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Collectivités locales: Ces poubelles qui font courir

par Houari Saaïdia

  Pérenniser l'action d'entretien de l'environnement en « systématisant » cette mission. Inscrire l'acte dans la durabilité et ne plus le réduire à des campagnes.

C'est l'objectif du wali d'Oran, Mouloud Cherifi. Il n'y a rien de spécial là-dedans. Rien d'innovant sur le plan théorique. Sans préjuger de la suite, il faut se rappeler que depuis Zoukh jusqu'à Zâalane, en passant par Sekrane et Boudiaf, dans le discours, on critiquait le mode des campagnes, mais dans la pratique on ne faisait que ça.

Question qui s'impose : pourquoi le thème de l'environnement et de l'hygiène du milieu revient en boucle et en caractère gras à chaque changement de wali. Réponse à chaud : parce que celui qui vient veut toujours commencer le corps (wilayal) par la peau. Pour marquer le début de son investiture, le nouveau responsable s'en prend à la forme, aux apparences, avant d'en venir au fond, à l'essence. Avant même qu'il ne foule le sol de sa nouvelle wilaya, il juge par anticipation qu'elle n'est pas assez propre -ce qui est en fait toujours le cas indépendamment du numéro d'immatriculation-, qu'elle a besoin d'une bonne toilette. Car, finalement, l'aspect qu'il soit conforme ou non à la réalité, c'est sous lequel l'objet apparaît à la vue, et parfois à l'esprit aussi. D'où cet intérêt, cette fixation du nouveau « chef », portée en premier lieu, sur l'aspect de sa nouvelle ville, son état apparent, ses portes et entrées principales, via port et aéroport, surtout si elle en possède, son circuit officiel dédié aux cortèges, ses grands boulevards, ses pôles et sites phares, son centre-ville, les autoroutes, les RN et les CW, les plus fréquentés et les plus en vue de son réseau routier interne. C'est, donc, d'abord une question d'apparence, et par conséquent d'effet psychologique sur les administrés et du coup de bonne note d'appréciation à créditer au compte de sa carrière personnelle de haut commis de l'Etat, avant d'être un enjeu et une préoccupation sincère et sérieuse, à l'égard de la propreté et de la salubrité publique. C'est bien connu dans les annales de l'Intérieur et des Collectivités locales mais aussi dans son barème d'évaluation des gestionnaires de la « Locale », la propreté publique est abordée comme une composante importante du bien-être de tous les jours, outre son effet psychologique sur les citoyens comme les visiteurs, de même que le nettoyage est une affaire de santé publique tant il constitue une première ligne de défense contre les virus et les maladies infectieuses.

L'Environnement, thème récurent de la gouvernance locale

Or, le fait que chaque nouveau chef de l'exécutif de wilaya remet au goût du jour le problème de l'entretien de l'environnement (dans son aspect le plus rudimentaire et banal: le ramassage de déchets), cela n'est pas, en soi, un signe de bonne santé. L'entretien de l'environnement et de manière générale l'hygiène publique n'a pas besoin du wali. Ce n'est pas son affaire. Sauf dans des cas extrêmes. Cette mission régalienne de la commune et qui en constitue l'une des raisons d'être est censée fonctionner en mode automatique. 365 jours, 7/7 et H/24. Sans aucun répit ni la moindre baisse de régime. Le service qui en assure les prestations doit être réglé et paramétré (en termes de moyens matériels et logistiques, main-d'œuvre, plan de gestion de la collecte des ordures?) en fonction de données bien précises. Et non pas à vue de nez. Les périodes de pic, comme c'est le cas au mois de Ramadhan et en saison estivale, la machine se met en mode « heigt level » automatiquement. On n'en est pas là dans le cas de la ville d'Oran, dont on veut faire la métropolisation, rien qu'avec des fantasmes et en surfant sur la vague des Jeux méditerranéens 2021. Dans une ville où les CET, les incinérateurs, les bennes-tasseuses, les bacs à ordures... sont en nombre très insuffisant, sous l'effet accentuant de la déperdition et de la mauvaise maintenance, et où il n'existe pas un schéma de gestion (nettoiement, ramassage, collecte, enlèvement et évacuation) des déchets (ménagers, inertes, spéciaux?), et où des phénomènes tels le rejet de matériaux excédentaires de chantiers BTPH et d'auto-construction ou d'incinération d'ordures sur la bordure même des routes et des périphériques, relèvent du fait divers banal et sans la moindre réaction institutionnelle, il n'y a pas de quoi pavoiser.

Parc communal DHA : ultimatum et ouverture d'enquête

Le wali, qui avait affirmé à l'occasion de sa première réunion du conseil exécutif et de la plénière de l'APW, que la prise en charge du dossier environnement était au cœur de son plan d'action, a effectué deux sorties successives, mercredi et jeudi, pour superviser, entre autres, une opération de nettoiement, dont il avait donné le coup d'envoi, il y a quelques jours, ciblant l'axe RN13 entre le rond-point d'El-Bahia et l'aéroport, mais aussi pour s'enquérir de l'état des lieux dans d'autres principaux axes pénétrants de la ville. Lors de sa visite de mercredi, il a surtout appelé les gestionnaires du Parc communal d'hygiène et nettoiement de la ville d'Oran (géré par la division de l'Hygiène et de l'Assainissement DHA) à faire des propositions concrètes pour mieux rentabiliser cette base logistique. Il leur a accordé un ultimatum de 15 jours.

Le but étant d'en faire une force commune qui intervient, en appoint, au système classique de collecte des ordures ménagères et mettre, de manière pérenne, des équipes et des moyens », a-t-il déclaré, en déplorant de voir un « cimetière » de matériels de collecte d'ordures immobilisés qui nécessitent une simple réparation. « C'est intolérable aussi de voir que certains endroits de la ville d'Oran ne soient pas traités pendant que des secteurs urbains en souffrent faute de moyens de collecte », a-t-il ajouté le chef de l'exécutif évoquant l'ouverture d'une enquête pour connaître la situation qui prévaut dans cette structure. Le Parc communal de la DHA assure l'entretien d'une vingtaine d'engins de collecte des ordures ménagères de 9 secteurs urbains parmi les 12 dont dispose la ville d'Oran. La collecte dans les 3 secteurs urbains restants est assurée par l'Epic Oran Propreté et les concessionnaires privés. Au siège de l'EPIC Oran Propreté, il a eu droit à des explications sur la gestion du parc, qui souffre de l'exiguïté des locaux.

Une sortie est prévue ultérieurement pour mettre à la disposition de cette entreprise de wilaya un nouveau site à Mers El Kébir pour renforcer ses actions. Jeudi, le wali a carrément court-circuité les 2/3 des points programmés sur son circuit de visite et au lieu et à la place de Santa Cruz et Mers El-Kébir, prévus au programme, la presse qui l'accompagnait a eu droit un long périple jusqu'à Kristel via Canastel avec un chemin de retour via la forêt de Ras El-Aïn de Gdyel sans pour autant saisir ni l'objet ni l'objectif de ce long détour.