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Le statu quo risque de durer encore: Après l'Aïd, la crise reprend ses droits

par Ghania Oukazi

A près d'une vingtaine de jours de la rentrée sociale, le général de corps d'armée a tenu encore une fois à rappeler les points essentiels de la feuille de route qu'il considère comme initiative invariable pour résoudre

la crise politique du pays.

Le chef d'état-major, vice-ministre de la Défense l'a fait jeudi dernier, lors de sa visite à la 1re Région militaire dans la wilaya de Blida. Ahmed Gaïd Salah a rappelé son « attachement au cadre constitutionnel », au «dialogue national inclusif» et à «des élections dans les plus brefs délais». Pourvu, a-t-il dit, que « ce dialogue soit mené dans un climat empreint de bonne intention, de sincérité et d'honnêteté, conduit par des personnalités nationales sincères, crédibles et compétentes, qui croient réellement en le dialogue et œuvrent à le faire réussir, n'attendant aucune récompense ou remerciement, mettant en avant l'intérêt suprême de la patrie et se démarquant des préalables qui entravent le processus de dialogue». C'est exactement ce que les membres du panel se disent d'eux-mêmes. Ils ont donc toute la bénédiction du général de corps d'armée pour mener «un dialogue constructif à même d'offrir les solutions appropriées et de créer les conditions idoines pour se diriger vers les présidentielles et les organiser le plutôt possible. Des présidentielles qui passent impérativement par l'installation diligente de l'instance nationale indépendante pour la préparation, l'organisation et la surveillance des élections présidentielles comme extrême priorité dans le processus du dialogue national ». C'est la feuille de route qu'ils ont déroulée lors de la conférence de presse qu'ils ont animée jeudi dernier au siège du réseau associatif Nada.

Aucun doute n'est permis sur sa conformité avec celle du général de corps d'armée et ce, dans le moindre de ses détails. Le panel a donc carte blanche du général de corps d'armée pour s'acquitter de sa mission dans ce sens et abréger ainsi une crise politique qui s'étale dans le temps. Gaïd Salah pense que le pays n'a plus temps à perdre. Son insistance sur «dans les plus brefs délais» le laisse clairement apparaître.

Les partis politiques dans l'expectative ?

Ce qui n'est pas le cas du panel qui, selon son coordonateur, aucun délai n'a été fixé pour la médiation et le dialogue dont il a la charge. Il n'a pas encore en main un listing de tous ceux qu'il doit rencontrer et avec qui il doit dialoguer. « On n'est pas des fonctionnaires, on ne joue pas au ballon, il faut donner le temps au temps », nous a répondu Karim Younes jeudi dernier. Sa première rencontre, le panel l'a eue le mardi dernier et l'a réservée à des «représentants» du « hirak» venus, selon ses membres, «de plus de dix wilayas». Le président du comité politique du panel a affirmé qu'ils sont venus à 29 et qu'ils étaient tous contre une période de transition et une assemblée constituante. Il est vrai que le nombre n'est représentatif de rien dans ce pays continent. Les plus sceptiques se sont d'ailleurs interrogés sur les critères qui ont prévalu pour le choix de ces 29 représentants. L'on ne s'attend pas à grand-chose durant les jours à venir tant que la chaleur caniculaire sévit dans toutes les régions et que les vacances ne sont pas terminées. Le général de corps d'armée et aussi le panel doivent le savoir et surtout le sentir puisque ceux qui acceptent l'idée du dialogue se comptent pour l'heure sur les doigts d'une seule main et ne sont pas de gros faiseurs d'opinion.

Belhimer a juste promis que des rencontres auront lieu avec des syndicats, des personnalités, des organisations estudiantines «juste après la fête de l'Aïd». Jusqu'à hier, les états-majors des partis connus, toutes tendances confondues, ne figurent pas encore sur son planning. Des tergiversations, il y en a eu. Mais ces derniers temps, la parole s'est faite rare mis à part les redondances ici et là en matière d'initiatives de sortie de crise. En attendant la rentrée sociale, l'expectative est peut-être cette nouvelle formule que les personnalités nationales et les formations politiques connues préfèrent adopter en attendant de voir ce que le panel va recevoir et combien de temps tiendra-t-il face à un «hirak» qui s'agrippe à des préalables que Gaïd Salah rejette en bloc. Il l'a fait encore une fois à partir de Blida.

En attendant la rentrée sociale

« (...), nous insistons à chaque fois sur la nécessité de rester attachés au cadre constitutionnel pour résoudre les problématiques de la phase actuelle, considérant que c'est la garantie fondamentale, voire l'unique garantie pour préserver l'Etat et ses institutions ainsi que pour éviter de tomber dans l'écueil du vide constitutionnel et de glisser dans des conséquences désastreuses». Le général de corps d'armée a encore une fois soutenu dans ce sens que «notre pays est la proie des avides et des aventuriers qui tentent vainement d'entraver son parcours de développement. Nous, en tant que Haut Commandement, avons en notre possession des informations confirmées sur ces plans hostiles, lesquels nous avons mis en garde auparavant contre leurs dangers et menaces, qui mettent à profit la situation actuelle que traverse notre pays pour tenter d'imposer leurs agendas et impacter sur le cours des événements ». Ceci pour répondre à ceux qui exigent « le départ immédiat des deux B (Bensalah et Bedoui) ».

Aux adeptes du préalable de « la libération immédiate des détenus d'opinion », Gaïd Salah pense qu'il n'a aucun bien-fondé juridique puisque « après avoir pris connaissance des dossiers des individus arrêtés, certains professeurs en droit ont confirmé que ce ne sont pas des prisonniers d'opinion, comme le clament certaines parties qui tentent d'exploiter ce dossier et que seule la justice est habilitée pour trancher sur ce sujet ». Les membres du panel ont été unanimes à soutenir cette observation. Ils ont en effet déclaré jeudi dernier dans leur conférence de presse que « nous n'avons pas à nous ingérer dans le travail de la justice ». L'intermède de l'Aïd El Adha passé, la crise reprend ses droits dans un silence qui pèse lourd.