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Au fil... des jours - Communication politique : nouvelles du front ! (2ème partie)

par Belkacem Ahcene-Djaballah

Mardi 13 février 2018 :

L'ancien président français Nicolas Sarkozy a confié qu'il aurait «aimé naître en Afrique du Nord», faisant allusion à l'Algérie. Il a fait cette déclaration en parlant de l'écrivain Albert Camus. Sarkozy s'exprimait à l'émission littéraire «Livres & Vous», de la Chaîne parlementaire «LCP». L'ancien président des Républicains a évoqué, non sans passion, les plages d'Alger et les villes du Maghreb, «blanches» et «écrasées par le soleil».

Ne pas tomber dans le piège ! Car, en fait, il ne parlait que de l'Algérie coloniale, associée au soleil camusien (une fascination ancienne...et il avait envisagé de transférer les cendres de Camus au Panthéon....en hommage à l'écrivain certes, mais bien plus à l'Algérie française). Son animosité est connue. Elle se résume dans cette formule à son ancien MAE, B. Kouchner, lors d'une visite d'Etat en Algérie : «T'es sérieux, Bernard ! Avec tout ce qu'on leur a laissé et tu veux en plus qu'on s'excuse !»

Adepte forcené des coups politiques et du marketing mémoriel et de l'instrumentalisation cynique des drames, sa vénalité est proverbiale. A noter que Sarkozy a intégré dernièrement, le conseil d'administration d'Accor, premier groupe hôtelier, au monde et premier investisseur privé français en Algérie. Implanté à travers ses enseignes à Alger, Oran, Constantine et Tlemcen, Accor est aussi partenaire du groupe Mehri et voit, dans le potentiel touristique algérien (notamment au Sud), un vecteur de croissance inégalé dans cette partie du monde.

Mercredi 14 février 2018 :

Selon un récent rapport national relatif au blanchiment d'argent et au financement du terrorisme, établi par la Commission tunisienne des analyses financières, 46% des personnes impliquées, dans les affaires de terrorisme, sont des cadres exerçant dans les structures étatiques, rapporte «l'Economiste Maghrebin».

Tandis que 3% des terroristes sont des chômeurs, 8% sont des élèves ou des étudiants, 3% sont des enseignants et 8% exercent dans la fonction libérale.

Selon le journal tunisien, ces nouvelles données, beaucoup plus précises, tendent à battre en brèche la thèse selon laquelle le terrorisme serait motivé par des raisons matérielles, eu égard à la présence des cadres de l'Etat, dans les affaires de terrorisme.

Par ailleurs, la faible présence des forces armées (1%) dans le terrorisme, confirme que les forces armées tunisiennes n'ont pas été infiltrées par les terroristes.

On voit que le journal (ou son analyste) a une haute impression de la morale de «cadres de l'Etat», mettant au crédit de leur «engagement» le fait que, pour eux, la «matérielle» ne compte pas beaucoup et l'enporte sur la «conviction. Il faudrait aller un peu plus loin dans l'analyse des comportements pour, peut-être, découvrir que le «terrorisme» n'est qu'un alibi pour s'en mettre, au passage, plein les poches

Jeudi 15 février 2018 :

C'est officiel, Jacob Zuma n'est plus à la tête de l'Afrique du Sud. Le très controversé président a, en effet, annoncé mercredi 14 février, dans la soirée sa démission «avec effet immédiat», se pliant aux ordres de son parti, le Congrès national africain (ANC). «J'ai décidé de démissionner du poste de président de la République avec effet immédiat, même si je suis en désaccord avec la direction de mon organisation», a déclaré M. Zuma, lors d'une allocution retransmise en direct à la télévision. «Je dois accepter que mon parti et mes compatriotes veuillent me renvoyer», a-t-il ajouté, assurant avoir «toujours été un membre discipliné de l'ANC». Après des semaines de tractations et de réunions, le parti au pouvoir avait exigé, mardi 13 février, la démission du Président Zuma, empêtré dans des scandales de corruption. Faute d'une réponse de sa part, le parti avait décidé mercredi à la mi-journée de le forcer à quitter le pouvoir en annonçant le vote, dès jeudi 15 février, d'une motion de défiance dont l'issue ne faisait aucun doute. «J'ai été contraint de démissionner en raison de la motion de défiance», a expliqué le président lors de son allocution.

 «Nous nous réjouissons avec tous les Sud-Africains que la longue et douloureuse décennie de la présidence Zuma arrive enfin à son terme», s'est félicité Mmusi Maimane, le chef de l'Alliance démocratique (DA), le principal parti d'opposition. «M. Zuma a fait beaucoup de mal à notre pays (...) sous son règne, la corruption a fleuri au point de presque détruire notre pays, a-t-il ajouté. Ce sera pour toujours son honteux héritage.» Coïncidence ou non, la police a mené, mercredi, sa première opération contre la sulfureuse et jusque-là intouchable famille Gupta, au cœur des scandales qui impliquent le président. Cinq personnes ont été arrêtées et le luxueux domicile de la fratrie, à Johannesburg, a été perquisitionné dans le cadre de l'enquête sur les détournements de fonds publics, a indiqué l'unité d'élite de la police sud-africaine (Hawks). Tous devraient être présentés devant un tribunal. Après Mugabe, Zuma. Au suivant !

