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Lève la tête, ya Ba

par Djamel Azizi*

Monsieur le Président Bouteflika

Si vous tenez à votre candidature pour un cinquième mandat, vous trahirez la majorité des enfants de ce peuple qui vous a tant donné, la gloire, l'amour, la reconnaissance et l'estime et a fait de vous son président durant vingt ans. Vous serez gravé dans la mémoire de ses enfants et ses petits-enfants.

Vous avez laissé des empreintes dans son passé et vous êtes en train d'écrire son présent. Vous êtes le leader de l'histoire contemporaine de notre pays. Il est temps de laisser l'avenir pour un autre Algérien. Depuis 1964, vous êtes omniprésent dans notre esprit.

Présider un peuple durant deux décennies, dans ce monde moderne, c'est déjà une réussite.        Aujourd'hui, nous pensons que ça suffit, le bon sens l'emporte. Et vu votre état de santé, l'avenir de la Nation serait obscur; de préférence et de plus sage il devrait se faire avec un autre Algérien. Mes grands parents et mes parents sont partis avec une belle image de vous. Ne la gâchez pas auprès de notre génération et celle de nos enfants. Partez, Monsieur le Président. Nous levons la tête pour dire: Non à votre candidature et jamais un cinquième mandat. Permettez- moi de mettre le point où fera mal, vous n'êtes pas et vous ne serez jamais notre prophète comme prétendent certains de vos disciples.

L'Algérie, le drapeau, le sang de nos Chouhada vous demandent de ne pas se présenter à un futur mandat. Vous êtes malade et souffrant et à travers cet abattement, de plus en plus les institutions et les hommes s'affaiblissent, manquent à leur devoir et de surcroît votre entourage en profitera et spéculera d'avantage.

Il faut savoir quitter la table, Monsieur le Président. Vous connaissez la diplomatie d'être autour d'une table et quand faut-il se lever pour tourner le dos. Dans ce monde actuel, les enfants de ce pays comme ceux des autres pays exigent de céder votre place au même tire que les Bush, les Clinton, les Obama, les Sarkozy, les Lula, les Hollande, les Mandela, les Mbeki et bientôt les Macron, les Trump et les Sissi. Lorsque vous étiez la seule personnalité arabe, africaine, tiers mondiste, connue mondialement grâce à l'Algérie et sa lutte. Votre cas est enseigné dans les grandes universités au monde. Votre engagement était une plate-forme des mouvements de libération en Afrique et dans le reste du monde. Beaucoup d'Occidentaux intellectuels, politiques, idéologues étaient dans l'étonnement et à l'écoute attentive de vos discours.

C'est la vie. La terre tourne.

Aujourd'hui, maintenant sur ce sol des Martyrs, c'est le début de l'ère de mon enfant, je ne veux pas qu'on lui dit: vous êtes gouverné par une monarchie totalitaire, une Nomenklature mafieuse et par un pouvoir assassin. Pour ma génération, par la force de destin de mon pays, j'ai admis mais je refuse que mon petit grandisse sous ce régime. Lui et moi ne sommes pas contre vous en tant qu'Algérien, nous nous opposons à ce pouvoir et à ses serviteurs depuis vingt ans. C'est de notre devoir et de notre droit de lever la tête. En 1999, je me suis levé pour que vous soyez notre Président. Aujourd'hui, mon enfant sur les épaules, je suis dans les rues, dans les mosquée, dans les bistros, dans les usines pour m'exprimer et dire non à votre candidature. C'est mon fils qui me donne de l'énergie et du courage. Partez Monsieur le Président. Il suffit de voir le classement mondial de notre Université, de notre Ecole, de notre Equipe de foot, de nos produits rejetés même par les libyens, le mauvais état de nos infrastructures, le compte bancaire de certains de nos dirigeants, de nos hauts responsables successifs et de leurs proches, les biens acquis pour leurs familles, à l'étranger et dans le pays avec l'argent du peuple. Voir l'état de nos sociétés comme Sonatrach, Air Algérie et la TV nationale... A cause des usurpateurs, ces sociétés publiques sont devenues des propriétés privées et des bureaux d'affaires.

Durant vos années de gouvernance, j'ai assumé des critiques amères lors de mes multiples voyages, à travers le monde, avec un passeport vert, concernant le corruption, le passe-droit, le piston, le vol, l'injustice, l'enrichissement illicite en Algérie.

Lors d'une conférence, à Paris, récemment, j'ai pris position pour les peuples palestinien et sahraoui, devant des intellectuels israéliens, j'ai eu comme réponse: «Monsieur, changez votre pouvoir avant de défendre des causes». A partir de ce moment, je ne veux pas que mon enfant entende ça et vive cette humiliation, c'est la vie. La terre tourne.

Les enfants de ce peuple sont d'accord pour qu'un autre Algérien devienne leur président et pourquoi pas? Aujourd'hui qui a dit que nous n'avons pas un homme ou une femme qui pourrait nous gouverner? Pourquoi nos femmes ont-elles donné naissance à des poules au lieu des hommes?

