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Bedoui, Zaalane et Necib commémorent le 8 mai 45 à Sétif: Des martyrs qui attendent le statut de chahid

par Notre Envoyée Spéciale A Sétif Ghania Oukazi

Sétif a tenu pendant 48 heures la cadence des tambours de la fanfare militaire, des fresques historiques retraçant les massacres du 8 mai 45 et des chorales d'enfants interprétant des chants patriotiques à faire frissonner les plus austères.

«Lallah Rabi, Rahim Echouhada», la célèbre chanson, qui rappelle les massacres des 45.000 Algériens en 1945, n'a jamais laissé personne insensible. Elle a été chantée encore cette année, pour commémorer la 73e année depuis ces tragiques événements. En plus des nombreuses activités programmées à cet effet, Sétif a tenu à inaugurer son tramway ce même jour. C'était donc hier que la première voiture du tramway a démarré du centre pour se diriger vers l'ouest de la ville, sur une distance de 15 km et traversant 12 stations. «Le tram de Sétif couvrira 22 km et desservira 26 stations dont celle du centre-ville sera baptisée du nom du premier martyr des massacres, Bouzid Saal, et toutes les autres auront, elles aussi, des noms de chahids de la région», a déclaré le ministre des Travaux publics et des Transports. Zaalane a indiqué que «le tram va créer une mobilité certaine pour les Sétifiens, il transportera 5.000 passagers par jour, son parcours a été bien étudié, il passe près de différents édifices administratifs ainsi que par plusieurs quartiers d'habitations, c'est un grand acquis pour Sétif».

Le ministre de l'Intérieur a précisé, par ailleurs, que «le projet de l'extension de l'aéroport de Sétif est acquis, en attendant l'extension de la piste d'atterrissage qui va passer de 1.900 à 3.200». Nouredine Bedoui a aussi expliqué la nécessité de la mise en place de vidéosurveillance pour lutter particulièrement contre la violence dans les stades. «Il faudrait d'abord expliquer de la manière la plus sereine, la plus responsable, cette nécessité des caméras de surveillance», a-t-il noté en soulignant que «nous sommes l'Etat, notre priorité, c'est la sécurité et la sérénité de nos concitoyens, il faudrait que les citoyens algériens comprennent que ces dispositifs de vidéosurveillance que nous avons mis aujourd'hui en service à Sétif mais qui existent à Alger, à Constantine, Oran, Annaba, l'ont été parce que notre objectif dans une première phase est que l'ensemble des chefs-lieux de wilaya en soient dotés, nous devons le réaliser progressivement».

La surveillance dans le respect des droits des citoyens

Le ministre enchaîne sur le sujet en précisant que «le citoyen se pose la question de l'opportunité et du respect de ses droits à cet effet, je dis à nos concitoyens que leurs droits sont consacrés constitutionnellement, ce sont des mécanismes qui sont à base de technologies de la communication et de l'information, qui sont utilisés à travers le monde, et que nous sommes en train de mettre en place en Algérie». Il affirme alors que «cette vidéosurveillance sera installée au niveau de nos stades, vu ce que nous sommes en train de vivre comme violence, dans les deux trois mois à venir, nous allons informer sur des mécanismes très fermes en matière de gestion de nos stades, toutes disciplines confondues».

