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Cancer: Produits nocifs importés et pollution à l'index

par Yazid Alilat

Le cancer est un phénomène mondial, il affecte tous les pays dans le monde, et pas seulement l'Algérie, a souligné hier dimanche le Pr Mustapha Khiati, président de la Forem, qui a affirmé que la «situation est catastrophique» dans le secteur de la Santé. Il a expliqué dans une intervention à la radio nationale à l'occasion de la «Journée mondiale contre le cancer» que cette pathologie est due particulièrement, selon des indicateurs de l'OMS, au vieillissement de la population dont 9% en Algérie, aux nouvelles habitudes alimentaires et la pollution de l'environnement. «Ce sont des facteurs répertoriés par l'OMS et sont présents en force en Algérie», a-t-il indiqué, relevant que «le cancer est la seconde ou la troisième cause de la mortalité en Algérie».

Pour autant, il estime qu'il y a une «évolution dans la prise en charge du malade et une meilleure organisation actuelle par rapport à la situation d'il y a dix ans». «Le programme algérien de prise en charge de la maladie est important et ambitieux», relève le Pr Khiati pour qui «tous les secteurs doivent soutenir ce programme national de lutte contre le cancer». Il a reconnu cependant qu'il existe «des problèmes dans l'application» de ce programme. Initié par le président Bouteflika, le plan cancer algérien est un vaste programme étalé sur plusieurs années. Le Plan anti-cancer 2015-2019, qui devait entrer en vigueur en 2015, n'a été activé qu'au mois d'octobre 2016, selon le professeur Messaoud Zitouni, chargé par le Président Bouteflika de le piloter. «Le Plan national anti-cancer 2015-2019 entre dans sa mise en œuvre», et cette phase est la plus cruciale, car c'est celle de son application, et elle est en très bonne voie, vu l'engagement des plus hautes autorités de l'Etat et leur intérêt pour la lutte contre le cancer», avait alors souligné le Pr Zitouni au démarrage de ce programme au mois d'octobre 2016.

En Algérie, les experts estiment que le nombre de cas de cancer est en augmentation et va au-delà des 48.000 nouveaux cas, chaque année, avec une prévalence du cancer du sein (10.000) suivi par le cancer du colon (4.000) et celui du poumon (3.500) et de la prostate. Par ailleurs, le Pr Khiati estime que les nouvelles habitudes alimentaires influent énormément dans les cas d'apparition du cancer en Algérie, relevant qu»'il y des importations de beaucoup de produits alimentaires préparés et sont porteurs d'éléments nutritifs nocifs et potentiellement cancérigènes, et qui ne sont pas mentionnés sur les étiquettes de ces produits». «En Algérie, on n'est pas regardant sur cet aspect», déplore-t-il, avant de souligner le manque de laboratoires d'analyse des produits alimentaires pour «déterminer les composants nocifs et cancérigènes des produits alimentaires importés».

En outre, il place la pollution de l'environnement comme un facteur déclenchant du cancer, en particulier les émanations de certains carburants, comme le diésel, alors qu'il n'y a pas de politique alternative, selon lui, «pour supprimer le mazout comme carburant, qui est polluant et nocif». Le Pr Khiati cite également l'amiante avec laquelle beaucoup d'écoles ont été construites et «il n'y a pas de programme à long terme pour supprimer l'amiante, notamment dans la construction des écoles», déplore-t-il. Le Pr Khiati souligne également l'énorme retard dans la mise en marche des centres anticancéreux, prévus par le plan national anti-cancer. «Il y a des retards dans leur mise en marche, comme ceux de Tiaret, Tlemcen. Il y en a 27 centres, mais qui ne sont pas tous opérationnels», a-t-il relevé, soulignant qu»'il y a un retard dans leur mise en fonction, ce qui prive les malades de prise en charge pour traiter cette maladie».

Cependant, le gros problème dans la prise en charge des malades du cancer dans les nouveaux centres est le manque d'équipes médicales spécialisées. «Il y a, a-t-il dit, le problème de la préparation des équipes médicales pour le traitement spécifique du cancer, et il n'y a pas de politique de formation (d'équipes médicales) bien avant la construction de ces centres anticancéreux». «Car, selon lui, il est important que ces équipes médicales soient formées, ici ou à l'étranger» et» nous allons pâtir à l'avenir du manque de ces équipes médicales, capables de faire fonctionner le matériel médical anticancéreux». «C'est une maladie lourde qui nécessite autant des équipes médicales bien formées que l'utilisation du matériel médical spécifique».

Sur le dossier de l'alimentation des enfants, le Pr Khiati a notamment déploré la consommation de plus en plus importante par les enfants de produits alimentaires industriels nocifs et «beaucoup de produits servant à la fabrication de ces «encas» comme certains additifs et les colorants, qui sont cancérigènes».

Sur le front de la lutte contre le tabagisme, il a en particulier préconisé une hausse des prix des cigarettes de plus de 50%, avant de relever que la loi sur l'interdiction de fumer dans les lieux publics n'est pas respectée par «ceux-là mêmes affectés pour son observation». «Le tabagisme est le premier facteur déclenchant du cancer», a-t-il rappelé, avant de souligner qu»il y a une hausse importante de la consommation de tabac chez les femmes dans les centres urbains, dont les étudiantes». «Une femme sur 5 fume dans certaines régions».

Enfin, sur la Santé en Algérie, le Pr Khiati a estimé qu'elle est «malade avec l'accumulation de problèmes durant ces dernières années». «Les choses sont catastrophiques», ajoute-t-il, et «la première victime de cette situation est le citoyen avec ces grèves, le manque de médicaments, la désorganisation» dans ce secteur.