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Des chercheurs universitaires opposés aux 2 nouveaux décrets: «C'est un véritable scandale !»

par Ghania Oukazi

De nombreux chercheurs universitaires ont riposté vigoureusement contre les deux décrets du ministre de l'Enseignement supérieur, le premier organisant la formation et le doctorat sous le LMD et le second amendant la procédure de l'Habilitation dirigée de recherches (HDR).

«C'est un véritable scandale !» s'exclament-ils en réaction aux décisions prises dans ce sens par le ministre de l'Enseignement supérieur et la Recherche scientifique. (Voir ?Le Quotidien d'Oran' du lundi 30 octobre 2017). Ces chercheurs universitaires se disent «outrés par cette dérive politique imposée à l'Université algérienne visant à la clochardiser davantage et affaiblir son encadrement et ses diplômes.» Beaucoup de professeurs de l'EPAU, entre autres, n'ont pas digéré le fait que le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique consacre des décisions que ses prédécesseurs ont rejeté, dans la forme et dans le fonds, au regard de leur impact navrant et négatif sur l'Université. Pour rappel, ces mêmes professeurs de cette Ecole ont fait circuler, il y a quelques années, une pétition contre ce genre de changements concernant le doctorat. «Si, à la rigueur, on pourrait accepter qu'un doctorant puisse soutenir sa thèse sans qu'il ne lui soit exigé, au préalable, de publier un travail de recherche dans une des revues universitaires, reconnues mondialement, on ne peut tolérer que ce même doctorant, deux ou trois ans, après la soutenance de sa thèse, a droit à une habilitation universitaire,» nous disent certains d'entre eux. Une Habilitation dirigée de Recherche (HDR), expliquent-ils, une fois acquise, permet au professeur d'encadrer des travaux de recherche et/ou de diriger des laboratoires de recherche, comment peut-il le faire sans qu'il ait lui-même fait un travail de recherche ? C'est inadmissible !»

Pour rappel, les deux décrets, Abdelkader Hadjar les a fait entériner par le Conseil du gouvernement, du 17 octobre dernier. Notons que les chercheurs universitaires-ministres dans le gouvernement ont réagi avec rigueur à ce fait. Les ministres Nouria Benghebrit de l'Education Nationale, Houda Feraoun des PTIC, Yousef Yousfi de l'Industrie, Mohamed Mebarki de la Formation professionnelle, Pr Hasbellaoui de la Santé, ont tous rejeté ces décrets mais sans résultats. Leur confrère de l'Enseignement supérieur a réussi à les faire passer avec «la bénédiction» du Premier ministre, Ahmed Ouyahia qui les a bien défendus. Les chercheurs-professeurs qui nous ont contactés se demandent «pourquoi Hadjar a-t-il tenu à faire passer des décrets qui rapetissent, encore, du niveau de l'Université algérienne, dans une conjoncture où cette même université a besoin, urgemment, de réformes profondes pour qu'elle puisse se hisser, un tant soit peu, à un rang respectable ?!?» Selon nos sources de la chefferie du gouvernement, le ministre de l'Enseignement supérieur a rétorqué à ces confrères lors du Conseil du gouvernement que «les doctorants veulent être professeurs pour enseigner pas pour faire de la Recherche.» Une réaction qui, disent nos interlocuteurs, «dénote de l'obsolescence d'un système qui se passe de la compétence encore plus de la Recherche.» Aux doctorants qui font valoir le fait qu'ils n'aient pas réussi à faire publier un travail de recherche avant de soutenir leur thèse, les chercheurs universitaires rappellent que «la direction de la Recherche du ministère de l'Enseignement supérieur sait pertinemment qu'«il existe une base de données transdisciplinaire ?Scopus', une base de revues reconnues par la Communauté internationale pour permettre aux universitaires de publier leurs travaux de recherche, il suffit de les solliciter !»

Un nombre important de chercheurs universitaires, toutes disciplines confondues, comptent réagir, énergiquement, les prochains jours contre ces deux décrets et leur application. «Il y va, disent-ils, de l'avenir de l'Université algérienne, du niveau de ses étudiants et des compétences du pays tout entier.»