Le comble, vos suiveurs scandent et osent dire: impossible. Afin de passer la pilule, ils surfent sur la peur, le retour du terrorisme et la décennie noire. Sans eux c'est le déluge! Tous nos précédents dirigeants sont partis et le pays continue à écrire son propre histoire. C'est une page qui se tourne. Et elle se tournera dans la paix grâce à la volonté et le lève-tête des enfants du pays.

Dans nos rues, nos lycées, nos universités, nos crèches, dans les ventres de nos femmes, dans nos foyers, nos casernes, nos campagnes, notre Sahara, en haut de nos montagnes, dans nos bureaux et sous nos couettes, dans les rues de New York, Montréal, Paris, Alger et Khartoum, nous vous demandons de ne pas se présenter.

Nous voulons un autre Algérien comme président de la République. Si vous n'avez pas changé et modifié la Constitution d'une manière arbitraire, sans consultation des vivants, elle vous interdira d'être au poste. Vous avez changé le règlement mais pas le peuple. Malgré cet erreur historique, la communauté vous pardonnera mais pas aux gens qui vous imposent, aujourd'hui. S'ils ne seront pas et sans doute, présents dans la rue pour tourner la veste, ils seront les premiers à allumer la mèche et à ajouter l'huile sur le feu pour que ce peuple plongera dans la violence et l'enfer. Eux, ils ont déjà assuré l'avenir de leurs enfants et ils n'auront plus besoin de ce pays mais moi, moi, monsieur le Président, je cotise encore pour ma retraite et je fais grandir mon garçon sur les principes de ses grands parents chaouis. Ne donnez pas l'occasion à des pasticheurs jouer avec l'avenir de l'Algérie, Partez, cédez votre place. Nous serons heureux de vous voir lire un livre, aller au cinéma, regarder la mer ou visiter un musée. Prenez le temps qui vous reste loin du pouvoir.

Nous ne méritons pas le mépris, le manque du respect des larbins. Comme intellectuel, je n'oublierai pas ces phrases grossières: «Maudis aux gens qui ne nous aiment pas... » « Il faut se contenter de manger du yaourt... » « Le peuple algérien ne sait pas manifester pacifiquement ».. « Il faut voter oui pour prétendre à un logement ».. « il faut que le peuple lève son niveau pour arriver à celui de président », et dernièrement la sortie de patron par hold-up, de l'Assemblé nationale et du FLN, par procuration. Celui-ci, comment a-t-il été fabriqué et dans quel moule?.         En votre nom, il insulte le peuple comme il respire, alors qu'il est aux pieds et non à la tête du parti dont mes parents étaient des adhérents de la première heure. Cet individu ose nous injurier. Dommage pour notre vieux Parti et notre chère Patrie !!.

Ce monsieur, s'il était sous d'autres cieux et à une autre époque, il sera déjà condamné par la justice. Si mon père était encore vivant en écoutant ses simulacres et ses impostures soit il prendra son fils et va lui demander des compte soit qu'il aura le même AVC que vous, Monsieur le Président sortant. S'il n'y avait pas de rêve, il n'y aurait jamais eu un pays qui s'appellerait « Union des États- Unis d'Amérique » (USA). C'est grâce au rêve qu'il est devenu la première puissance mondiale.

Monsieur le Président, vous méritez mieux en homme, en langage, en discours et en propos mais hélas, voilà, les conséquences de deux décennies d'un seul pouvoir : les insultes, les injures et les mensonges.

Certainement, l'Algérien que nous choisirons comme président de la République n'aura pas ni votre envergure ni votre diplomatie ni votre passé historique mais il sera un autre comme est Macron pour les Français, Sanchez pour les Espagnols et Giuseppe Conte pour les Italiens. Et pour les Sud africains, Cyril Ramaphosa.

Notre futur dirigeant demeure un Algérien fidèle et à l'écoute des attentes de son peuple. Une autre expérience, un bâtisseur comme vous l'étiez à l'époque pour gérer les affaires du pays. Devant l'exigence populaire, notre pays a besoin d'un président autre qui aura une vision plus pragmatique, un autre regard clairvoyant et d'autres hommes à son service. Je reste convaincu qu'au fond de vous-même, vous êtes d'accord et pourtant, vous l'avez déclaré « tabe jnana »

C'est la vie, la terre tourne.

Nous n'avons pas un autre pays comme une pièce de rechange pour agiter la patrie. Par contre, nous n'avons pas aimé que vous soignez à l'étranger depuis une décennie alors que des millions d'Algériens sont entre les bonnes mains de nos professeurs algériens.. Mon enfant appréciera certainement vos grands projets, autoroute Est-Ouest. Un million de logements, la conduite d'eau jusqu'à Tamanarasset, et une armée forte pour protéger nos frontières. L'Algérie glorifia vos efforts. Pour ma génération, vous avez accompli votre devoir envers la Nation et si elle est forte, c'est grâce à la lutte et au travail de tous nos patriotes, comme étaient mon père et mon grand père, dans les montagnes des Aurès et d' Eldjorf et beaucoup de nos compatriotes dans toute l'Algérie pour combattre et hisser haut notre drapeau. Aujourd'hui, des opportunistes, des non-voyants avec des yeux grands ouverts, en plein soleil, refusent la lumière.

