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Holocauste contre holocauste (1ère partie)

par Houat Mohamed

Le Juif et le Palestinien sont deux cousins ennemis aux destins diamétralement opposés, qui s'entretuent pour un petit lopin de terre, la Palestine.

Le Juif : « Ma mémoire est saturée. Elle risque d'exploser. Elle n'en peut plus d'enregistrer nos interminables malheurs. Deux mille ans d'exode. Deux mille ans de déchirement. Deux mille ans de martyre. C'est un record inégalable. Nul être humain ne peut vivre dans un tel amas de souffrances. C'est sans doute le revers de notre destinée de peuple élu. Dieu a voulu nous éprouver. Au fil du temps, et au prix de sacrifices colossaux, nous avons surmonté les épreuves les plus cruelles. Errance, ghettoïsation, brimades, persécutions, pogroms, holocauste, shoah. De ces supplices si raffinés qu'il a fallu inventer des mots nouveaux pour les nommer nous avons gardé des séquelles indélébiles. A l'issue de ce calvaire indéfini, Dieu nous a enfin permis de retrouver la paix au sein de la mère patrie reconquise.

Je suis arrivé en Palestine en 1948, juste avant la déclaration d'indépendance d'Israël. A son contact, mes douleurs se sont brusquement apaisées. Nous avons enfin regagné le bercail après des siècles d'errance. C'était comme une nouvelle naissance. J'étais encore enfant, je n'avais que quinze ans et je portais déjà en moi les traces des blessures de mes aïeuls, dont la Shoah a été la culmination. Jeune écolier à Berlin, j'étais le plus brillant de ma classe, suscitant la jalousie de mes petits camarades allemands, et l'hostilité à peine déguisée de l'institutrice. Qu'un élève juif surpassât par son intelligence les descendants de la race aryenne, était inconcevable, inadmissible. On me renvoya de l'école, ainsi que tous les autres écoliers juifs. J'en gardai un regret amer qui me poursuit à ce jour, car, à cause des évènements qui suivirent, je n'ai jamais pu reprendre mes études. Malgré mon jeune âge, j'étais conscient de ce qui se tramait. Les nazis venaient de prendre le pouvoir. La chasse aux Juifs pouvait commencer. L'étoile jaune les désignait comme des pestiférés, à l'origine de tous les maux de la terre. Haro sur le baudet ! Mon père, physicien de renom, perdit son emploi de professeur à l'université de Berlin. Sans argent, nous vécûmes d'expédients et de l'entraide précieuse de la communauté juive. Puis vint la déportation. Les trains de la mort nous conduisirent à notre destin. Personne n'imaginait ce qui nous attendait. On pensait que les nazis malgré leur cruauté, étaient des gens civilisés. Ils pouvaient avoir de l'animosité, de la haine, mais ils ne pouvaient se transformer, du jour au lendemain, et sans raison apparente, en monstres sanguinaires dénués de toute humanité.

Auschwitz a été le tournant de ma vie, le point de rupture qui a bouleversé mon existence, et qui a vu mon père partir vers la mort, et moi, avec ma mère, vers une autre destinée. De cette déchirure cruelle, ne me reste que l'odeur de crémation des fours. Chaque jour, anxieusement, follement, j'attendais le retour de mon père. Rien ne me consolait de son absence. Je l'imaginais à peine vêtu, transi de froid, affamé, décharné. J'aurais aimé le voir, même agonisant mais je refusais d'admettre qu'il put être brûlé, à quelques centaines de mètres de moi. Je refusais d'admettre que cette fumée sinistre au goût de chair humaine que je respirais, exhalât l'odeur calcinée de mon père.

