|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Le 16 juillet 1950 restera une date dont les Brésiliens se souviendront
toujours. Plus que leur défaite en 2014 face à l'Allemagne, ce revers
douloureux est à jamais inoubliable. Qu'on en juge : les Brésiliens, qui
avaient déjà affiché leurs extraordinaires qualités en France lors de la Coupe
du monde 1938, étaient quasi certains de remporter le trophée. Tous les
paramètres étaient réunis : une compétition à domicile, le soutien indéfectible
de fans fanatisés par un succès de leur Seleçao, un
trio d'attaque sans pareil avec Zizinho - Adenir et Jaïr. Enfin, un système
de compétition cousu main pour que le Brésil l'emporte. En effet, et
contrairement aux trois précédentes éditions, celle de 1950 a vu les
organisateurs imposer leur point de vue, en fait un véritable chantage. Les
Brésiliens voulaient bénéficier de deux énormes avantages. Primo, percevoir le
maximum de recettes avec la multiplication des matches avec la formule
championnat. Secundo : mettre les plus grandes chances de leur côté en «
éliminant » la finale. Ce qui signifie que, lors de ce match historique, un nul leur suffisait pour remporter la Coupe du monde puisque
l'Uruguay avait un total de points inférieur, 3 contre 4 pour le Brésil. Quoi
qu'on dise, sur le plan sportif et les réputations, c'était la finale rêvée
entre les deux meilleures équipes du moment. Mais, tout de même, peu de
parieurs auraient misé sur l'Uruguay, plus petit pays d'Amérique du Sud, face
au géant brésilien. Et, pourtant, c'est la Céleste qui a décroché sa seconde
étoile, bousculant ainsi les pronostics les mieux établis. Pourquoi et comment
? Sur le plan tactique, les Uruguayens ont démontré leur solidité et leur
organisation. Leur défense a su endiguer les assauts du fameux trio Zizinho - Ademir - Jaïr et, surtout, en raison des succès faciles acquis
auparavant, la défense brésilienne n'a jamais été mise à contribution. Or, ce
jour-là, face aux attaques de la Céleste menées par l'extraordinaire inter Juan
Schiaffino, elle a paniqué à chaque action et cédé à
deux reprises, le second but à dix minutes de la fin du match. Tout le Brésil
fut prolongé dans le deuil alors que c'était l'allégresse à Montevideo. Sur le
plan moral, il y a eu un péché d'orgueil de toutes les composantes cariocas,
car tout était prévu pour fêter et célébrer ce sacre « promis » d'office à leur
équipe. Cette arrogance des organisateurs a porté préjudice à une formation
qui, sur ce qu'elle a montré sur le terrain, méritait bel et bien d'être
sacrée. Toutefois, les Uruguayens ont affiché, en plus de leur solide technique,
des vertus morales hors du commun. Pour tous les experts, c'était des champions
du monde très convenables. A ce propos, le cas de ce pays d'Amérique du Sud est
particulier en ce sens que, depuis 1930 jusqu'à ce jour, il arrive à enfanter
de grands joueurs en dépit d'une population infiniment moins conséquente que
tous ses adversaires, y compris bien sûr le Brésil. Tous les experts ont décelé
dans ce pays un état d'esprit qui façonne la façon d'agir de ses joueurs. Tout
récemment, l'un des cracks actuels, le redoutable buteur Edinson
Cavani (PSG), a dit : « je ne suis pas une vedette,
mais un travailleur du football ! » On comprend un peu mieux sa réussite, comme
celle d'ailleurs de tous ses compatriotes évoluant dans les clubs européens. Il
faut souligner que, depuis la nuit des temps, la formation des jeunes est un
credo inamovible, les championnats se déroulant en permanence pour toutes les
catégories des enfants. En Uruguay, les enfants apprennent à maîtriser le
ballon avant d'aller à l'école. Dès leur plus tendre enfance, on leur inculque
les valeurs du football et les perspectives d'avenir pour eux, dans le cas où,
devenus adultes, ile décideraient d'en faire leur métier. Des experts se sont
penchés sur ce cas spécifique au football uruguayen.
