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Son coup de couteau sectionne deux doigts de la main de son père: Six ans de prison pour le fils meurtri

par M. Nadir

  Dans un accès de colère, un jeune homme de 27 ans a frappé son père à l'aide d'un grand couteau lui sectionnant deux doigts de la main gauche. Le fils indigne a été condamné à six ans de prison, à l'issue d'un procès dans lequel le père ne s'est pas constitué partie civile.

Retour sur les faits

Un jour d'Aïd el Kebir. Le vendredi 1er septembre 2017, jour de l'Aïd el Adha, le dénommé Kh. Belkheir, 52 ans, se présente devant les services de police de Bir El-Djir pour se plaindre de son fils Amine qui proférait des menaces à l'endroit de ses frère et sœurs et risquait de commettre « une bêtise ». Les policiers confient au père inquiet un numéro de téléphone et lui enjoignent de les appeler en cas de problème. L'homme rentre chez lui et entreprend le rite du sacrifice quand Amine surgit, une arme blanche à la main, en proférant des insanités. Belkheir se réfugie dans une pièce de la maison familiale mais son fils le rejoint et réussit à l'atteindre à la main gauche, lui sectionnant l'index et le majeur ; une grave blessure qui lui vaudra un arrêt de travail de 33 jours et un handicap permanent.

Aveux immédiats

Interpellé par la police, l'agresseur reconnaît les faits en indiquant avoir cédé sous pression de problèmes familiaux persistants : cohabitation difficile de trois familles nombreuses, traitement avilissant du père, mère malade mentale décédée quelques années plus tôt, absence de communication..., soit une vie extrêmement difficile et une pression constante sur les nerfs.

Après l'instruction, Amine sera inculpé pour coups et blessures sur ascendant ayant entraîné des infirmités permanentes, conformément à l'article 267, alinéa 3, du code pénal.

Amine : « On me traitait de bâtard »

A la barre, l'accusé tentera d'expliquer son geste et les motivations qui l'avaient conduit à ce geste fatal: « Je n'ai pas frappé volontairement », commence-t-il avant de se faire reprendre par le président d'audience qui lui rappelle qu'il a quand même poursuivi son père jusque dans la pièce où il s'était réfugié : « J'étais hors de moi... On m'a toujours traité de bâtard... c'était très difficile à endurer... C'est comme cela que j'ai explosé», criera presque le mis en cause.

Après le décès de la mère d'Amine qui souffrait de troubles mentaux, Belkheir s'est remarié et a eu sept enfants, et tous vivaient dans la même maison héritée du grand-père paternel : « Nous vivions tous sous le même toit. Moi avec ma tante paternelle divorcée, mon père avec sa famille et mon oncle avec les siens », relate encore Amine pour donner la mesure des problèmes qui pouvaient naître d'une telle promiscuité : « Je regrette mon geste... ce jour-là, j'ai perdu la tête !», conclura-t-il pendant que ses sœurs, présentes à l'audience, pleurent en silence.

Le parquet requiert 12 ans de réclusion

Loin de s'émouvoir du témoignage de l'accusé (en tout cas, il n'en laisse rien paraître), le jeune représentant du ministère public rappellera le déroulement des faits tels que consignés dans l'arrêt de renvoi, avant de relever que le coup porté par l'accusé a entraîné un handicap permanent.

Dans son argumentaire, il mettra en évidence les aveux de l'accusé, refusera de croire à la sincérité des regrets exprimés et requerra 12 ans de réclusion criminelle. Au cours de sa plaidoirie, l'avocate de la défense (commise d'office) reconnaîtra que l'acte de son client est inadmissible avant de mettre en avant les remords exprimés par Amine et la situation sociale difficile pour demander les circonstances atténuantes : « Son père lui a pardonné et ne s'est pas constitué partie civile.

Il a même tenté de lui rendre visite en prison », dira-t-elle en sollicitant la clémence du tribunal : « Etre traité de bâtard est propre à détruire une personnalité ». Après délibérations, le Tribunal criminel de 1re instance accordera les circonstances atténuantes pour le fils meurtri et le condamnera à 6 ans de prison.