Ma mère mourut quelque mois plus tard d'une pneumonie. La perte de mes parents me laissa dans un grand désarroi. Amputé de la partie la plus noble de ma chair, j'allais devenir un lambeau voguant au gré des tribulations tragiques de mon peuple. La défaite du nazisme nous apporta un nouvel espoir. Le calvaire avait cessé, mais nous ne pouvions rester dans cette Europe infâme qui nous avait martyrisés. Nos cœurs étaient tournés vers la terre promise où nos frères s'étaient déjà attelés à reprendre possession du pays de nos ancêtres. La résurrection de l'Etat juif était en cours. L'appel était pressant. Il venait du plus profond de nous-mêmes. Il venait de nos prophètes Abraham, Moïse, Josué, David et Salomon. Il nous intimait l'ordre de rejoindre sans délai, la patrie. Malgré mon jeune âge, je répondis à l'appel.

Le 11 juillet 1947, avec quatre mille cinq cents de mes compatriotes, j'embarquai à bord du Président Wardfield à partir du port français de Sète. En pleine mer, le drapeau israélien fut hissé, et le bateau changea de nom : il devint l'Exodus. Près des côtes d'Israël, les perfides Anglais nous attendaient avec leur armada de guerre. Sans considération pour les femmes, les enfants et les centaines de malades qui se trouvaient à bord, ils nous ramenèrent manu militari en Europe, en Allemagne où les souvenirs de la Shoah étaient encore vivaces. Je ne perdis pas courage. La sève de la patrie promise coulait dans mon sang et m'intimait l'ordre de rejoindre au plus vite la terre de mes espérances. Je réussis quelques mois plus tard à regagner mon pays. Ce fut l'apothéose de mes rêves. Des frères que je ne connaissais pas m'adoptèrent. Je réussis rapidement à m'intégrer au sein de ma grande famille Israël. L'errance avait pris fin. J'étais enfin chez moi. Personne désormais n'allait me regarder de travers, m'humilier ou me chasser de la terre de mes ancêtres. Le rêve millénaire venait enfin d'être accompli le jour de la déclaration d'indépendance d'Israël le 14 mai 1948.

Restait un autre défi, aussi important : bâtir le nouveau pays et faire d'Israël un éden, à la mesure de la grandeur de notre nation. Avec enthousiasme, nous nous attelâmes à faire de ce désert aride un jardin luxuriant. Des kibboutzim surgirent de partout. Des profondeurs de la terre aride, jaillit une eau miraculeuse grâce aux innombrables forages de nos audacieux ingénieurs. La sueur de nos fronts a irrigué cette terre qui, non seulement nourrit ses fils, mais leur permet d'exporter les agrumes d'Israël dans le monde entier. Le miracle venait de s'accomplir. Israël avait retrouvé le faste antique.

Mais, comme dans les récits bibliques, des ennemis jaloux de notre réussite, menaçaient notre quiétude. Il était écrit que nous n'allions pas en finir avec les épreuves. Je découvris avec stupéfaction que sur nos territoires vivait une population qui nous déniait le droit de reprendre possession de notre pays. Les Arabes, cette race médiocre vouée à la disparition, utilisèrent même la violence pour contester notre droit imprescriptible à récupérer nos biens spoliés depuis des millénaires. Comment pouvaient-ils ignorer à ce point l'histoire ? N'avaient-ils pas entendu parler des royaumes de David et de Salomon ? S'ils savaient lire, ils verraient que la Bible regorge de récits fabuleux qui magnifient l?épopée du peuple juif. Mais ce sont des peuplades incultes qui ignorent leur propre histoire. Les moyens pacifiques ayant échoué, il fallait les combattre. Très tôt, je m'engageai dans l'une des brigades de la Haganah. Gonflé par un sentiment de vengeance qui me faisait voir ces hordes de bédouins arriérés comme les héritiers de nos bourreaux d'hier, je fis preuve d'un zèle exceptionnel pour exterminer cette vermine et l'extirper de la terre d'Israël. Je le fis sans hésitation, persuadé d'être dans mon droit le plus absolu. J'avais pour moi l'histoire, j'avais pour moi les vestiges irréfutables de l'antique royaume d'Israël, j'avais pour moi la lignée de prophètes illustres qui ont façonné le destin de l'humanité. J'avais pour moi la douleur immémoriale de notre peuple. J'avais pour moi la douleur ultime, la Shoah. Ces Arabes sont décidément têtus. Non contents des raclées historiques que nous leur avions administrées, ils continuent de revendiquer nos terres, ils persistent à réclamer leur souveraineté sur Jérusalem symbole éternel d'Eretz Israël. Ils se présentent comme des victimes, ils osent même comparer la situation des prétendus réfugiés palestiniens aux malheurs endurés par les Juifs. Quel culot ! Ces fuyards n'ont qu'à demander l'aide de leurs frères qui possèdent d'immenses territoires et des richesses inépuisables. Ils peuvent les caser facilement et les combler de milliards de dollars, ces dollars qui, à longueur d'année, sont gaspillés dans les casinos et les orgies.

