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Panneaux publicitaires illicites: Beaucoup reste à faire !

par Houari Saaïdia

A en juger par les actions anti-illicite, on peut dire que la volonté ne manque pas à l'APC d'Oran afin d'assainir le paysage des panneaux publicitaires. Pour autant, le défi est loin d'être relevé tant beaucoup reste à faire : l'informel occupe toujours une bonne place et le chiffre d'affaires réalisé est loin du budget prévisionnel et encore davantage du marché potentiel.

Le 12 juillet, lors d'un conseil exécutif, le maire Boukhatem faisait son mea culpa : « Notre défilé du 5 Juillet, aussi grandiose que celui de Rio de Janeiro, c'était du tape à l'œil ou quoi ? Pour l'exhibition, on mobilise des foules et on déploie de gros moyens, en un claquement de doigts. Mais pour enlever quelques panneaux ?pub', on parle plus qu'on agit ». Le surlendemain, la machine s'est mise en branle. Bilan d'intervention au bout d'une semaine : une trentaine de panneaux démantelés. Après une pause de quatre jours, le dispositif a repris pour porter le bilan à 50. Puis plus rien, à ce jour. Après deux bons coups donc, le mécanisme s'est à nouveau mis au point mort. Si l'on en croit les chiffres communiqués par le vice-président, chapeautant la commission chargée du dossier relatif à la publicité urbaine, lors de la réunion du bureau exécutif, le 12 juillet, et compte tenu du bilan des opérations d'éradication postérieures, une centaine de panneaux non autorisés subsistent sur la place d'Oran.

Le déploiement d'un dispositif communal avec la force d'appui des divisions (DHA, DVC et DTNM, notamment) faisait suite à la requête du président de la commission qui avait justifié les résultats mitigés du processus par la disproportion du dispositif matériel mobilisé. «Avec le matériel engagé, on met toute une journée pour déraciner et évacuer un panneau ou deux, maximum. Il va falloir mettre en place une bonne force et déclencher une attaque non-stop suivant un plan d'intervention. De la sorte, on assainira le paysage à 100%, au bout de 15 jours, tout au plus », avait-il suggéré. Manque de volonté et d'entrain des SU, inexécution des ordres du Cabinet, manque de coordination Commission-Divisions-SU ? Au fond, à y regarder de plus près, il y avait un peu de tout cela à la fois.

Petite cueillette de 3 milliards d'une ressource qui en vaut 20

Provoquer en un clin d'œil, un défilé bien fourni en engins motorisés, ayant sa tête à la Place d'Armes et sa queue au rond-point de Zabana, pour les besoins de la commémoration et de la réjouissance publique, et être incapable, en revanche, à rassembler l'équivalent de 1/100ème à l'effet d'une petite opération épiderme anti-illicite, cela n'honore en rien la ville d'Oran. D'où la réplique virulente de Boukhatem, qui avait signifié un ultimatum de 15 jours pour clore ce dossier. Outre l'anarchie que génère, en plein cœur de la cité, cette publicité urbaine tous azimuts, la moins-value financière qu'elle induit est fâcheuse pour la collectivité.

En tout cas, ce n'est pas avec cette attitude à la milite de la tolérance -voire la complaisance- vis-à-vis des annonceurs clandestins que la municipalité va espérer convaincre les annonceurs «disciplinés» à revoir, à la hausse, leur niveau de soumission et améliorer, ainsi, les recettes de ce chapitre, qui ne dépassent guère le montant de 3 milliards, le tiers du prévisionnel porté sur le BP 2018. Inévitablement, le dossier sous l'intitulé générique ?Pub' a fait incursion dans la récente plénière APC. Ne figurant pourtant pas au menu, ce dossier s'est infiltré dans l'audience, allant jusqu'à supplanter des points inscrits à l'ordre du jour qu'il a fini réduit au lot des « divers ». Quoi de plus normal que d'intercaler un chapitre qui vaut pas moins de 20 milliards de recettes dans une session 100% financière.

