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Tébessa: Quand la conjoncture impose son diktat

par Ali Chabana

Le budget familial fortement éreinté, les chefs de famille font dans la parcimonie et procèdent avec ce qu'ils ont mis de côté. Politique d'austérité oblige, le consommateur cherche donc à limiter les dépenses, pas par gaieté de cœur, mais c'est plutôt la conjoncture qui impose son diktat. Les consommations et dépenses sont ramenées au strict nécessaire et cela se fait ressentir. Les augmentations sauvages, aveugles et incontrôlées de la plupart des produits de large consommation, ainsi que celles de certains services dont le transport font adopter à notre consommateur, le dindon de la farce, une posture de celui qui courbe l'échine lorsqu'il sent se lever un vent fort et tourbillonnant ! C'est le cas de ce cadre moyen qui, avec son salaire, n'arrive plus à boucler les fins de mois sans s'endetter. «Avec ce que je gagne actuellement, il m'est difficile de satisfaire aux besoins d'une famille de 4 personnes, aussi je fais de l'acrobatie périlleuse pour limiter les dégâts et ne pas me retrouver, en fin de compte, au bout du rouleau à cause des créances cumulées», dit-il. Faites une virée au marché de la friperie usagée et vous constatez de vous-mêmes que la réalité des gens est tout autre. L'habillement de la famille grande et petite se fait de là. On n'hésite plus à venir se procurer quelques vêtements à des prix abordables. Une femme d'un certain âge farfouille dans un tas de chaussures pour enfants. «Oui, je suis veuve avec trois enfants à ma charge et c'est ce marché aux puces qui me vient en aide», dit-elle. A ses côtés, un monsieur intervient: «Peu importe le nif lorsqu'il s'agit de survie». Lui aussi est parmi les personnes fauchées de plein fouet par une crise que certains veulent à tout prix cacher ou minimiser. Les étals sont bien garnis, mais faute d'un pouvoir d'achat en dégringolade et une monnaie nationale au plus bas, pas de quoi encourager à consommer. « Il est de plus en plus ardu de demander aux citoyens de rationaliser leurs dépenses, alors, leur argent ne leur permet plus de garder leurs têtes hors de l'eau », une réflexion d'un autre salarié au bord de l'asphyxie. Ammi Ahmed est de ces habitués des marchés d'opportunités les moins coûteuses, il y vient chaque jour dénicher quelques occasions afin de les revendre et ainsi s'offrir quelques dinars de plus: «Je viens de me procurer quelques objets de dinanderie pour un client d'une autre ville. C'est plutôt payant pour un vieux comme moi».

Nos voisins tunisiens, eux, ne se font pas du souci, tant que leur dinar national trouve preneur sur le marché parallèle, sa valeur se maintient et donc donne l'occasion aux visiteurs tunisiens, qui franchissent les frontières, de faire des emplettes dans les souks et boutiques des localités. Un va-et-vient rapide et la caisse arrière des véhicules est pleine de tous les produits qu'ils ne trouvent pas chez eux ou à des prix élevés (de la quincaillerie, des denrées alimentaires, certains médicaments génériques ou encore de l'électroménager). Nos commerçants font les yeux doux à une clientèle quasiment fidèle et les restaurateurs et les transporteurs font de même. Quant à nos concitoyens, ils se donnent quelques tracas sur la suite des événements d'une année 2018 qui, selon les prévisions, s'avère aussi compliquée que les précédentes.