Une grève illimitée, déclenchée depuis le 12 juin
dernier par le syndicat de la société S.CI.B.S. risque
de perturber le fonctionnement de la cimenterie et compromettre les prévisions
pour l'année 2018. Le mouvement fait suite à la suspension d'une dizaine de
travailleurs qui ont observé un sit-in à l'entrée de l'usine afin de réclamer
le paiement de la prime de performance. Selon une correspondance adressée aux
protestataires, les motifs retenus justifiant la sanction semblent assez graves
: «Abandon de poste, séquestration du D.G. et de son adjoint de 12h30 à 19h 30,
sabotage des caméras de surveillance, coupure de l'électricité et des lignes
téléphoniques, entrave à la liberté de travail, agression sur le responsable de
la sécurité.» Des griefs que le syndicat des travailleurs juge infondés et qui
confirment, selon lui, les manœuvres de division de la direction générale dont
le bilan serait en deçà des objectifs qui auraient permis au partenaire
saoudien, en l'occurrence Pharaon, d'empocher le bonus du management. Il
manquerait 5.000 tonnes de clincker pour atteindre le
seuil des 1.000.000 de tonnes retenu dans les clauses du contrat de management
et ouvrant droit à une majoration du bénéfice liée à la production pour l'année
2017. Le groupe G.I.C.A détient 65% des actions tandis que Pharaon active avec
35% des parts. A l'issue de l'exercice, SCIBS a réalisé un chiffre d'affaires
net de 298 milliards de centimes. Une situation financière plutôt bonne,
constamment en hausse depuis la signature en juillet 2015 de la convention de
partenariat entre GICA et Pharaon. Cette relation, cependant, n'est pas exempte
de conflits d'intérêts, puisque, pour les bilans de 2011 et 2013, Pharaon a eu
recours à un arbitrage international pour revendiquer des droits de management.
Dans ce nouveau bras de fer, le syndicat s'est mobilisé autour des employés
sanctionnés qui ont agi de leur propre chef. Une récupération qui laisse
quelque peu perplexe vu le caractère isolé du coup de force qui a entraîné la
grève. Il est clair que le partenaire étranger n'est plus en odeur de sainteté
auprès des 420 travailleurs de l'usine et que son principal souci, la
rentabilité économique, au demeurant louable, a occulté certains problèmes
cruciaux comme la préservation de l'environnement. L'histoire du remplacement
des électro-filtres, devenus obsolètes, par des
manches plus modernes et efficaces pour combattre la pollution atmosphérique
résultant des cheminées de la cimenterie, a trop traîné. En effet, c'est à
partir de 2009 et sous la pression des associations écologiques et des élus,
que la question a commencé à prendre de l'ampleur mais rien n'est venu
entériner les propos rassurants du manager, Pharaon, qui a évoqué à maintes
reprises l'achat imminent auprès d'un fournisseur français de filtres à manches
dont la valeur est estimée à près de 300 millions de dinars. Au train où vont
les choses, il y a de quoi s'inquiéter car à l'heure des bilans on n'a d'yeux
et d'oreilles que pour les comptes et décomptes, le reste peut attendre.