L'autre jour sur un site internet, des musulmans appelaient à sauver Jérusalem de la judaïsation. Ils parlaient des menaces qui pèsent sur leurs lieux de culte. S'ils ne tenait qu'à moi, ça fait longtemps que je les aurais tous dynamités, leur lieux de culte. Jérusalem capitale éternelle d'Israël doit être purifiée de tout ce qui n'est pas juif. Ils ont La Mecque pour implorer Allah ! Et les Palestiniens qui pullulent comme des rats dans la ville sainte doivent être déplacés chez leurs frères arabes, sinon ils vont nous submerger. La politique de notre gouvernement est vraiment laxiste. Seule une politique de déportation massive est à même de réduire à néant leurs prétentions saugrenues de vouloir partager notre terre. Eretz Israël n'a été promise qu'aux Juifs. Nul autre peuple n'a le droit d'y vivre.

Le président des Etats-Unis vient de signer une décision de transfert de l'ambassade américaine de Tel-Aviv vers Jérusalem. Les autres pays suivront tôt ou tard. Le temps travaille pour nous. Les Arabes sont hors du temps. Ils sont appelés à disparaître ; les Juifs pourront alors reconquérir leurs terres et concrétiser la promesse biblique du grand Israël, s'étendant du Nil jusqu'à l'Euphrate, et même reprendre possession de La Mecque d'où ils ont été chassées par Mahomet, il y a quatorze siècle».

Le Palestiniens : «La création d'Israël a été le plus gros et le plus abject hold-up de l'histoire de l'humanité. Des hordes venues de tous les coins de la planète se sont ruées sur la Palestine pour accaparer nos terre et nous expulser de notre partie.

Dès la fin du dix-neuvième siècle, des Juifs disséminés un peu partout dans le monde avaient conçu le projet de coloniser cette terre, déjà habitée par une population arabe depuis des siècles, sous le prétexte fallacieux de faire revivre le chimérique Etat d'Israël d'il y a deux mille ans, en propageant l'idée que la Palestine était un désert inhabitée. En 1882, les Juifs en Palestine ne représentaient qu'à peine 8% de la population totale environ trois cent vingt mille Arabes contre vingt-cinq mille Juifs) en 1914 ils étaient 85.000 Juifs contre 730.000 Arabes en 1946 après des vagues successives d'immigration, le nombre total de Juifs en Palestine dépassait 600.000 vivants sur environ 7% de la superficie de la terre sainte.

Les Juifs, machiavéliquement intelligents, achetaient les terres aux petits paysans palestiniens ou aux gros propriétaires arabes à des prix défiant toute concurrence. Les terres acquises au nom de l'Agence juive devenaient inaliénables.

Face à cette invasion rampante, les Palestiniens, conscients dès le départ du complot qui se tramait contre eux, mais fortement divisés ne pouvaient rien contre les Juifs très organisés, et jouissant de la complicité de la Grande-Bretagne, mandataire à l'époque de la Palestine, qui réprima les révoltes populaires contre la colonisation juive. Le lobby mondial juif, surtout aux Etats-Unis, a également été un soutien de poids au projet sioniste.

Trois date funeste marquent le processus de ce hold-up unique dans les annales de l'histoire : 29 août 1897, 2 novembre 1917 et 14 mai 1948.

A suivre...