut être aisément endigué pour peu qu'il ne soit plus le produit conjugué de la société civile qui le couve, du pouvoir politico-administratif qui l'élève au rang de norme, des parents d'élèves qui acceptent de composer avec l'école parallèle qui le cristallise, de l'institution scolaire elle-même parce qu'elle ne fait pas l'effort nécessaire et suffisant pour que les enseignants soient convaincus de leur mission. Pour peu que l'absence d'objectifs clairs et lisibles, l'absence de l'évaluation systémique, formative et sommative et la faillite du système de l'orientation scolaire, n'auront plus droit de cité.

Pour peu, en somme, que les Inspecteurs d'enseignement ne le cautionnent plus et cessent de faire dans ce mutisme complice. Pour peu que les Chefs des établissements scolaires cessent de le promouvoir en faisant dans cette désinvolture sous tendue par l'incompétence et la non-qualification pour la cause. Pour peu que les Enseignants, désormais, engagés cessent de le fossiliser.

A propos de l'engagement des enseignants. Pour s'engager à éduquer, à instruire, à former et à qualifier, ceux-ci devront choisir ce métier par intime conviction et non plus, comme ce le fut, par simple souci de subsistance, par simple souci de s'extraire des griffes du chômage. S'engager donc pour accomplir leur mission conformément aux principes de la déontologie et pour qu'elle aboutisse avec le maximum de chances de succès, les enseignants devront être qualifiés ; pour être qualifier, ils devront être motivés ; pour être motivés, ils devront être foncièrement convaincus et pour être foncièrement convaincus, il faut qu'ils soient à l'abri du besoin. C'est aussi simple que cela !!

Ainsi, bien que l'échec scolaire tend à s'ériger dans des allures quasi incontrôlables, il ne demeurera plus cette tendance lourde à dissiper.

Par souci de dissiper cette tendance lourde, il serait judicieux de prendre acte de cette vérité lors des futurs recrutements. Ne pourront donc enseigner que des titulaires de licences d'enseignement. Les titulaires d'autres diplômes ne pourront être rentables dans des salles de classe parce que non formés pour la cause et ils ne feront qu'entretenir des points morts en chaîne et on n'aura alors rien changé au désordre des choses.

Convaincus, formés pour la cause et motivés, les enseignants, (tous cycles confondus), ne conscientiseront plus l'échec scolaire comme étant l'expression de la fébrilité des élèves qui leur sont confiés, mais comme celle de la gestion de l'acte pédagogique dont ils sont en charge parce qu'elle n'aura pu enrayer leurs difficultés d'apprendre, parce qu'elle n'aura pu permettre à chacun d'eux de circonscrire ses faiblesses d'abord et de développer ses atouts intellectuels, ensuite.

Convaincus, formés pour la cause et motivés, les enseignants (tous cycles confondus), nantis d'une formation psychopédagogique sérieuse, n'ignoreront plus que l'échec scolaire peut être partiel ou total, comme il peut être permanent ou momentané et n'admettront pas, bien que dramatique, qu'il soit irréversible et qu'il est dans « leurs cordes » de lui faire échec, ils n'ignoreront plus que les aptitudes de chaque élève sont perfectibles pour peu que cette tentative de perfectibilité ne se heurte à une conception erronée qu'ils se font de la sociologie scolaire.

En matière de psychologie, ils s'accrocheront tantôt à une psychologie de laboratoire, tantôt à une psychologie faite sur le tas. L'important est qu'ils mettent en évidence les valeurs saillantes des profils psycho-intellectuel et psycho-mental de tout un chacun. Le souci est de répertorier les atouts de tout un chacun pour les promouvoir et ses faiblesses pour les corriger. Ne se référant surtout pas au subjectif et par conséquent, à l'empirisme, (méthode qui se fonde sur la seule expérience sans recourir au raisonnement), ni à l'apriorisme qu'il sous-tend et soucieux d'éclairer sur l'essentiel, ils s'investiront dans le rigorisme de la raison, la sévérité de la vérité, l'impartialité de la justice et la rigueur de la justesse.