Vendredi 16 février 2018 :

Une étude du site web fanzone-im.dz (préparée par Younes Saadi pour «Interface Médias», éditrice de «Maghreb Emergent» et de «Radio M».) sur les orientations religieuses des Algériens,à travers les réseaux sociaux, a conclu qu'ils «sont profondément attachés à la notoriété de certains prédicateurs islamiques de nationalités égyptienne et saoudienne». Ainsi, à fin-janvier, «plus de cinq millions d'Algériens suivent la page de Amr Khaled» (pas étonnant : indépendant, modeste, sachant parler simplement à la «foule solitaire», en salle ou sur Youtube, encore jeune, pas mal de sa personne... comme hier Abdelhalim Hafez ou Farid El Atrache...). Les Egyptiens sont arrivés en tête avec plus de 9 millions de fans, suivis, directement, par les Algériens, les Marocains, plus de 3.800.000, et les Irakiens avec 1.700.000 fans. La présence religieuse algérienne est pratiquement inexistante, à l'exception de la page de l'Association des savants musulmans.

Les données publiées notent l'absence de prédicateurs algériens sur Facebook, exceptée une page appelée «Les fatwas de cheikh Mohammed Ferkous» (le «représentant» des FM en Algérie) et suivie par 123.644 comptes, dont la majorité est constituée, probablement, d'Algériens. Chacun, et l'analyste en premier, y va de son couplet : manque de contenus, faiblesse des contenus, absence de grande figure religieuse influente et connue dans le monde musulman, absence de stratégie de com' institutionnelle religieuse, vide spirituel, surveillance trop stricte de tout ce qui est religieux, influence des chaînes de télé satellitaires, émergence du religieux sur le plan international...

Phénomène inquiétant ? Pas si sûr et cela nous rappelle la «vague télévisuelle» fin des années 80 ? début des années 90....puis la «vague internet» des années 2000... puis la «vague actuelle des Smartphones, de l'Internet mobile et des réseaux sociaux»... avec ses plus de 21 millions de facebookers, des années 2010. En fait, une société qui évolue avec son temps (aujourd'hui, un temps hyper-technologique), et il faut, aussi et surtout, s'interroger sur les dizaines de millions d'Algériens, 20 ? 30 ? (bien plus jeunes que les 5 millions, ci-dessus évoqués dont beaucoup ont certainement un âge avancé, c'est-à-dire plus de 30 ans ) aux orientations bien éloignées (parfois bien trop) de la religion... et qui sont l'avenir réel. Il est vrai que les «vieux» sont bien plus accros, plus entêtés, moins tolérants, plus violents même (les enfants du Fis ?)... mais avec bien moins de souffle. Heureusement ?

Dimanche 18 février 2018 :

Dans une récente enquête sur le financement des campagnes présidentielles, dans plusieurs pays occidentaux, le journal ?Acharq Al-Awsat' (quotidien arabophone paraissant à Londres) vient de faire une révélation de taille. La Libye de Kadhafi (avec pour intermédiaire Seïf El-Islam Kadhafi) a octroyé la somme de 5 millions de dollars à un des deux candidats à la Maison-Blanche, en 2004. Les sources libyennes, ne disent, néanmoins, pas auquel des deux candidats, Georges W. Bush ou John Kerry, cette somme était destinée. La contrepartie : les Etats-Unis retireraient la Libye de la liste noire des pays qui soutiennent le terrorisme au cas où Tripoli consenterait un apport financier en faveur du candidat en question.

Un document signé par l'ancien patron des services secrets libyens, Moussa Koussa, relaterait les détails de cette transaction. Le document, daté du 15 septembre 2004, indiquerait qu'un officier du renseignement libyen devait être désigné à la tête de cette entité qui devait servir de couverture à ce financement secret.

Le candidat à l'élection présidentielle américaine et ses interlocuteurs libyens se sont rencontrés dans l'Ohio, aux Etats-Unis, et sont convenus de transférerl'argent par le biais de l'intermédiaire palestinien, dans un pays tiers. La somme de 5 millions de dollars a été transférée, dans un compte à l'étranger, au profit du candidat en question. Les sources libyennes, ne disent néanmoins pas auquel des deux candidats, Georges W. Bush ou John Kerry, cette somme était destinée. Pour Sarkozy, on sait !

Lundi 19 février 2018 :

Dans un entretien à ?La Provence', lundi 19 février, le comédien français Gérard Depardieu annonce qu'il va «bientôt habiter... comme Eric Cantona d'ailleurs, qui habite à Oran (en fait, Cantona, c'est au Portugal) . «J'ai choisi Alger, en Algérie. C'est un pays splendide», a déclaré l'acteur de la série «Marseille» dont la saison 2 paraîtra, vendredi, sur Netflix.

