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Usa-europe-coree Du Nord: Donald Trump, dribbleur diplomatique

par Bruxelles: M'hammedi Bouzina Med

En torpillant la réunion du «G7» juste avant de s'envoler vers Singapour pour la première rencontre d'un chef d'Etat américain avec un homologue nord-coréen, Donald Trump bouscule «l'ordre» diplomatique mondial et déroute les Européens.

L'Europe, plus précisément l'Union européenne, «n'append pas les leçons de l'Histoire» pour paraphraser le général vietnamien Giap, tombeur de la France coloniale en Indochine, en continuant à «tomber» pieds et mains liés dans les pièges diplomatiques tissés par le président américain Donald Trump. Sinon comment comprendre les désormais 6 membres du «G 7» d'avoir rejeté instinctivement la proposition de Trump de rappeler la Russie dans leur organisation? Dire que c'est ce sont les USA sous la présidence de Barack Obama qui ont été à l'origine de l'expulsion en mars 2014 de la Russie du groupe de ce qui était le G8 en raison de l'annexion de la Crimée par la Russie. Voilà Trump demandant sa réintégration comme il avait promis son rapprochement avec la Russie lors de sa campagne électorale.

Pour cela, Donald Trump tient parole. L'ironie de la situation est qu'avec les sanctions économiques qui ont suivi la sortie de la Russie du G8, ce sont les Européens qui ont perdu gros en termes financiers et économiques. Et ça continue, en retirant sa signature du communiqué final d G7 tenu samedi au Canada, Donald Trump signifie aux Européens pratiquement son abandon de la logique du G7, sa raison à lui de quitter à son tour le club dominé par les Européens. Bizarrement, Donald Trump fait du «multilatéralisme» économique et diplomatique, revendiqué par les Européens en usant et croisant une diplomatie dite bilatérale: multiplier des accords et échanges bilatéraux ne revient-il pas pour son pays à assoir une politique extérieure multilatérale ? Sujet intéressant pour les candidats à sciences po.

Pendant que les Européens philosophent sur «l'instabilité» politique -et mentale- du président américain, ce dernier négocie à l'autre extrémité du monde une stratégie géostratégique majeure: l'équation nord-coréenne dans l'espace asiatique. Faut-il être aveugle à ce point pour ne pas saisir que derrière la question du nucléaire nord-coréen se traite le positionnement des Américains dans le futur marché dominant asiatique ? Bientôt cette région représentera plus de 70% de la population mondiale ancrée dans la modernité des technologies nouvelles et de la compétition économique tous azimuts. Les USA ont tout intérêt à «dompter» l'ardeur des Nord-Coréens, voisins et amis des Chinois, aux fins de bénéficier de couloirs de coopération et de présence stratégique.

Les dirigeants européens reprochent à Donald Trump de faire de la politique comme il faisait du mangement pour ses entreprises privées pour imager son inculture politique et diplomatique. Comme si la politique et la diplomatie étaient des exercices de méditation strictement philosophiques. Comme si les Européens ne regardent pas à la dépense et aux contraintes de leurs marchés. Comme s'ils faisaient, au sein de leur club du G 7, du bénévolat humaniste pour le reste du monde, en particulier au profit des pays pauvres. Engagés çà et là dans des guerres qui ne les concernent pas directement, vendeurs d'armes aux belligérants et même à des groupes subversifs comme en Syrie, payant des sous-traitants comme la Turquie d'Erdogan pour retenir les victimes civiles de leurs guerres dans des camps de réfugiés, les Européens crient à la «trahison» dès qu'il s'agit de leur argent et leurs intérêts économiques. Donald Trump aussi ? Oui, mais lui le revendique et le fait «l'Amérique d'abord». Quant à l'Europe, non satisfaite de ses propres incuries, divisions et disputes internes, elle aggrave son cas en entrant en conflit commercial et diplomatique avec les USA. L'implosion politique de l'Union européenne sera de la responsabilité de ses propres dirigeants. Les coups de boutoir de Donald Trump ne sont qu'un effet aggravant ou accélérateur de sa perdition.