La fiche Finale : Uruguay 2 - Brésil 1 Attaque : Brésil (22 buts) Défense : Uruguay (5 buts) Buteur : Ademir (Brésil) 8 buts Echos Dates Inquiète du retard dans l'organisation de cette édition, la FIFA a chargé le président de la fédération italienne de s'impliquer. Ce dernier, qui avait mis sur pied la Coupe du monde 1934 avec succès, a pris l'affaire en main et cette édition a pu se dérouler aux dates prévues. Architectes Pour construire le stade Maracana, il a été fait appel à quatre architectes qui lui ont donné la forme d'une ogive afin d'accueillir le plus de spectateurs possible. Les travaux n'étaient pas achevés lorsque la compétition a commencé. Ils ont débuté au mois d'août 1948. D'ailleurs, le joueur yougoslave Mitic s'est ouvert le front au contact d'une poutrelle. Un véritable chantier. Ce qui est certain, c'est que personne ne s'aventurera à construire un stade d'une telle grandeur, en raison des mesures strictes liées à la sécurité des spectateurs et des joueurs. Il faut rappeler, qu'au coup d'envoi, il n'y avait pas de tribune de presse. Forfaits Comme d'habitude, il y a eu de nombreux forfaits, mais celui qui a intrigué l'opinion, c'est bien celui de la France. Eliminée au terme de la phase de son groupe par la Yougoslavie, le onze tricolore a été repêché en raison d'autres forfaits européens. Mais la fédération française a critiqué le calendrier qui obligeait son équipe à effectuer 3.500 kilomètres entre deux villes, même si ces déplacements devaient s'effectuer par avion. La véritable raison, c'est que l'équipe de France était dans le déclin. Ce fut un tollé général dans la presse française. Deux pays, pourtant qualifiés, la Turquie et l'Ecosse, ne se sont pas déplacés. Chiffres 199.954, c'est le chiffre officiel transmis par la FIFA concernant l'assistance de la finale Brésil - Uruguay. En réalité, ils étaient 220.000 car le service d'ordre a été rapidement débordé. Les resquilleurs et les sans billets ont arraché les portails pour accéder au stade pour ne pas rater ce choc historique. Blessés Avant le coup d'envoi de cette finale, noyée dans une véritable marée humaine, les blessés ne se comptaient plus, et il n'y avait pas assez de civières pour les évacuer vers l'infirmerie et l'hôpital. Triple paye Le lendemain de la victoire de la Céleste, la journée de lundi a été décrétée jour férié. De leur côté, les industriels et les commerçants, enchantés par cet exploit inespéré, se sont mis d'accord pour payer triple paye à leurs employés pour fêter dignement cet exploit. En fait, la fête a duré plusieurs jours. Il y a de quoi? Billets Heureux ce jour-là ceux qui ont pu se procurer un billet. Effectivement, les supporters se sont battus au niveau du siège de la fédération brésilienne pour obtenir le précieux sésame. Ailleurs, les guichets de location ont été mis à sac carrément. Protocole Après cette terrible défaite, le protocole a disparu. Il n'y avait ni garde d'honneur, ni hymne, ni discours, ni remise solennelle. Le président de la FIFA Jules Rimet, la coupe dans les bras, ne savait quoi faire. Il a fini tout de même par apercevoir le capitaine uruguayen Varela et lui remit le trophée en lui serrant la main, sans pouvoir dire un mot... Réservation Convaincus de leur supériorité et certains de disputer la finale, les Anglais avaient réservé leurs billets pour le lendemain de la finale. Mal leur en prit car, éliminés piteusement, les coéquipiers de Ramsey ont dû rester deux semaines supplémentaires au Brésil. Pieds nus Dans le groupe 10 du tour préliminaire, l'équipe de l'Inde, de même que les Philippines et la Birmanie, a déclaré forfait. Ce n'est pas à cause du long voyage et des frais que ce dernier occasionne, mais parce que la FIFA n'a pas autorisé ses représentants à jouer pieds nus ! Isolement L'Angleterre, qui a inventé le football, a quitté la FIFA en 1929 et ne l'a réintégrée qu'en 1950. Cet isolement a permis aux sujets de Sa Gracieuse Majesté de conserver un tant soit peu leur statut de grande nation de football jusqu'en 1953, jusqu'à que l'inoubliable équipe de Hongrie des Puskas, Kocsis, Grosics, Bosik, Hidegkuti et autre Czibor a donné une leçon aux Anglais dans leur propre fief de Wembley (6 à 3). C'était la fin d'un mythe de l'invincibilité des Anglais sur leur terrain. Joe Gaetjens C'est précisément un Haïtien, débarqué depuis peu de son île natale, qui a marqué le seul but de la rencontre USA - Angleterre. Même lui n'en croyait pas ses yeux. Tout comme les Brésiliens en 1938, les Anglais, trop sûrs d'eux face à un néophyte sans palmarès, avaient laissé au repos leur grande vedette, le fameux ailier droit Stanley Matthews. Ils seront punis pour leur suffisance. C'est l'une des plus grandes humiliations qu'une grande nation du football ait connue. |
|