Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Election présidentielle 2019: Un été suffoquant en perspective

par Ghania Oukazi

Des généraux à la retraite ont pris attache avec d'anciens ministres pour leur proposer de se constituer en comité de soutien à Ahmed Ouyahia, en prévision de l'élection présidentielle de 2019.

«Un général à la retraite qui était conseiller à la présidence de la République a pris attache, avec un ancien ministre, membre du RND, pour lui proposer de travailler pour l'élection de Ouyahia à la présidence de la République en 2019,» apprend-on de sources du parti. «L'ancien ministre a rejeté l'idée en faisant rappeler au général que Ouyahia a vidé le RND d'un nombre important de cadres, je ne vois pas comment on pourrait l'aider (?),» font savoir nos sources. L'on entend dire, en haut lieu, qu'«on a été étonné d'entendre Ouyahia, à la fin du Conseil national du RND, appeler le président de la République à poursuivre son parcours, qui lui a demandé de parler du 5ème mandat ?»

L'éviction du directeur général de la DGSN n'est donc pas le seul fait qui agite la scène politique nationale. D'anciens et nouveaux responsables s'activent à se positionner en prévision d'une échéance électorale, pas comme les autres, au regard des supputations qu'elle suscite et, notamment, des incertitudes qui l'imprègnent. Il est certain que le limogeage du général major Abdelghani Hamel ne laisse pas les choses comme elles étaient durant ces dernières années. La santé du président complique la situation plus qu'avant parce que depuis sa dernière sortie publique, elle n'a pas évoluée, positivement. Des sources médicales n'en démordent pas. «La santé du président pose, ces derniers temps, de sérieux problèmes,» soutiennent-elles. Les déclarations de Hamel, alors patron de la police, n'ont pas arrangé les esprits en quête d'«alternatives» susceptibles de «sauver la face» des Bouteflika. «Il est possible que le président reprenne quelques forces mais ça ne sera plus comme pour les autres mandats, les choses se compliquent?,» nous dit un responsable. L'on apprend d'ailleurs que la présidence de la République a tenté de ne pas laisser les déclarations de Hamel «pourrir» la scène politique en lui faisant parvenir son souhait de le voir les «nuancer.» Selon nos sources, il aurait été demandé au patron de la DGSN (avant son limogeage) d'animer une conférence de presse pour en rectifier quelque peu la teneur.

L'ordre public en question

«Non, aurait-il répondu, en quoi mes propos ont-ils dérangé, en principe quand je dis que celui qui doit lutter contre la corruption doit être propre, tout le monde doit être d'accord et le dire aussi.» Il est avancé qu'il a même été demandé à Hamel de démissionner mais sa réponse a été «ferme et tranchante» selon nos sources. «Je ne démissionne pas, je suis un militaire, je ne suis pas un déserteur, si le président veut m'enlever, qu'il le fasse», aurait-il répondu. Des officiers de police tiennent à rappeler que «ce sont les agents de la Sûreté nationale qui maintiennent l'ordre public, ils montent la garde sur tout le monde, hauts gradés, hauts placés, petites gens (?), on doit rester vigilant devant une situation qui se dégrade, avant on protégeait des responsables qui commençaient à boire à partir de 21h, ces derniers temps ils commencent à partir de 16h ou 17h , à peine, c'est pénible». Officiers qui se plaignent encore du fait que la DGSN ait été écartée de l'enquête sur les 701 kg de cocaïne. «Nous aurions voulu qu'à l'approche du bateau portant la cargaison, des brigades mixtes auraient été constituées pour le fouiller ensemble, ça devait se passer comme ça, en principe.» La force, disent-ils, de l'institution policière est qu' «elle est dans l'Interpol et que son patron en est un haut responsable, elle est, toute indiquée pour mener des enquêtes sur les ramifications des réseaux maffieux». Et à ceux qui, soutiennent-ils encore «doutent de nos compétences et même d'autres choses», les officiers répondent «ils ont les moyens qu'il faut pour savoir ce qu'on fait.» Les détracteurs de Hamel convoquent l'histoire pour pointer du doigt la grande manifestation des agents de la Sûreté nationale, devant le siège de la présidence de la République. C'était en octobre 2014. Ils étaient des centaines de policiers qui s'étaient retrouvés regroupés à la place d'El Mouradia, bravant, ainsi, tous les interdits imposés par et pour les services de sécurité, tous secteurs confondus.

Forces en faction et désordre politique

«C'est le seul corps qui a pu manifester devant la présidence de la République alors que les lois interdisent tout acte de ce genre, dans la capitale, c'est que les policiers en avaient marre de leur chef,» disent nos sources. A cette date, les policiers brandissaient des pancartes réclamant entre autres, «Hamel dégage ! Doublement des salaires ! Syndicat autonome ! Droit à la récupération du travail de nuit ! Droit au repos !»

Au-delà de ces problèmes, de hauts responsables estiment que Hamel n'était pas le seul patron qui commençait à déranger. «Lui-même, quand il est revenu de New-York, il semblait très agité,» entendons-nous dire. A cette date, l'affaire de la cocaïne avait déjà été rendue publique. «Il savait que la situation commençait à se compliquer et que des événements fâcheux allaient se passer,» affirment nos sources

Fait important évoqué, «la décision de la présidence de la République de mettre fin aux fonctions du chef d'état-major, le général de corps d'armée, le général-major Ahmed Gaïd Salah. » L'on apprend ainsi selon de hauts responsables que « Gaïd a reçu, il y a quelques mois, sa mise de fin de fonctions mais sa première réaction a été de déchirer le papier et de dire si je dois partir, c'est le président de la République qui doit me le dire, personne d'autre !» Le désordre politique est patent.

Il faut croire que faire partir Hamel était plus simple, la police n'étant pas chargé de surveiller les frontières, en ces temps où les tentatives de déstabilisation apparaissent au grand jour. Les spécialistes de l'environnement prévoient un été suffocant de chaleur. Les observateurs politiques n'en disent pas moins pour ce qui est des événements à venir.