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Tiaret: Des soirées longues et insipides

par El-Houari Dilmi

Cette année, si les jeûneurs se réjouissent du temps clément et de la disponibilité des fruits et légumes à des prix plus ou moins abordables pour les bourses moyennes, l'ambiance des nuits ramadhanesques est des plus insipides. Comme une «chorba blech» !

En effet, à Tiaret, les ramadhans se suivent et se ressemblent au point où le mois de tous les soucis sombre dans une affligeante monotonie.

Avec des températures clémentes depuis le début du mois de ramadhan, les journées sont très longues et la ville paraît comme abandonnée par ses habitants. Ce n'est que vers midi que les premières silhouettes avachies font leur apparition dans la ville pour vaquer aux besoins de la meïda du f'tour. Dans les différents quartiers et principales artères de la ville, le calme règne jusqu'aux premières heures de l'après-midi.

Les éléments de la sûreté nationale, certains en tenue civile, veillent au grain.

«Depuis trois ou quatre années, l'on se sent en totale sécurité pendant le mois de ramadhan, même les agressions et autres vols à la tire ont nettement diminué», commente, un melon jaune dans les bras, un quinquagénaire flânant le long de la rue de la Victoire. «Il y a longtemps que le ramadhan n'a plus aucun goût, plus rien n'est comme avant, même les senteurs suaves et la ferveur si caractéristiques du mois de piété ne sont plus ce qu'elles étaient », nous confie Amine, un vendeur de pâtisserie orientale près du siège de la radio locale. A part «l'actualité» quotidienne faite de longues journées en « mode veille » et de ripailles le soir venu, rien ne distingue ce mois du reste du calendrier annuel.

Victime du changement de l'ordre des priorités depuis plusieurs années déjà et reléguée au rang de cinquième roue du carrosse, la chose culturelle n'a plus droit au chapitre. La sécheresse culturelle qui sévit dans la capitale des Hauts-Plateaux de l'Ouest oblige le jeune surtout à se contenter d'activités ou de hobbies occasionnels pour tromper l'ennui. Cette année, les veillées sont vides et insipides. A part les cafés peu fréquentés en ce mois de ramadhan, contrairement aux années précédentes, et les places publiques bondées de monde après les prières des Tarawih, rien à signaler du côté des activités culturelles ou artistiques depuis longtemps comme «interdites de chapitre» à l'antique Tihert.

Même les longues soirées ramadhanesques autour d'une table de belote, de rami ou de dominos semblent comme passées de mode. Faisant contre mauvaise fortune bon et gros cœur, les gens se terrent chez eux dès 23 heures pour se «shooter» à volonté d'images venues d'ailleurs et rebelote le lendemain dans un mois où «les gens s'empiffrent de tout sauf de la nourriture de l'esprit qui ne semble plus intéresser personne». Autres temps, autres mœurs !