Ils s'appellent Belgacem,
Salah, Lakhdar ou encore Hafsa, Houria.
Ces personnes ont la même particularité, elles sont toutes des sans-abri. Au
soleil levant, ces exclus sortent de leurs tanières et viennent s'exposer aux
rayons réchauffants du soleil à peine franchi
l'horizon. L'un d'eux a pris l'habitude de s'installer près de la muraille
byzantine, de son versant Est, comme pour goûter à la chaleur matinale. Sa
présence ne gêne personne, tant qu'il est occupé à ranger son matelas en
mousse, ses couvertures jetées à même le sol, salies par la poussière durcie.
Ce matin-là, il a ramené avec lui un bol de pois chiches dont la sauce encore
fumante le réconforte; il avala son bouillon, tout en
se mouchant le nez, en jetant de temps à autre un regard furtif aux alentours,
telle une personne traquée. Dès l'entame de la saison hivernale, précoce dans
les villes de l'intérieur du pays, beaucoup de questions viennent à l'esprit de
tout un chacun sur le sort réservé à ces personnes sans-abri. Comment
survivraient-elles au froid des longues nuits ? Qui sont-elles et quel est leur
nombre exact ? Parfois, c'est une femme qu'on rencontre au détour des ruelles
du centre-ville. Le visage bouffi par l'errance et devant le regard méprisant
de certains, la peur d'être agressée tenaille son corps frêle, elle presse le
pas pour aller rejoindre ce qui lui sert de refuge. Le lendemain, elle
réapparaîtra, noircie par la suie d'un feu de fortune, allumé pour se protéger
du gel.
Quelques opérations sont
menées durant l'hiver par les services de police et la Protection civile,
visant à venir en aide à ces exclus de la société. Finalement, on se rend
compte que ces personnes sont seules à affronter la rigueur du temps et
l'insouciance des gens. Et puis, un jour, on apprend que l'un de ces SDF a été
découvert sans vie.