Ils ne se limiteront plus à théâtraliser leurs analyses et leurs évaluations en se contentant de les stériliser à coups de fantasme et en se livrant à de vulgaires appréciations approximatives. En soumettant les aptitudes de leurs élèves à des sélections désordonnées, ils ne pourront concevoir et élaborer une stratégie pédagogique pouvant être innovante, c'est-à-dire celle qui leur permettra de prendre connaissance des faiblesses de ces derniers et de susciter leurs capacités de réussir. Education de l'engagement par excellence, cette stratégie pédagogique émoussera la résistance au changement. Education de la motivation, elle les incitera à être sensibles à la souveraineté du progrès. Si par conséquent les enseignants arrivent à conjuguer l'éducation de l'engagement dans celle de la motivation, ils embrayeront alors sur l'amélioration du comportement intellectuel de leurs élèves.

S'agissant des notes chiffrées, ils n'ignoreront pas que les notes chiffrées soient vécues comme une sanction, (qu'elle soit positive ou négative). Par la force des choses, celles-ci sont devenues source d'angoisse et de stress. Elles structurent peut-être l'esprit de compétition, mais elles sont loin d'être l'unique outil qui permet à l'esprit d'orienter ses investigations. Un enseignement incitatif correctement dispensé, assurera à celui-ci la compréhension des concepts, la rétention des informations, l'assimilation des connaissances véhiculées et l'exploitation de celles-ci à des fins utiles, donc une mise en phase des intérêts ce qui suppose une orientation efficace des investigations. Ils n'ignoreront pas que si cette forme d'évaluation dite sommative n'est pas accompagnée d'une évaluation formative, elle ne permettra pas à l'élève de pénétrer à l'intérieur de lui-même pour y cerner ses points forts et les organiser et circonscrire ses points faibles. Notons que dans le cas où les points faibles ne sont pas élagués, la crispation, l'ennui, la frustration et le décrochage ne pourront qu'être au rendez-vous.

Désormais, la motivation des enseignants qui ne doit pas être prise à partie, d'une part par le mutisme des Inspecteurs d'enseignement à l'endroit des directives de l'autorité de tutelle, (notons qu'ils n'ont pas le droit de juger de la faisabilité ou de la non-faisabilité de celles-ci) et par la désinvolture ou la non-qualification des Chefs des établissements scolaires, d'autre part, ne doit surtout pas subir la forfaiture de la mal vie. Notons à ce propos, qu'à ce jour ils sont installés dans une sorte de résignation indigénale. Prenant acte de leur impuissance à changer le cours des évènements, ils voient dans ce comportement fataliste la seule issue possible.

En conclusion, on peut dire que les répercussions négatives sur la scolarité des élèves, générées par le mutisme complice des Inspecteurs d'enseignement, par la non gestion des Chefs des établissements scolaires et par la démotivation manifeste des Enseignants, ne seront pas, par conséquent, des moindres. L'échec scolaire s'étant, alors, écumé des années durant, la mutation de la société algérienne qui en a subi les conséquences, est on ne peut plus éloquente, (la dégradation des comportements et des réflexes étant légion). Les repères culturels de celle-ci, (la société), pourtant valorisants, usés parce que négligés, elle n'arrive pas à s'amarrer à l'universalité. Elle est, alors, résignée à admettre que son sort se défasse quand bien même elle refuse, en son for intérieur, de dépérir sous le joug de l'infériorité, de l'humiliation et de la dépendance. Comme condamnés à se mettre en marge du progrès, des pans entiers de celle-ci se contentent alors de contempler ce qui se fait sous d'autres cieux. L'esprit qui sait est sommé de vivre caché pour qu'émergent des instincts insolites. Cette réalité a imprimé dans le comportement des jeunes un appauvrissement par dégénérescence si bien qu'affichant une espèce de schizophrénie collective, ils se limitent à survivre à l'intérieur d'eux-mêmes pour y nourrir le mythe du «vivre ailleurs».

Le souci est de pallier ce déficit

Améliorer le rôle des gestionnaires de la mission éducative et de l'acte pédagogique ne peut qu'en être le moyen

Améliorer le rôle des gestionnaires c'est d'abord :