Gérard Depardieu était interrogé sur ses propos tenus le 13 février sur le plateau de l'émission ?Quotidien', sur TMC. Le comédien avait alors déclaré que «les Algériens ne pourraient pas se comporter en Algérie comme ils le font à Marseille». «Cela a peut-être été mal compris», a réagi Gérard Depardieu auprès de ?La Provence'. «Ce que j'ai voulu dire, c'est que les Algériens de Marseille n'oseraient pas dire le quart de ce qu'ils disent, en Algérie. Le sens du respect se perd. Il est beaucoup plus marqué là-bas», a-t-il ajouté.

L'acteur s' était installé, en Belgique (Néchin) en 2012. Son exil qualifié de fiscal par les «amis qui lui veulent du bien» ( à l'époque les socialistes) avait, à l'époque, vivement fait réagir.Le Premier ministre de l'époque, Jean-Marc Ayrault, avait jugé «assez minable» son départ. Les militants de LRM sont bien plus tolérants et même compréhensifs... car peut-être, parce que plus jeunes et plus ouverts, et ne se sont pas hasardé à émettre des «fatwas»... à l'image de ce qui est de fait contre nos «harragas». Bienvenue donc à Gérard Depardieu et bonne route pour ses investissements (dans le vignoble du côté de l'ouest du pays ) et son apport au tourisme cultuel ( c'est un grand fan de Saint-Agustin, de la Basilique et de la ville de Annaba...)

Mercredi 21 février 2018 :

L' «Affaire Wauquiez» (déclarations outrançières du leader du parti LR devant des étudiants d'une Ecole de commerce : contre Macron, Fillon, Sarkozy, Merkel, le Medef, la CGPME, Juppé...) ) commence à avoir de sérieux effets sur la vie politique française,. Pour les spéciastes de la com' politique, elle est, aussi, le signe d'un profond changement du langage et de la communication politique. En alternant le «bullshit» sur les plateaux TV et le «trash talk» loin des médias parisiens, Laurent Wauquiez fait la démonstration qu'il inscrit ses pas dans ceux de la droite américaine. «D'aboyer en permanence, de sauter à la gorge, de démolir l'autre, c'est une stratégie électorale, (il ne) faut pas s'y tromper», a expliqué Xavier Bertrand, dimanche, sur BFMTV. Et d'ajouter: «C'est du Trump, c'est pire que Trump. Certains veulent «trumpiser» la vie politique française.»

Pour Christian Salmon, membre du Centre de recherches sur les arts et le langage (EHESS/CNRS), «lorsque la parole politique et le débat public ont perdu toute crédibilité, la seule manière d'exister, sur cette planète du discrédit, c'est d'enchaîner les provocations et les transgressions. Quoi de plus transgressif que de dire à des étudiants: «vous savez les dés sont pipés, l'avant-scène politique, c'est l'univers du mensonge, une fake politic et moi je vais vous dire la vérité nue, sans détours, la vérité trash». Fake news, alternative facts et trash talks sont les nouveaux paramètres de la scène du discrédit politique.»

Mais il faut se garder de personnaliser des phénomènes qui sont devenus «systémiques», prévient Christian Salmon, spécialiste du langage politique. Le storytelling, qui a substitué le récit à l'action, ne suffit plus. On passe, désormais, de la diversion à la dévoration de l'attention, via la «performance narrative». «L'Homo politicus est passé de l'incarnation à son exhibition, puis de son exhibition à sa carnavalisation», dit aussi l'auteur de ?la Cérémonie cannibale' (éd. Fayard).

Aux États-Unis, le «Carnaval trumpiste» est une véritable stratégie politique. «Au premier rang, il y a le clown, le bonimenteur, capable de capter l'attention des exclus du système qu'il divertit et venge par ses rodomontades, ses grossièretés et ses tweets compulsifs?Mais derrière lui s'activent les déconstructeurs de l'État administratif. Au milieu du scandale incessant, l'État fédéral qui est détricoté, département par département, règlement après règlement», analyse Christian Salmon.

Laurent Wauquiez n'a pas encore le pouvoir. Mais, comme Trump, il use désormais de l'«hyperbole véridique», à savoir l'utilisation de l'exagération comme une forme efficace de promotion. «Dans la ruche des réseaux sociaux, c'est l'?hyperbole vraie? qui règle les échanges, avec ses bulles informationnelles indépendantes, les unes des autres, qui créent une sorte de huis clos informationnel, propice aux rumeurs les plus folles, au complotisme et au mensonge. Trump s'adresse via Twitter et Facebook, à ses petites républiques du ressentiment qu'il réussit à fédérer en une masse survoltée. Wauquiez aspire aussi à ce rôle», juge Christian Salmon. Il a un espace non négligeable pour y parvenir, dans un pays où le débat politique est, de plus en plus, réduit à une succession de réactions en chaîne à des phrases chocs, de «punchlines» et de révélations accessoires. Une sorte de parapolitique où le débat se limite à l'analyse de la mise en scène des politiques et à la vérification de fausses nouvelles.

A suivre