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Conférence de presse du président catalan à Bruxelles: Carles Puigdemont met l'UE face à ses responsabilités

par Bruxelles: M'hammedi Bouzina Med

Carles Puigdemont, président du gouvernement catalan déchu par Madrid, a donné, hier après-midi, à Bruxelles, une conférence de presse par laquelle il met l'UE face à ses responsabilités politiques, dans la crise qui secoue son pays.

Ainsi, comme nous le soulignions lundi dernier, la décision du gouvernement central espagnol de Madrid de suspendre celui autonome de Catalogne et d'organiser de nouvelles élections générales, le 21 décembre prochain, n'est rien d'autre que le report de la crise politique, à la fin de l'année avec, certainement, plus d'intensité. Car rien ne garantit une défaite des «séparatistes» catalans lors de ces élections.

Carles Puigdemont, le président catalan l'a bien compris et a déclaré, lors de la conférence de presse qu'il a donnée, hier, à Bruxelles, en début d'après-midi. «Nous irons à ces élections mais nous voulons des garanties que le gouvernement central de Madrid respectera le résultat issu des urnes» a-t-il déclaré en substance. Par ailleurs, en faisant cette déclaration à Bruxelles, capitale de l'Union européenne, il met l'UE en face de ses responsabilités face à ce qu'il estime être un comportement « anti-démocratique » de l'un de ses membres qu'est le gouvernement espagnol, dans le traitement du résultat du référendum du 1er octobre dernier qui s'est prononcé pour l'indépendance de la Catalogne. Jusqu'en milieu d'après-midi d'hier, l'UE n'a manifesté aucune réaction officielle hormis celle de la tenue d'un Conseil des ministres (des Affaires étrangères) au plus vite, apparemment en début de soirée ou mercredi matin. L'Europe qui a, dans un premier temps, gardé le silence, au jour du référendum du 1er octobre avait déclaré ne reconnaître d'autre interlocuteur que le gouvernement central d'Espagne. Quoique légitime et compréhensible, l'attitude le l'UE traduit, en vérité, un réel embarras des instances de l'UE face à cette crise et surtout n'aide pas à une sortie honorable de cette impasse politique qui frappe l'Espagne et hypothèque sa stabilité.

Pire, la crise espagnole contamine maintenant l'UE qui ne peut plus battre en retraite et laisser les Espagnols gérer seuls ces moments très difficiles. Carles Puigdemont l'a bien compris est n'a pas hésité à le lui rappeler, hier, à Bruxelles. Il est allé jusqu'à dénoncer tout le ridicule de lui avoir prêté l'intention de demander l'asile politique à la Belgique. «Je suis moi et mes collaborateurs à Bruxelles parce que je suis Européen et j'ai le droit de circuler librement dans l'UE» a-t-il répondu, sans oublier de rappeler la menace d'emprisonnement lancée à son encontre ( et ses collaborateur) par Madrid: «Je risque 30 ans de prison - 500 ans au regard du droit espagnol- «a-t-il rappelé. M. Carles Puigdemont n'a pas donné de signes de fuite mais a, en revanche, là encore mis l'UE à l'index pour l'alerter sur ce qu'il estime être une «décision politique et non juridique» de la justice espagnole.

Une telle allusion est chargée de gravité dans ce qu'elle porte comme «atteinte», selon lui, au principe fondamental de la démocratie qu'est la séparation des pouvoirs. Le président catalan est, donc, venu frapper à la porte de l'UE pour l'obliger à s'impliquer dans la crise espagnole et il semble réussir dans sa stratégie politique: l'Europe tiendra bien un Conseil sur cette question. Quant au résultat attendu de cette réunion, il est clair que Carles Puigdemont ne se fait guère d'illusion: l'Europe se «cachera» certainement, derrière la rigueur du droit en rappelant qu'elle n'a qu'un seul interlocuteur en Espagne, le gouvernement de Madrid. Mais le président compte sur l'UE pour garantir la transparence et le respect des élections de décembre. Il sait bien que quelque chose est brisée entre Barcelone et Madrid et que l'électorat séparatiste gagnera des points au vu du traitement, assez dur, par Madrid des séparatistes catalans.

Et si ce ne sera pas pour le 21 décembre prochain, ce sera pour une autre échéance. «Soyez patients et manifestez de manière pacifique votre aspiration à l'indépendance» a-t-il lancé au peuple catalan.