Ils se cachent derrière votre personne pour gangrener le pays et demeurer au pouvoir et de surcroît ils manipulent les militants, promettent des merveilles et la main de Fatma, opposent les jeunes entre eux, aveuglent les tendances au bon sens, comprendre l'opposition, pour un cinquième mandat.

L'Algérie m'a donné bac + 8 et votre passage comme président a fait de moi, un Algérien qui réfléchit, compare, anticipe, décide et dialogue. C'est un acquis.

Mon fils a déjà un Iphone, grâce aux-nouvelles technologies, il est ouvert sur le monde. Il est déjà à l'extérieur, sans traverser la mer. Par mon refus pour votre candidature, je n'accepterai qu'il soit ni victime d'une nomenklatura méprisante et avare ni qu'il meure dans la mer.

Nous sommes en 2019 et je ne comprends pas les raisons de MM Si Said, Sellal, Hadad, Salah, Benyounes, Ghoul et compagnie et leurs adjacents veulent vous imposer au peuple! Malgré tout, je respecte vos frères, ils ont raison sur le plan familial de vous soutenir et vous tenir en vie, mais pas sur notre dos. Nous ne comprendrons pas l'imposition d'un cinquième mandat ! Je ne veux pas que mon fils grandisse à avec cette image. La vôtre Monsieur le Président. Étant père, je ferai tout mon possible pour s'opposer à votre candidature afin que l'intérêt et l'avenir de mon enfant soient préservés et assurés.

C'est la vie, la terre tourne.

Nous n'avons rien à acheter ou à vendre pour vous dire non car nous avons dit : oui pour les précédents mandats sans tirer aucun profit. Grâce à notre formation et à notre travail, nous sommes comme toute famille algérienne qui se lève tôt pour gagner sa croûte. Notre savoir-faire et nos compétences, nous ont alignés sur nos concurrents, sur le plan international.

Mon fils sera fier de son père si je disais non et il sera encore fier de vous si vous partez maintenant.

Ma région ?Chaouia' était la première à voter, en majorité, pour vos quatre mandats. Aujourd'hui, elle est la première pour vous demander de partir avec amour, considération et honneur. Cette région de notre pays n'a pas fait « marche arrière » et a toujours été avec vous, depuis la guerre d'Algérie.

Elle vous a sauvé la vie lors d'une visite présidentielle, mais dès lors qu'elle ne sent pas, n'accepte pas et n'adhère pas à ce mandat, laissez tomber monsieur le Président. En son nom, vous serez le Président à vie de tous les Algériens, vous serez dans le cœur, dans l'esprit de ses enfants y compris le mien, si vous vous ne présentez pas pour la cinquième fois. Restez notre doyen par excellence, notre symbole et passez le flambeau à un autre Algérien.

Dans ma région, nous vous avons toujours accueilli par la porte, sortez par celle-ci, ne faites pas comme les Bachar, les Ben Ali, les Khadafis, les Salah et les Moubark, faites comme les Obamas, les Mandela, les Tony Blair et beaucoup d'autres. C'est seulement dans ce cas, que mon fils lèvera encore et encore sa tête avec dignité. Et à chaque occasion, il ne cédera pas ni sur un mètre carré de cette terre ni sur ses idées ni sur ses engagements devant quiconque. Malgré vos vingt ans de règne et depuis ma naissance, je vous ai, toujours, eu comme vis-à-vis. Grâce à ce peuple, vous avez un passé politique inéluctable, un présent riche. Aujourd'hui, vous n'avez rien à prouver. Pour mon enfant et je ne parle pas du reste de monde, vous êtes dans l'incapacité, vous êtes malade, vous ne parlez pas, vous ne marchez pas, vous n'écrivez pas et vous ne déplacez pas, vous ne tapez plus sur la table, vous ne faites pas des visites ni dans les chantiers ni dans l'Algérie profonde. Vous ne recevrez pas les hauts responsables de ce monde, à leur premier pas, sur le sol algérien. Vous êtes absent dans les grandes rencontres internationales, vous ne souriez pas comme les autres présidents. Et cela depuis des années. Mes grands parents comprenaient, mes parents avaient pitié, moi, je contemplais. Par contre mon enfant, il est pour rien.

Il ne supporte pas davantage cette image de son président. Devant cette triste réalité et pas non plus valorisante pour l'Algérie, son peuple et son avenir. Mon fils a levé la tète et se met debout pour dire dans le calme : Papa, non au cinquième mandat...il est temps....

Vive l'Algérie.

*Cinéaste