Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Voitures volées à l'étranger: La filière Valence-Mostaganem

par Moncef Wafi

La presse espagnole a révélé que 33% des voitures embarquées à partir de Valence, en direction de Mostaganem, ne sont pas revenues à leur port d'embarquement. Un chiffre record depuis l'activation, en 2016, dans le port de Valence, du plan Paso del Estrecho, un projet mené par l'Espagne pour coordonner l'arrivée d'un grand nombre d'immigrants qui voyagent d'Europe vers leurs lieux d'origine en Afrique du Nord pendant les périodes de vacances.

L'administration portuaire a tiré la sonnette d'alarme sur ce phénomène, l'année dernière, alors que l'embarquement des voitures d'occasion pour ensuite les revendre ne poserait aucun problème du moment que leur origine est tracée. La Garde civile a indiqué, quant à elle, avoir intercepté, depuis le début de l'année en cours, 50 véhicules volés prêts à être embarqués. Les réseaux mafieux derrière ces opérations utilisent les émigrés algériens, vivant dans l'Union européenne, et qui se rendent dans leur pays d'origine en utilisant le ferry de Valence, pour faire passer ces voitures volées, principalement en France et en Allemagne, pour les commercialiser ultérieurement sur le marché noir en Afrique. Des sources policières et juridiques ont confirmé l'augmentation des cas détectés au cours de ces derniers mois avec l'arrestation d'un Algérien de 41 ans qui se préparait à monter à bord du ferry de Valence à Mostaganem avec une Renault Megane, immatriculée en France.

Les agents de la Garde civile de la section fiscale du port de Valence ont découvert que le numéro de l'enregistrement, avec la documentation juridique, ne correspondait pas au modèle réel. Selon les spécialistes, dans 90% des cas, les voitures ont été volées sur le territoire français, principalement de la marque Renault, avec des numéros de châssis parfaitement gravés. Les trafiquants obtiennent des documents juridiques temporaires dans un autre pays, principalement l'Italie et l'Allemagne. Comme c'est souvent le cas dans d'autres réseaux de contrebande, qu'il s'agisse de drogues ou d'autres produits, les transporteurs constituent le maillon le plus faible de la chaîne, les plus vulnérables pour démanteler ces types de mafias, ajoute la presse. En effet, selon le profil des personnes arrêtées par la Garde civile, les réseaux utilisent souvent des citoyens algériens sans expérience pour éviter les soupçons. Pour lutter contre ce trafic, il a été mis en place l'obligation pour les véhicules de retirer le document administratif unique (DUA) dans le port de Valence avec les papiers de la voiture en main pour empêcher de les obtenir dans d'autres pays où sont fournis de faux documents. Une autre mesure pour lutter contre ce trafic illicite de voitures consiste à identifier tous les conducteurs qui ne possèdent pas le véhicule. En l'absence de document prouvant le prêt du propriétaire ou sa location, le voyageur n'est pas autorisé à embarquer. La police espagnole essaye également d'améliorer sa collaboration avec les autorités algériennes, où un cachet noir est apposé sur le passeport du citoyen qui entre en voiture et qui est scellé en rouge s'il quitte le pays sans véhicule. La personne est ainsi localisée et surveillée. Cependant, malgré toutes ces mesures, ces réseaux continuent d'envoyer des voitures en Algérie où elles sont vendues entre 12.000 et 15.000 euros.

Rappelons qu'au cours de sa visite en mai dernier en Algérie, le président d'Interpol, Meng Hongwei, avait estimé qu'il était «nécessaire» de renforcer la coopération avec les autres organisations régionales, notamment l'Organisation africaine de coopération policière «Afripol» présidée alors par l'ancien DGSN, Hamel, «pour faire face à la criminalité internationale». Parmi les créneaux juteux de cette criminalité, le trafic des voitures volées. « Des voitures volées en Europe ont été retrouvées jusqu'en Amérique du Sud et en Australie», a déclaré Tim Morris, directeur exécutif d'Interpol. Plusieurs réseaux de trafics de voitures volées à l'étranger ont par ailleurs été démantelés en Algérie.