Le passage de la délibération concernant la taxe sur les enseignes lumineuses, à caractère professionnel, à celle relative à la taxe liée aux actes d'urbanisme et les autorisations y afférentes (permis de clôturer, permis de démolir, permis de terrassement, autorisation de voirie?) a servi d'entracte pour faire le point sur le dossier ?Pub'. Boukhatem commence par le côté cour du paysage : les vieux panneaux sauvages qui subsistent envers et contre tout et ceux de très fraîche date.

«Qu'attendez-vous pour déplanter les panneaux non autorisés ? Non seulement vous restez inertes, devant les anciens panneaux mais vous ne réagissez pas, non plus, aux cas nouveaux. Eux, ils sont futés et agiles.

Cinq actions en justice pour affichage illicite

Ils vous prennent de court. L'acte se fait en deux temps. La nuit, ils mettent en place les supports en béton. La nuit d'après, ils fixent le panneau par des boulons. Il n'en faut pas plus pour vous mettre devant le fait accompli. A ce rythme-là, je crains que nos statues, stèles et monuments soient totalement éclipsés, un jour par les écrans publicitaires à l'emporte-pièce », s'est insurgé le P/APC, devant les directeurs et les délégués des secteurs urbains. Le directeur de la Réglementation générale (DRG), Bettayeb Mustapha, a donné un point de situation précis. Il a fait savoir que la commune a intenté cinq actions, en justice, pour affichage publicitaire, en violation à la réglementation en vigueur (installation de panneaux publicitaires sans autorisation) et a obtenu autant de décisions judiciaires définitives en sa faveur, en vertu desquelles les annonceurs mis en cause devaient enlever, sans délai leur matériel, avec le versement de dommages et intérêts, à la Trésorerie communale. Il a indiqué que dans le cadre de l'assainissement du créneau, deux séances de travail avaient été tenues avec la cellule technique, rattachée au Cabinet du maire ainsi que les directeurs et les délégués des différentes délégations communales, qui ont été destinataires dans l'intervalle de la liste exhaustive des points autorisés pour l'affichage publicitaire, suivies de sorties sur le terrain, à travers les secteurs urbains. Avec comme objectif évident, avait-il souligné, de recenser les panneaux non autorisés en vue de leur démantèlement.

Marché ?Pub' local : «sous-exploité» selon les uns, «surestimé» selon d'autres

Cependant, selon le DRG, «les prévisions budgétaires au titre de ce chapitre avaient été surestimées». Pour lui, «le pragmatisme voulait qu'on passe d'abord, par une étude du marché local, et qu'on fasse ensuite des calculs sur la base d'éléments tangibles». En attendant de savoir le montant réel précis, perçu au titre des panneaux publicitaires, il importe de rappeler que le BP 2018 de la commune d'Oran table sur 9,7 milliards, soit près de 9% (en milliards) du chiffre global des recettes estimé à 87 milliards. La procédure de mise en concurrence, entreprise fin 2017, s'était soldée par 13 adjudicataires et non des moindres, sur le marché publicitaire national, dont l'Anep. Il faut noter, par ailleurs, le cahier des charges, fixant les droits et obligations liés à la mise en adjudication des points d'emplacement destinés à l'affichage publicitaire, élaboré par le biais de la DRG, était à la hauteur des effets d'annonce qui émanaient du Cabinet du maire. Passer du mode « aucune règle » où on implantait des panneaux, à tout-va et à tout hasard, au circuit professionnel où les règles du jeu, le contrat de service et la charte d'étique, sont fixés préalablement, c'était, en soi, un grand pas. C'était surtout -ou du moins censé l'être- un acte économique porteur et prometteur, une sacrée affaire au profit de la Trésorerie communale qui se voyait, ainsi, branchée à une grosse machine à sous