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Le Complexe olympique de Belgaïd aborde sa dernière ligne droite: Le poids des «aberrations» du passé et des «fausses» réserves

par Houari Saaïdia

  Si on en est arrivé à ce contre-la-montre pour mener à bout le complexe de Belgaïd, c'est parce qu'il y a eu un manque de sérieux au départ et en milieu de course. A la mi-2017, deux ans après l'annonce de Pecrara et dix ans après le début du chantier, la situation en était à cette image près : une ossature métallique inachevée et un village olympique figé dans son corps primitif d'une cité U désaffectée et perdue au milieu de nulle part.

«Chez nous, en Chine, pour mettre en place l'équivalent de votre complexe sportif d'Oran, on aurait mis deux ans et demi, ou trois tout au plus», avait dit au wali Mouloud Cherifi, lors d'une entrevue, le PDG de l'entreprise chinoise MCI. Une façon de se laver les mains du gros retard accusé dans ce petit vieux projet et de mettre la responsabilité sur le dos de son contractant algérien. On peut bien sûr objecter au patron de «Metallurgical China Construction» tout un ensemble d'arguments à charge, dont, carnets de chantier preuves à l'appui, un sous-effectif du personnel (avec à la clé une valse de la main d'œuvre entre les différents chantiers), un manque d'assiduité et de respect des horaires de travail, un déficit en moyens matériels par rapport aux engagements du contrat, accru par le non-respect des dates d'arrivage de certains équipements fabriqués en Chine, un relâchement caractérisé dans le rythme des travaux dès qu'il y a le moindre petit retard dans le règlement d'une situation financière, une tendance à réclamer des avenants... Mais cela n'enlèverait rien pour autant à la véracité du propos du PDG de la compagnie chinoise lorsqu'il parle d'un délai maximal de 3 ans pour la réalisation, en son pays, de l'équivalent du complexe olympique d'Oran.

EN CHINE, MCC AURAIT FINI CE COMPLEXE EN 2 ANS ET DEMI

En fait, les Chinois ne font à vrai dire que s'adapter au milieu dans lequel ils interviennent, en réglant leurs paramètres intrinsèques et extrinsèques en fonction de qu'ils ont en face. Quand le système en face est tendre, son niveau d'exigence est bas, alors ils en profitent. Le meilleur exemple en est cette autorisation qui leur avait été faite par l'administration locale, lors de l'ODS de lancement des travaux en 2007, d'implanter leur base de vie sur l'emprise même du stade de 40.000 places. Une «aberration», pour reprendre le vocable du chef de l'exécutif local Mouloud Cherifi, qui a mis à mal le chantier lui-même, sans compter ses effets collatéraux en termes de désagréments sur l'environnement, dont la rectification par délocalisation sur instruction du même wali a nécessité plusieurs semaines et, inévitablement, une perturbation de l'organisation du chantier. La même absurdité allait se commettre à hauteur du chantier du village olympique n'était-ce la vigilance du wali qui est intervenu promptement pour empêcher cette vilaine récidive.

Cette même fermeté, intransigeance, qui l'a poussé à mettre en garde, samedi 16 février lors de sa énième visite de supervision et d'inspection sur site, les intervenants dans ce chantier, l'entreprise de réalisation et le bureau de contrôle et de suivi au même titre que le maître d'ouvrage délégué DLE (direction des équipements publics) contre «tout éventuel changement sur le terrain par rapport à l'étude».

PLUS AUCUN CHANGEMENT AU-DELA DES LIMITES D'ENVELOPPE ET DE DELAI

Il a tenu à préciser, en ce sens, que «concernant la reconversion d'une sous-structure en bassin extérieur d'une capacité de 650 spectateurs, le principe sur lequel nous avons convenu avec le PDG de MCC, c'est que son entreprise effectue les travaux du bassin à la seule condition que cela n'influe pas sur l'enveloppe et le délai. En aucun donc je n'accepterai un changement, s'agissant de ce lot, qui ira au-delà de l'enveloppe inscrite et le délai prescrit», a-t-il averti. Il a donné un ultimatum d'une semaine pour mettre à plat un monticule mi-calcaire mi-roche en vue d'y construire un centre nautique, précisant que «à ma prochaine visite sous huitaine je veux voir toute l'assiette dégagée». Mais autant il fait dans la rigueur, voire le coercitif s'il le faut, pour éviter ou corriger -s'il se trouve devant un fait accompli- une anomalie préjudiciable, autant il hait les vieux réflexes bureaucratiques qui mettent les bâtons dans les roues et n'ont d'autre chose à faire que d'inventer des réserves de toutes sortes. Il a dû, dans cet esprit de facilitation pour aller vite vers l'avant et ne plus perdre davantage de temps, lever séance tenante plusieurs réserves «de trop» qui embarraient les roues de la machine et rendaient la vie difficile à l'entreprise MCC, dans le cas du complexe sportif, et à CSCEC et son sous-traitant chinois également, dans le cas du village olympique.

La mi-2017 : LE DECLIC

Au fil des visites périodiques -à intervalle très court- ciblant le complexe olympique, on y voit donc plus clair. Deux faits majeurs marquent le cycle juillet 2017-mai 2018 dans la courbe d'évolution du projet : l'accélération du rythme (qui a permis de rattraper partiellement le retard) et la rigueur quant au respect des normes. Le premier point ressort d'une simple petite analyse de la progression dans le temps du paramètre-clé «taux d'avancement global». Cette période de 10 mois est en effet l'intervalle où le facteur avancement physique global du projet aura enregistré le plus grand bond depuis la pose de la première pierre en 2007. On ne peut «relativiser» cette déduction en opposant à ce raisonnement ce contre-argument qu'en juillet 2017, le gros œuvre et la plateforme de base étaient déjà bien en place et qu'il ne s'agissait dès lors que de la finition à parachever. Il n'en était rien en fait. Quand Mouloud Cherifi a pris le relai, le chantier, marqué alors par un sous-effectif, un sous-équipement et un manque d'organisation criard, tâtonnait encore, évoluait bien loin -voire aux antipodes- de son planning, à un tempo en dents de scie. Et l'ossature métallique à peine achevée, sous forme d'un nid d'oiseau dans une réplique à moindre échelle du stade de Pékin, était pratiquement la seule pièce du puzzle déjà en place.

LE STADE EN AVRIL 2019. LES STRUCTURES COMPLEMENTAIRES EN AVRIL 2020

Tout autour, il y avait le vide. Alors que rien n'empêchait le lancement en parallèle des travaux d'aménagement à l'extérieur du stade (ou à tout le moins l'aplatissement du sol), un lot qui est tout aussi important et non moins difficile, et ce pour gagner du temps et mettre en phase ainsi le stade avec son enceinte. Au lieu de quoi, on avait droit à des visites locales ou ministérielles trop espacées dans le temps, plutôt occasionnelles, confinées dans un rayon de 150 mètres, où à défaut de pouvoir orienter, aiguiller, corriger sur la base d'éléments physiques existants ou en cours de l'être, on s'en donnait à cœur joie aux prévisions, aux projections et, de temps à autre, aux mises en demeure. Les travaux d'aménagement extérieur de la deuxième tranche ont démarré fin janvier dernier.

La réception du complexe se fera en deux étapes. La première concerne le stade olympique de 40.000 places avec le terrain d'athlétisme et celui de réplique dont la réception est prévue en avril prochain. La deuxième étape comprend le terrain omnisports et la piscine couverte et elle est prévue en avril 2020. Quant aux travaux du village olympique, ils devraient être livrés à la fin de l'année 2019.