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Gagner du temps

par Mahdi Boukhalfa

Les cogitations «intellos, profondément syndicales et droits de l'hommistes» vont bon train par les temps qui courent. Il s'agit pour un certain nombre de partis d'opposition, de personnalités politiques et de la société civile, ou des milieux syndicaux, de plancher sur des solutions de sortie au mouvement populaire actuel appelant à la fin du régime et le départ de Bouteflika. Les feuilles de route pour préparer l'après-régime Bouteflika sont proposées le plus sérieusement du monde, ici et là, avec des similitudes dans la formation d'un gouvernement de transition ou de l'autorité qui doit prendre la relève du président à la fin de son mandat.

Dans l'ombre des manifestations populaires qui revendiquent autant le départ du président Bouteflika à la fin de son mandat comme celui du système politique actuel, des associations et des collectifs de la société civile sont en train de naître et de se poser comme nouveaux tuteurs du peuple, comme ses représentants «légitimes» pour proposer d'organiser la vie des Algériens après le 28 avril. En parallèle à cette agitation désordonnée et pour le moment sans aucune légitimité populaire, puisque à l'exception de ces collectifs, si l'on écarte ceux composés de partis politiques, il y a les efforts d'un Premier ministre nommé dans la foulée des revendications populaires pour former un gouvernement censé être de «larges compétences». Le problème est que le Premier ministre nommé par un président sortant, dont le mandat expire dans presque un mois, n'a aucune légitimité selon les acteurs de la société civile qui refusent dès lors de participer à des consultations que mène M. Bedoui.

Le risque dans ce «chassé-croisé» de propositions et autres feuilles de route pour organiser un improbable après-Bouteflika est que tout le monde, pouvoir comme opposition et société civile, va se retrouver avec «des plans tirés sur la comète» pour une sortie pacifique de la crise de gouvernance actuelle. On répète en même temps les erreurs du règne de Bouteflika : aucune communication, ni concertation entre les différents acteurs politiques et représentants de la société civile, au moment où la protestation populaire contre la poursuite du 4ème mandat devrait être mieux écoutée, décodée. Et elle est claire cette revendication citoyenne : un changement pacifique et civilisé du personnel politique, une Algérie de tous les Algériens et un gouvernement de transition légitime. Le reste viendra après, mais, pour le moment, l'urgence est de trouver une sortie de crise consensuelle, la moins longue possible et la plus représentative des compétences nationales, pour que les institutions du pays ne s'arrêtent pas et continuent de fonctionner jusqu'à l'installation des nouveaux dirigeants, du nouveau gouvernement, un parlement et un président élus démocratiquement.

C'est, à travers cette conférence nationale inclusive proposée aux Algériens pour légitimer le prolongement du 4ème mandat, le vœu du président Bouteflika. Sauf que ce souhait aurait dû être réalisé bien avant, entre 2009 et 2014, en laissant la porte ouverte à l'alternance au pouvoir. Avec deux objectifs : partir la «tête haute», dans la dignité et en pleine santé et éviter aux Algériens de perdre un précieux temps à se chercher de nouvelles institutions.