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L’or en repli avant les cimes

par Akram Belkaïd, Paris

Dans cette chronique, nous avons souvent défini ce qu’étaient les valeurs refuges en temps de crise et l’or, comme d’autres métaux précieux, est souvent cité au gré des fluctuations de ses cours. Le mois dernier, les prix du métal jaune ont ainsi suivi une courbe conforme à la situation née des inquiétudes liées au coronavirus. Un pic a été atteint le 24 février et l’on pensait que l’once était en route vers les 1.700 dollars. On est une valeur refuge ou bien on ne l’est pas.

Correction inattendue

Pourtant, dans les jours qui ont suivi, les cours se sont brutalement affaissés pour se stabiliser autour de 1.500 dollars l’once. La chose est suffisamment étonnante pour être analysée. En effet, cette baisse est intervenue alors que, dans le même temps, le dollar américain perdait de sa valeur tandis que les taux d’intérêts se repliaient. Normalement, il s’agit de deux facteurs favorables à l’appréciation du métal précieux. De fait, il est très rare que l’or et le dollar baissent de concert. Alors, que s’est-il passé ?

La réponse est à deux éléments. Le premier est lié au comportement des marchés d’actions. On le sait, ces derniers ont enregistré une baisse importante en raison des risques que le coronavirus fait peser sur l’économie mondiale. En subissant des pertes importantes, nombre d’investisseurs ont été obligés de chercher des compensations ailleurs en se défaisant de leurs avoirs en métaux précieux. Dans certains cas, cette décision de vendre a été motivée par les exigences des chambres de compensation qui exigent des opérateurs qu’une partie de leurs positions soit couverte par des dépôts (appel de marge). Bref, dans ce cas précis, l’or a servi à compenser les pertes sur les marchés d’actions. Et comme les ventes ont été importantes, le mécanisme habituel de l’offre et de la demande a joué avec une baisse des prix du métal jaune. L’autre explication est liée à une simple affaire de calendrier. De nombreuses options d’achat ou de vente de contrats sur l’or sont arrivées à échéance et plusieurs investisseurs y ont vu l’occasion de faire une bonne affaire. Les vendeurs, parce qu’ils ont anticipé une baisse plus affirmée des cours (avant une remontée comme on le verra ci-dessous). En clair, on vend à 1.550 en se disant que cela va descendre à 1.500, moment où l’on rachètera en anticipant une nouvelle hausse.

Une once à 2.000 dollars ?

Car, effectivement, personne ne pense que l’or va poursuivre sa baisse. Ce qui s’est passé fin février n’est qu’une correction technique, un moment d’ajustement qui précède une nouvelle hausse. Selon Goldman Sachs, l’once pourrait atteindre 1.800 dollars à moyen terme. D’autres analystes avancent même l’objectif de 2.000 dollars à l’horizon 2022, c’est dire si celles et ceux qui cherchent à se prémunir des effets de la pandémie garderont un œil attentif à l’évolution du métal noble. Et cela est d’autant plus vrai que tout porte à croire que la Réserve fédérale américaine (FED) risque de baisser ses taux dans les semaines qui viennent (elle a jusqu’à la fin juin car, après, elle sera dans une position de neutralité en raison de l’élection présidentielle de novembre prochain). Et qui dit baisse des taux, dit hausse de l’or. Du moins, en temps habituels…