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Recherche scientifique: Le marché ne fait pas confiance au produit local

par Yazid Alilat

La recherche scientifique «est à la traîne en Algérie et le produit de cette recherche n'est pas également valorisé». C'est un constat amer qu'a fait hier lors d'une intervention à la radio nationale M.Abdelhafid Aourag, directeur général de la recherche scientifique au ministère de l'Enseignement supérieur. La recherche scientifique en Algérie «n'arrive pas à décoller», estime t-il, indiquant que «nous sortons d'une campagne d'évaluation nationale». Même si, a-t-il affirmé, «nous avons réussi à faire des bonds prometteurs, il y a une phase qu'on n'arrive pas à mobiliser», car «cela nécessite une coordination globale et une prise de décision importante pour valoriser le produit de la recherche».

Pour M. Aourag, «notre souci aujourd'hui est qu'on arrive à développer des systèmes, des solutions, mais qui ne sont pas prises en compte par les autres secteurs». «La recherche scientifique en Algérie n'est pas visible de l'extérieur». «Même si nous avons deux chercheurs de Sidi Bel-Abbès dans le top 1000 des plus brillants chercheurs dans le monde, on n'arrive pas à s'imposer à l'échelle nationale, car il n'y a pas de confiance dans le produit de la recherche algérienne», a-t-il affirmé, avant de souligner que «le problème est là. Il faut, a-t-il dit, que le produit de la recherche soit valorisé à l'échelle nationale». En fait, estime-t-il, «nous sommes pris dans le piège de l'absence de la multisectorialité de la recherche dans les autres secteurs par manque de coordination» et «nous ne pouvons pas aujourd'hui faire de la coordination entre les secteurs».

Pour le DG de la recherche scientifique, »le blocage est là, car on n'arrive pas à mettre en valeur le produit de la recherche nationale, à le mettre sur le marché». L'autre problème de la recherche scientifique en Algérie est que «les produits développés localement ne sont pas homologués en Algérie, car il n'y a pas de législation autorisant les essais, cela n'existe pas, comme l'homologation et la certification des produits de la recherche». Il faudrait ainsi non seulement qu»'il y ait des structures qui prennent en charge ces produits de la recherche», mais que «la recherche scientifique doit être une priorité pour tous les secteurs économiques». Les centres de recherche ont réalisé par ailleurs un chiffre d'affaires d'un milliard de dinars en prestations de services par les chercheurs algériens.

Selon M. Aourag, il s'agit dès lors de «voir comment valoriser le produit de la recherche scientifique», qui sera, a-t-il annoncé, au menu d'un prochain conseil de gouvernement. Il a expliqué en outre que «nous avons des compétences, des produits, un savoir-faire, et il faut juste capitaliser ce savoir-faire», soulignant la mise en place au sein des grandes entreprises de la recherche, notamment à Sonelgaz qui a adopté le statut de chercheur, alors que «Sonatrach et l'Enie de Sid Bel-Abbès sont dans cette voie».

Par ailleurs, il a indiqué que sur les 1.400 laboratoires et centres de recherche, «nous avons constaté que 400 d'entre eux ont un bilan négatif, et donc doivent disparaitre». Concernant le cas du CREAD, où des chercheurs auraient été remerciés, d'autres envoyés en retraite, le DG de la recherche scientifique au MESRS a expliqué que «nous n'avons pas déstructuré les centres de recherche, nous n'avons pas mis en retraite les gens du CREAD (...) on a demandé aux gens de libérer les bureaux, car ils sont des enseignants chercheurs. On ne les a pas chassés, et on n'a pas rompu le contrat de travail». Sur l'avenir des 400 laboratoires et centres de recherche défaillants, M. Aourag a indiqué que «nous ne finançons plus la recherche scientifique que par rapport à des objectifs. Nous finançons les projets à impact socioéconomique, et on ne peut plus faire de la socialisation de la recherche scientifique. Nous encourageons l'excellence». Enfin, sur le phénomène de la fuite des cerveaux, il a affirmé qu'»aujourd'hui, il n'y a pas de saignée au niveau de centres de recherche, mais un retour des chercheurs. Cette fuite massive de cerveaux n'existe plus, et nous avons stabilisé les chercheurs dans leurs lieux de travail», alors que pour l'émigration sélective, il a indiqué que «ce sont tous les pays dans le monde qui la font pour développer leurs économies».