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Objectif, une école intelligente - Moyen : un Conseil supérieur de l'education nationale (2éme partie)

par Chaib Aïssa-Khaled*

Il est donc tout à fait clair qu'à l'avenir, la gestion de la mission éducative et celle de l'acte pédagogique œuvreront à la formation de ce profil de sortie. Pour ce faire, elles s'inscriront dans cette relation pédagogique qui, non seulement tiendra compte des différences individuelles de chaque élève, (chaque élève véhiculant ses propres préoccupations et ses propres intérêts), mais qui se focalisera, aussi, sur le développement de l'esprit qui saura raisonner logiquement et juger avec méthode en s'organisant autour de six apprentissages fondamentaux :

- apprendre à l'individu à apprendre en vue de s'accommoder des instruments qui lui permettront la compréhension du monde au sein duquel il évolue et pour le bien-être duquel il œuvrera;

- apprendre à l'individu à connaître pour connaître plus en vue de l'initier à perpétuer sa capacité à acquérir des connaissances sans cesse actualisées ;

- apprendre à l'individu à «bien faire», en lui apprenant, non seulement à acquérir un savoir-faire, mais aussi à jouer son rôle de citoyen modernisateur et fédérateur des bonnes volontés. (En acquérant l'aptitude de «bien faire», il se sentira utile à la cité);

- apprendre à l'individu à vivre avec ses semblables, en lui apprenant à coopérer et à participer avec eux à l'aboutissement de toutes les activités humaines au profit du bien-être social. L'objectif est de laminer «le rejet de l'autre» qui s'exprime au nom de la différence. (Il s'agit notamment de promouvoir l'apprentissage du «vouloir vivre ensemble» en incitant l'intérêt à développer la connaissance de «l'autre», de son histoire, de ses traditions, de sa spiritualité) ;

- apprendre à tout un chacun à être, et lui apprendre à développer une plus grande capacité d'autonomie du jugement méthodique et du raisonnement logique, ces deux composantes de la mentalité scientifique-, ce qui renforcera sa responsabilité personnelle dans le tissu collectif) ;

- apprendre aux hommes à transcender leurs dilemmes de façon lucide et honnête pour que surgissent en eux des femmes et des hommes qui sauront gérer la puissance et la complexité des obligations que leur créent les choses de la vie, des femmes et des hommes qui refuseront tout ordre établi qui entretient l'indigence culturelle au profit de l'illusion.

L'un dans l'autre, la fondamentalité du Conseil supérieur de l'Education nationale sera de faire échec à l'échec scolaire. Il considérera cette entreprise comme un facteur de libération, d'émancipation et de progrès, comme une priorité de la nation, le centre même de ses préoccupations. D'où ses missions.

Les missions du Conseil supérieur de l'Education nationale

L'échec scolaire s'étant écumé des années durant, la mutation de la société qui en subit les conséquences, est on ne peut plus éloquente, (la dégradation des mentalités et des comportements dit son nom). Ses repères culturels, pourtant valorisants, usés parce que négligés, elle n'arrive pas à s'amarrer à l'universalité. Elle s'est résignée à admettre que son sort se défasse pour enfin dépérir sous le joug de l'infériorité, de l'humiliation et de la dépendance. Comme condamnée à se mettre en marge du progrès, elle se contente de contempler ce qui se fait sous d'autres cieux.

L'esprit qui sait y est, tout simplement, sommé de vivre caché pour qu'émergent des instincts insolites. Cette réalité a incontestablement imprimé dans le comportement des jeunes, un appauvrissement par dégénérescence si bien qu'affichant une espèce de schizophrénie collective, ils se limitent à survivre à l'intérieur d'eux-mêmes pour y nourrir le mythe «du vivre ailleurs». Emargeant au registre «échec à l'échec scolaire», le Conseil supérieur de l'Education nationale en fera son abcès de fixation.  Il inscrira, à cet effet, dans son agenda, des actions réformatrices, qui seront entreprises dans le sens d'une meilleure prise en charge des facteurs enclenchant la réussite scolaire. (Pour n'en citer que quelques-unes, je répertorie, dans cette étude, quatorze missions).

Première mission: la nécessité de faire échec à l'échec scolaire sera désormais présentée comme une priorité de l'Etat.

L'échec scolaire ne sera plus dissimulé. Le refus de dramatiser l'échec scolaire et l'absence de débat en vue de personnaliser ses causes, d'évaluer ses conséquences, désastreuses du reste, sur les programmes de développement durable et de permettre à la société algérienne d'évoluer dans un climat de certitude, moins culpabilisant et propice à une réussite sociale, ne seront plus de mise. On ne se limitera plus à le théâtraliser en le noyant dans des statistiques hurluberlues. Le souci d'anesthésier les opinions n'aura plus droit de cité.

Deuxième mission: le pilotage de la mission éducative et celui de l'acte pédagogique ne seront plus livrés à la désinvolture de ceux qui en ont la charge. Pour que l'embrayage sur le processus du développement durable, (émanation de ce qui devrait être le développement national autonome), ne soit plus handicapé et s'accomplisse, il importe que la gestion de la mission éducative et celle de l'acte pédagogique ne soient plus confiées à des personnes dont le «faire semblant» est leur seconde nature. (Mégalomane et confondant le bien avec sa volonté ce personnel devenant celui de l'échec recommencé, n'a jamais rien compris à la mission originelle qui devrait être la sienne, structurer une société de savoir et d'action.). Le moyen en sera la mise en place d'une politique éducative et culturelle dont la mission d'éduquer et d'instruire, de former et de qualifier ne sera plus phagocytée par des actions politico-administratives qui s'assignent des buts illusoires et sans portée. Cela signifie que le système éducatif algérien ne devra plus être pensé comme un lieu clos où les élèves, en quête d'accessoires, viennent passer le temps. Nantis désormais d'objectifs clairs et lisibles, l'enseignement qu'il dispensera organisera la pensée autour de la logique et de la méthode. Ceux qui en sortiront, comptabiliseront des compétences générales et qualifications spécialisées. Mieux encore, ils seront dépositaires de culture universelle. Le curriculum, (programmes d'étude, méthodes d'enseignement, rythmes scolaires etc.) qu'il développera, s'investissant dans l'éducation du raisonnement logique et dans celle du jugement méthodique, (ces composantes de la mentalité scientifique), et garantissant contre la promotion de la pensée confuse, il structurera une démarche intellectuelle critique, donc une autonomie intellectuelle.

Démarche intellectuelle critique: exploration, prospection, sélection, abstraction, conception, élaboration.

A ce propos, des appréciations non approximatives, controversées et donc désincarnées des véritables enjeux et défis que l'école devrait relever, seront nécessaires parce que utiles, (cela signifie que les modalités de sélection et d'orientation, accompagneront les efforts et les inclinaisons de chaque élève pour lui permettre de se déterminer de l'intérieur de lui-même et en fonction de ses aptitudes exponentiellement utilisables). La promotion des évaluations, systémique et formative, périodiquement développée, devra donc être de mise.Le souci est d'initier chaque élève ou, à tout le moins, l'inciter à réfléchir à la construction d'une démarche intellectuelle prospective. Pour ce faire, le capital cognitif qu'il comptabilisera devra lui permettre de distiller cette culture opérationnelle appelée à contribuer à l'éducation de son caractère et de son comportement et à l'enrichissement de sa personnalité. (Notons, au passage, que l'enrichissement de la personnalité n'a jamais été consacré).

A Suivre

*Directeur départemental de l'Education - Ancien professeur-chercheur INRE