Bedoui estime que «nous vivons une situation qui est inadmissible, nous ancrer les valeurs de notre société et travailler également sur la base des expériences des autres pays qui vivent ces phénomènes de violence dans les stades, comme la Grande-Bretagne, la France et d'autres; chez nous, ce phénomène prend une ampleur qui devient un peu inquiétante, on va dans le cadre d'un mécanisme intersectoriel, gouvernemental, travailler et accélérer le volet réglementaire, mettre en place des mécanismes matériels au niveau des établissements, d'autres de formation, et des mécanismes avec le ministère de la Jeunesse et des Sports, et des fédérations toutes disciplines confondues». Le ministre fait savoir par ailleurs que «les programmes quinquennaux décidés par le président sont en train d'être matérialisés, le citoyen à travers tout le pays bénéficie du gaz, de l'eau, du logement, du tramway, d'infrastructures de base, nous sommes dans un dynamique extraordinaire, en plus de celle de la réconciliation nationale, la paix et de la stabilité, nous inculquons aujourd'hui des valeurs de développement qui nous laissent aujourd'hui en tant qu'autorités publiques, accompagner le citoyen et lui assurer ses besoins sociaux». Il note que «les aspects sociaux sont consacrés par la Constitution, et par les instructions et les orientations du président, le message que nous voulons faire parvenir au citoyen algérien de toutes catégories est qu'on ne mettra pas fin à cet accompagnement, à ce soutien. (..) Nous continuerons cette dynamique à un rythme plus soutenu pour des résultats plus importants à Sétif et dans tout le pays. Je dis aux Sétifiens qu'ils ne savent peut-être pas que la décision de réaliser ce tramway a été prise par le président de la République après qu'il ait entendu certaines spéculations de certaines parties extrémistes ici à Sétif qui n'y croyaient pas, le président a pris la décision de le faire réaliser à Sétif et en même temps à Sidi Bel-Abbès. Les grands transferts d'AEP ont aussi été décidés par le président pendant les consultations qu'il avait menées en personne durant les mois de Ramadhan.

Certains n'y croyaient pas, certains en souriaient, mais aujourd'hui il y a du concret, nous continuerons à réaliser ce dont a besoin le citoyen algérien. C'est la philosophie de Bouteflika pour laquelle nous œuvrons, nous sommes ses soldats pour la réaliser».

Le déni de reconnaissance aux martyrs du 8 mai 45

Le ministre de l'Intérieur a tenu ces propos aux journalistes dans le salon d'honneur de l'aéroport de Sétif, à quelques minutes de son retour sur Alger en même temps que les ministres des Travaux publics et des Ressources en eau. La délégation officielle avait assisté aux festivités de la commémoration des massacres perpétrés par le colonisateur français le mardi 8 mai 1945. Hier, mardi, la grande rue du centre de Sétif, baptisée de la même date, grouillait de monde venu assister au dépôt de gerbe de fleurs à la mémoire des 45.000 martyrs. La France en cette date-là fêtait la victoire des alliés sur l'Allemagne hitlérienne.

Il y a donc 73 ans, jour pour jour, que 45.000 Algériens ont été tués de sang-froid par l'armée coloniale française. Au-delà du fait que chaque année, ils ont droit à une gerbe de fleurs, à la fatiha et à l'hymne national, ces martyrs attendent toujours d'avoir le statut de chahid. Morts pourtant pour la patrie et pour l'indépendance après s'être révoltés contre le colonialisme français, les 45.000 martyrs ne sont pas considérés comme des chahids, du moins conformément à la loi. En effet, selon la loi 99-07 du 5 avril 1999, n'est chahid que celui qui a été moudjahid en participant à la Guerre de libération nationale sous la bannière du FLN et qui est tombé au champ d'honneur entre le 1er novembre 1954 et le 5 juillet 1962. Ses articles 5 et 10, l'un complétant l'autre, le stipulent clairement. Les autres, tous les autres Algériens qui se sont révoltés contre le colonisateur français et en sont morts avant 54 ont à peine droit aux prières des autorités publiques. Déjà écrit dans l'édition du 7 mai 2015 sous la plume de Yazid Dib (Autrement vu), le déni à ce jour du statut de chahid à ces martyrs doit peser lourdement sur les consciences de ceux qui se sont accaparés la Guerre de libération nationale en s'érigeant en «maître» des lieux libérés, des sacrifices consentis, du courage prouvé et de l'indépendance tout entière de l'Algérie. Notons que la loi indiquée a été élaborée par l'ONM (Organisation nationale des moudjahidine). Elle ne peut être ni amendée ni révisée?