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Droits de l'homme: Les bons et les mauvais points du rapport US sur l'Algérie

par Z. Mehdaoui

  Le rapport américain sur les droits de l'homme à travers le monde a été rendu public mercredi dernier par le département d'Etat.

Le chapitre consacré à l'Algérie est plutôt mi-figue mi-raisin.       

Le rapport commandé annuellement par le Congrès américain pour s'imprégner de l'état des droits humains à travers la planète décerne de bons points pour l'Algérie mais épingle néanmoins notre pays sur de nombreux volets, notamment la liberté de la presse, la liberté de manifester ou encore la liberté du culte. Le cas du journaliste Said Chitour arrêté en juin 2017 et qui a été accusé de partager des renseignements avec une puissance étrangère, a été soulevé dans le rapport qui reproche une détention sans jugement pendant de nombreuses années.

Liberté de la presse et des médias

Dans le rapport il est clairement mentionné que l'Agence nationale de l'édition et de la publicité (ANEP) contrôle la publicité publique pour les médias imprimés. Se basant sur un rapport de l'ONG Reporters sans frontières, le rapport indique que la publicité est souvent contrôlée par des entreprises ayant des liens étroits avec le parti politique au pouvoir.

«Bien que l'ANEP ait déclaré en septembre qu'elle ne représentait que 19% du marché publicitaire total, des sources non gouvernementales ont estimé que la majorité des quotidiens dépendaient de la publicité autorisée par l'ANEP pour financer leurs opérations.      L'ANEP a déclaré qu'elle cherchait à préserver une presse pluraliste et une liberté d'information et a indiqué qu'elle finançait des journaux d'opposition. Le manque de transparence du gouvernement quant à l'utilisation de publicités financées par l'État lui permettait toutefois d'exercer une influence indue sur la presse écrite », est-il écrit dans le rapport traduit en français par des traducteurs basés à Dubai dans les Emirats arabes unis. Pour ce qui est des libertés de réunion et d'association pacifiques et que bien que la Constitution prévoie la liberté de réunion et d'association pacifiques, le gouvernement a sévèrement restreint l'exercice de ces droits, souligne le rapport.

Liberté d'association

La Constitution prévoit le droit d'association, mais le gouvernement a limité ce droit, soutient le document qui note que les nombreuses exigences de la loi et son application inégale ont constitué des obstacles majeurs au développement de la société civile. « La loi confère au gouvernement une surveillance et une influence étendues sur les activités quotidiennes des organisations de la société civile.

Il oblige les organisations civiles nationales à faire une demande d'autorisation au ministère de l'Intérieur. Une fois inscrites, les organisations doivent informer le gouvernement de leurs activités, de leurs sources de financement et de leur personnel, y compris en ce qui concerne les changements de personnel. La loi impose en outre aux associations une autorisation préalable du gouvernement avant d'accepter des fonds étrangers. Si des organisations omettent de fournir les informations requises au gouvernement ou tentent de fonctionner avec des fonds étrangers ou d'accepter des fonds étrangers sans autorisation, elles s'exposent à des amendes ».

La rapport cite, par ailleurs, le cas du ministère de l'Intérieur qui n'a pas renouvelé les accréditations des ONG SOS Disparus, Djazairouna, LADDH, l'Association nationale de lutte contre la corruption et du Mouvement d'action de la jeunesse, qui avaient toutes soumis leur demande de renouvellement les années précédentes.

Protection des réfugiés

Pour ce qui est des réfugiés, subsahariens notamment, le document s'est félicité des actions entreprises par le gouvernement algérien pour la protection de ces milliers de personnes qui ont fui leur pays à cause des persécutions ou de la famine.

« Selon le rapport de mars du HCR sur les réfugiés sahraouis à Tindouf, le gouvernement a protégé un nombre important de réfugiés dans cinq camps à Tindouf et une population réfugiée urbaine plus réduite, principalement à Alger. Le rapport note que la population de réfugiés comprend des Syriens (environ 85%), des Yéménites, des Congolais, des Ivoiriens, des Palestiniens, des Maliens, des Centrafricains et d'autres nationalités. Le HCR, le Programme alimentaire mondial (PAM), l'UNICEF, le Croissant-Rouge algérien, le Croissant-Rouge sahraoui et d'autres organisations ont aidé les réfugiés sahraouis.

Le gouvernement a déclaré qu'une diminution de l'aide des donateurs internationaux avait entraîné une détérioration des conditions de vie des réfugiés sahraouis, ce qui avait entraîné une augmentation de ses propres contributions » lit-on dans le document qui ajoute que le gouvernement algérien a fourni une certaine protection contre l'expulsion ou le retour des réfugiés dans des pays où leur vie ou leur liberté serait menacée en raison de leur race, leur religion, leur nationalité, leur appartenance à un groupe social particulier ou l'opinion politique.

« Depuis l'éclatement de la violence dans le nord du Mali en 2012, des observateurs internationaux ont signalé un afflux d'individus en Algérie à travers la frontière malienne, incompatible avec les mouvements migratoires traditionnels», soutient le rapport qui ajoute que selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), le gouvernement a rapatrié 35 113 Nigériens (dont 16 478 femmes et enfants) de décembre à août, conformément à un accord bilatéral conclu à la demande du gouvernement nigérien.

Corruption: les lois ne sont pas appliquées

«La loi prévoit des sanctions pénales de 2 à 10 ans de prison pour corruption officielle, mais le gouvernement n'a pas pleinement appliqué la loi. La corruption est restée un problème et les responsables se sont parfois livrés à des pratiques de corruption en toute impunité», relève le rapport qui rappelle que le code pénal stipule que seul le conseil d'administration de l'institution concernée peut engager des poursuites pour vol, détournement de fonds ou perte de fonds publics et privés à l'encontre de gestionnaires économiques du secteur public de haut niveau. Le rapport soutient que selon diverses sources, en permettant aux seuls hauts responsables d'entreprises publiques d'être habilités à ouvrir des enquêtes, la loi protège la corruption au sein du gouvernement et encourage l'impunité. «Selon les reportages des médias et l'opinion publique, l'absence d'accusations à l'encontre des plus hauts responsables du gouvernement était un signe d'impunité pour les représentants du gouvernement », est-il souligné dans le rapport qui ajoute que la corruption au sein du gouvernement provenait en grande partie d'un manque de surveillance transparente. «L'Association nationale de lutte contre la corruption a souligné l'existence d'une loi efficace contre la corruption », tout en affirmant que le gouvernement n'avait pas la «volonté politique d'appliquer la loi », est-il noté plus loin dans le document. Enfin le rapport volumineux a également évoqué le droit syndical. Même s'il se félicite de la multitude des syndicats existant en Algérie, il soulève toutefois les blocages de l'administration dont sont victimes des syndicats autonomes. «l'UGTA reste néanmoins le seul syndicat autorisé à négocier des accords », est-il indiqué dans le document.