Mettre en place un paradigme de gestion de la mission éducative et de l'acte pédagogique qui ne soit plus à dominante bureaucratique. C'est aussi faire en sorte que les Inspecteurs d'enseignement et les Chefs des établissements scolaires s'engagent plus activement dans l'animation de leur mission en s'investissant dans une étroite collaboration avec les personnels placés sous leur autorité et avec ses élèves pour l'enseignant et promouvoir et encourager leurs expertises. Les gestionnaires en question créeront ainsi le climat favorable à la mobilisation des volontés. Ils leur feront prendre conscience de la part de responsabilité qu'elles auront à assumer. Les contributions qui s'exprimeront timidement devront être recherchées et mise à profit. Désormais, celles-ci seront sollicitées. Désormais, toutes les volontés seront associées aux différentes démarches à entreprendre, c'est-à-dire dans le choix des priorités d'actions à engager, dans l'identification des moyens à mettre en œuvre. Moralité, les gestionnaires de la mission éducative et ceux de l'acte pédagogique feront preuve d'une meilleure écoute et d'une plus grande ouverture d'esprit. Ils accueilleront les idées et accepteront les divergences. Ces exigences devront, à l'avenir, soulever toute la question de leur recrutement, de leur formation et de leur perfectionnement.

... C'est ensuite, valoriser leur responsabilité

Valoriser la responsabilité des gestionnaires, c'est veiller à ce que les ressources humaines mises en présence dans l'entreprise éducative, ne soient plus exploitées à coups de normes coercitives et démobilisatrices. C'est aussi, veiller à ce que leur expertise professionnelle soit réhabilitée afin qu'elle génère une plus-value dans la qualité des prestations éducatives à opposer aux obstacles qui s'interposeront entre l'élève et sa réussite.

Il faudra à cet effet :

- se soucier de l'affectation de ces personnels de manière à ce que chacun occupe sa vraie place et déploie, par conséquent, sa pleine mesure dans l'accomplissement de sa tâche ;

- s'attacher au développement de leurs compétences pour les rendre capables de s'adapter aux circonstances d'une part et d'autre part, pour leur permettre une plus grande mobilité professionnelle ;

- donner à chacun sa chance de pouvoir trouver dans son champ de compétences, une capacité d'agir qui s'harmonisera avec sa responsabilité.

- prendre acte des aspirations, des besoins et des contraintes qui parsèmeront inévitablement le cheminement de leurs carrières et les gérer à des fins utiles.

L'obligation de faire échec à l'échec scolaire ne devant pas se limiter à une organisation bureaucratique de leur mission éminemment pédagogique, il y a un important saut à faire. Reconsidérer de façon accrue les compétences et les qualifications du personnel scolaire, (toute hiérarchie confondue et plus particulièrement, celui qui « étoffe » les directions de l'Education de wilaya qui hélas distille la médiocrité et le crétinisme pour y baigner).

Neuvième action : le syndicalisme, force de propositions, ne devra pas faire dans cette cogestion politique et administrative du système éducatif qui ne lui ressemble guère.

Au lieu de faire dans la mission qui lui est dévolue, s'ériger en rampe de lancement de la croissance civilisationnelle nationale en agissant positivement sur la gestion de la mission éducation et sur celle de l'acte pédagogique par des propositions constructives par souci de contribuer à son amélioration, il s'est investi dans le leadership et s'est assigné pour rôle de fomenter des équilibres instables qu'il n'arrive pourtant pas à gérer.

Appelé dorénavant à s'investir dans une dynamique de progrès fondée sur la solidarité et la responsabilité partagée, il émargera au registre qui devra être le sien. Autrement dit, il ne fera plus dans cette cogestion politique et administrative du système éducatif qui ne lui ressemble guère.

N'occultant plus ce pourquoi il a été élu par ses pairs, il ne perturbera plus l'accomplissement de la prestation pédagogique et n'altérera plus de fait, l'aboutissement de la scolarisation dans son ensemble.

Dixième action : la mission, le rôle, les buts et les objectifs du système éducatif ne devront plus être hors orbite

Hors orbite dans son ensemble, le système éducatif et culturel algérien éprouve des difficultés à comprendre sa mission pour pouvoir l'accomplir, ne serait-ce qu'avec un minimum de chance de succès. Profondément carencée, sa vocation - (éduquer, instruire, former et qualifier en structurant et en actualisant le capital cognitif de tout un chacun pour enrichir son champ aperceptif, en enseignant les valeurs de la citoyenneté et en faisant prévaloir les normes universellement réputées nécessaires et utiles ? celles qu'édictent le Saint Coran et les Hadiths du Prophète Mohamed QLSDDSSL -), est automatiquement fortement déviée. Conséquence, grand nombre d'Algériennes et d'Algériens sont devenus une espèce mutante. Ils désolent. Ils ne se soucient de rien. Ils ont même l'air d'avoir l'air d'être ivres de suffisance. Ils se disent tout savoir. Ils sont même imbus de grandeur. Ils s'amarrent à l'oisiveté et même à la dérision.

