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Crise au Moyen-Orient: La politique algérienne de l'équidistance

par Ghania Oukazi

«Nous avons des rapports normaux avec tout le monde, on reste équidistant avec tous les Etats, on ne donnera jamais de prétexte aux uns et aux autres pour nous créer des problèmes,» entendons-nous dire par des responsables algériens.

Nos décideurs restent convaincus que cette «politique d'équidistance», du juste milieu, face aux Etats en confrontation, est bénéfique à l'Algérie. «C'est ce qui fait la force de notre diplomatie,» soutient-on. Ce qui ne les empêchent pas de noter que «nous restons très vigilants face à ce qui se passe.» L'on nous explique qu'une fois les Américains sortis de Syrie, on s'attend à ce qu'ils exigent des pays arabes d'aller y remettre de l'ordre en se constituant en forces militaires comme pour le Yémen. C'est ce que les analystes appellent «l'arabisation du conflit.»

Les Etats-Unis et Israël comptent bien se débarrasser de Hezbollah et de l'Iran par des moyens humains et matériels arabes et musulmans. «Ce n'est pas nouveau, l'idée a germé du temps de Obama,» rappellent des politologues algériens. Il est connu que les monarchies arabes ont livré leurs âmes au diable Trump pour détruire l'Iran et appuyer Israël dans son hégémonie sur le Moyen-Orient et sa mise à mort de la Cause palestinienne. Le Moyen-Orient brûle et les feuilles de route élaborées par les Etats-Unis et son allié de toujours Israël sont en train d'être mises en œuvre d'une manière violente et périlleuse. Les rois et princes arabes s'y sont asservis, mains et pieds liés, pour éviter ainsi aux Etats-Unis de gaspiller hommes, argent et équipements pour liquider des Etats qui dérangent. C'est, sans état d'âme, que les Américains dictent leurs desseins à ceux qu'ils ont érigés comme leurs prestataires de services «pour le mal et pour le pire». Les Etats-Unis déclenchent, désormais, des guerres par procuration. Les Arabes, particulièrement les monarchies, ont livré leurs âmes au diable Trump, pour exécuter ses décisions, ses appétences et ses folies. Le gros contrat d'armement qu'il a signé, avec l'Arabie Saoudite, de Mohamed Ben Salman ne lui a pas suffi.

Les monarchies enragées contre l'Iran

Donald Trump veut provoquer d'autres guerres pour pouvoir vendre davantage d'armes. Son rôle est ainsi d'attiser les pires tensions qui puissent exister pour mettre, dos à dos, des musulmans censés, pourtant, s'allier pour contrer le terrorisme d'Etat que les Israéliens exercent sur les Palestiniens. Les Israéliens ont tout compris. Ils rappellent aux Arabes -à chaque fois que c'est nécessaire- les dissensions qu'ils les ont opposés aux Perses, il y a plusieurs siècles de cela. Ce qui les enragent et les poussent à foncer dans la mise en œuvre de stratégies destructrices que seul le Mossad peut élaborer sans risque d'échouer.

L'Iran est, donc aujourd'hui, la cible à atteindre pour laisser Israël régner comme seule puissance nucléaire sur le Moyen-Orient et seul maître de toutes les situations qui prévalent dans le monde arabe et musulman. La véracité des documents qu'il a fournis aux Américains pour démontrer que l'Iran possède un programme nucléaire militaire, importe peu. Des pays arabes et musulmans ont bien été le théâtre de «printemps arabes» fomentés, préparés et décidés par des laboratoires américains, commandés par les plus hauts gradés du Mossad. Des preuves ont été fournies et argumentées par des analystes de haute vertu, mais les décideurs de petits pays dont la stabilité a été malmenée par les faits de cette «anarchie créatrice !?!», continuent de se vanter d'être «les premières et véritables démocraties, dans le monde arabe.» Le ridicule va jusqu'à les voir continuer à croire qu'ils progressent véritablement pour devenir des puissances régionales «autosuffisantes». Il faut admettre que l'impérialisme et le sionisme ne sont pas passés de mode. Les laboratoires occidentaux continuent de travailler sur des stratégies de déstabilisation du monde arabe et musulman jusqu'à la mise en œuvre totale du GMO «le Grand Moyen Orient.»

Le projet d'assembler ce monde, de Kaboul à Tanger, n'a rien d'une illusion d'optique. Les événements qui se précipitent dans la région et qui ont leur impact direct, ici, au Maghreb, n'en cachent pas les visées. Les récentes déclarations du ministre marocain des Affaires étrangères contre l'Algérie font peur.

Nécessité d'appropriation des conflits par leurs acteurs

Si la France et les Etats-Unis se sont arrangés pour que l'Algérie soit encerclée par le feu, ils n'hésiteront pas à le laisser se propager sur ses territoires. Il ne leur a pas été difficile de trouver un prestataire de service pour faire agiter le spectre de la déstabilisation. Washington et Paris n'ont jamais apprécié le fait que les décideurs algériens brandissent un principe constitutionnel pour refuser de faire nettoyer la Libye par l'armée nationale. Consciente des dangereux défis qui pointent à ses frontières, l'Algérie est persuadée qu'elle fait l'objet de tentatives démoniaques. Mais il est évident que si l'Algérie est «atteinte», c'est toute la région qui va s'embrasser. Le Maroc ne s'en sortira pas indemne. Il est, en effet, connu que les puissants de ce monde, Israéliens en tête, sacrifient leurs «amis» quand il s'agit, pour eux, de préserver leurs intérêts. Le Sahara Occidental continuera d'être ce subterfuge que le makhzen marocain évoquera, à chaque fois, qu'il veut provoquer l'Algérie. Il faut noter que la dernière résolution du Conseil de sécurité, appelant à reprendre les négociations, avec le Polisario «sans préalables et sans conditions» a, sans conteste, acculé Rabat. Résolution qui, de surcroît, lui recommande de faire accompagner ces négociations par les pays voisins, à savoir : l'Algérie et la Mauritanie. En accusant l'Algérie d'aider les Sahraouis et de les faire armer par l'Iran, les responsables marocains veulent la diaboliser et faire croire, en même temps, que le Polisario est un mouvement terroriste et refusent, donc, de se mettre à la même table que lui. Notre diplomatie pense qu'«il faut rester très prudent face à ses stratagèmes du royaume.» Il est évident que l'Algérie ne sortira pas du cadre de la politique d'équidistance qu'elle a, toujours, mis en avant, à chaque fois qu'elle se trouve face à un conflit. L'Algérie, si elle ne réagit pas à ce qui s'est passé, ces derniers temps, au Moyen-Orient, c'est parce que, nous dit-on, «elle tient toujours à ce que les conflits soient appropriés par leurs acteurs directs, c'est la seule manière qui permet de leur trouver des solutions.» Appropriation qui s'applique à la Syrie, au Yémen, à la Libye, au Mali, et au Sahara Occidental?