Cela dit, nul ne disconvient que l'échec scolaire sévissant a, par petites touches, réussi à défigurer la société algérienne si bien que, faisant dans l'assistanat, elle traine inlassablement et à contre sens de ce qui fait la force et la grandeur des nations modernes.

Réhabiliter sa vocation, il est grand temps qu'il ne demeure plus cette sorte de magasin d'accessoires où enseignants et élèves viennent faire ce qu'ils veulent, y compris passer le temps. Cela suppose qu'il ne doive plus animer la négation de l'humain chez qui il n'a pu favoriser la réussite scolaire et chez qui il a, en contrepartie, éveillé la part obscure du moi. En conséquence, la dérive sociale à laquelle nous assistons aujourd'hui, hélas médusés, (clochardisation programmée des comportements et des réflexes, dissipation des repères civilisationnels ancestraux, renversement impénitent des valeurs, mépris affiché à l'endroit de la morale, du civisme et de la légalité, outrage à la dignité humaine), se veut être l'expression d'une loi.

L'initiation à la promotion de la culture universelle et particulièrement, à celle des valeurs civiques et morales qu'elle véhicule, étant par essence la fondamentalité de sa mission, il ne sera plus muselé par une politique éducative et culturelle déconnectée de l'intérêt national, (évoluer au rythme de l'international et gérer le tumulte de la modernité). Se voyant conférer cette prérogative, la formation de l'esprit culturellement armé et pouvant émarger au registre de la mondialisation ne sera plus prohibée. De ce fait, les dynamiques négatives qui, s'autofécondaient, feront désormais partie des arriérations du passé. Elles cesseront d'animer ces antagonismes et ces conflits qui, hier encore, débouchaient sur une perversion tous azimuts.

Mis enfin, en orbite, le système éducatif et culturel algérien accomplira sa mission. Nantis de compétences générales, de qualifications spécialisées, de conviction intime et d'engagement sincère, beaucoup d'entre ceux qui le piloteront, (toutes hiérarchies confondues), n'entretiendront plus cet artificialisme qui distillera l'enseignement à dispenser.

N'entretenant donc plus cet artificialisme, cette illusion du savoir qui relativise la potentialité de raisonner logiquement et de juger avec méthode, il ne livrera plus des générations entières aux injures d'un monde complexe auxquelles il ne leur sera pas aisé de résister. Moralité, la pensée capable de se défendre, elles, (les générations), seront en mesure de prendre part à la compétition telle que définie par le cursus honorum.

En tout état de cause et alors que l'évolution civilisa-tionnelle mondiale, (croissance culturelle, économique et sociale), progresse et intervient dans le processus du développement de l'humanité par souci de l'améliorer, les paradigmes éducatifs et culturels à mettre en œuvre par l'école algérienne, s'ils ne seront pas choisis et définis selon une démarche cohérente avec les préoccupations de la société algérienne et en conformité avec celles de la société humaine dans sa globalité, leurs orientations et leurs contenus seront tronqués et leur finalité, (éduquer, instruire, former et qualifier), dénaturée.

En conséquence, la gestion de la mission éducative et celle de l'acte pédagogique, faute d'un contrat éducatif et culturel sérieux, seront abandonnées sur la pente d'une politique éducative et culturelle expression d'un décalage notable entre le projet éducatif et culturel et la réalité sociale qui aspire pourtant à évoluer et qui s'est aggravé pour déboucher sur une véritable crise d'adaptation de l'école algérienne aux préoccupations sociales.

Onzième action: la démocratisation de l'enseignement devra être bien pensée, bien réfléchie et surtout, très bien gérée

La formation est en train de subir les méfaits de sa massification, (sa démocratisation). Si la couverture des besoins en matière de places pédagogiques a été, quelque peu, assurée, (parce que avec un très fort taux d'occupation des locaux), les fonctions d'encadrement et de gestion de l'acte pédagogique, d'évaluation des acquis et des plans de formation, de prospective, d'élaboration et de conceptions de stratégies-tactiques pouvant être innovantes, sont tout simplement négligées.

A suivre...

*Directeur départemental de l'Education - Ancien Professeur INRE. Auteur. Dernier ouvrage paru aux Editions El Maârifa : «Comment mettre en état un Etat qui était dans tous ses états»