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Restriction des importations: Les opérateurs prédisent une rentrée sociale difficile

par Mokhtaria Bensaâd

Les opérateurs économiques appréhendent une rentrée sociale bien difficile avec l'application des nouvelles mesures en matière d'importations. Au moment où la liste des produits interdits à l'importation s'allonge, la dernière liste établie par l'association professionnelle des banques et des établissements financiers (ABEF) datant du 3 août dernier, les opérateurs économiques ne se retrouvent plus dans ce nouveau régime des licences d'importation. Pour certains, la décision d'interdiction a été prise dans la précipitation sans aucune étude préalable du marché et des conditions d'importations. Pour d'autres, l'onde de choc de ces mesures de suspension d'importation des produits sera fortement ressentie par le consommateur avec les pénuries qui vont pointer du nez à la rentrée sociale et l'augmentation des prix de tous les produits. On annonce d'ores et déjà une augmentation des prix des viandes rouges et blanches ainsi que les œufs à cause de la limitation du quota d'importation de l'aliment de bétail dans le cadre des nouvelles mesures. Selon un producteur de l'aliment de bétail à Oran, « la décision d'interdiction d'importation a été prise du jour au lendemain sans aucune préparation du terrain pour les opérateurs économiques. Ce qui a provoqué une perturbation dans l'activité des entreprises. Avant de passer à l'interdiction, il fallait d'abord procéder à changer tout un mécanisme avec lequel les opérateurs économiques sont habitués à travailler. Maintenant que nous avons été mis devant le fait accompli, nous allons droit vers l'abattage obligatoire à cause de la limitation d'importation de ce produit. Les éleveurs d'ovins, bovins et volaille, ne pouvant pas assurer leur approvisionnement en aliment de bétail, vont limiter leurs cheptels. Ce qui va se répercuter directement sur les prix ».

Dans le secteur médical, le gérant d'une entreprise de production pharmaceutique tire la sonnette d'alarme sur les consommables qui seront indisponibles sur le marché suite à la suspension des importations. L'exemple le plus simple est le manque de blouses stériles, un produit désormais interdit par les nouvelles mesures alors qu'il n'existe pas de sociétés de production de blouses stériles en Algérie, a souligné notre interlocuteur. Il nous a expliqué : «Nous avons récemment importé un échantillon et nous avons été informés par les services des douanes que ce produits ne sera plus autorisé à être importé. Comment faire alors ?»

La pré-domiciliation bancaire fait grincer des dents des opérateurs économiques

Effet des nouvelles dispositions en matière d'importation ou problème bureaucratique qui a la peau dure ? La crédibilité des opérateurs économiques est en jeu à cause de cette lenteur dans la livraison de ce document. Mise en place dans le but d'améliorer le dispositif de contrôle et de facilitation administrative de traitement des opérations de commerce extérieur, la pré-domiciliation est devenue une contrainte pour les opérateurs. Un responsable d'une société de production de non-tissé à Oran nous a expliqué qu'entre l'établissement de la date de valeur et le transfert du chèque à la banque du fournisseur à l'étranger, les délais sont parfois longs. Ce qui se répercute négativement sur l'activité de l'entreprise et met l'opérateur économique dans l'embarras par rapport à son fournisseur étranger. Un autre responsable d'une société de fabrication de produits informatiques estime que depuis l'application de cette nouvelle loi, Il y a amalgame entre les produits concernés par cette mesure et les produits non concernés. L'administration n'arrive pas à faire une distinction entre le produit fini qui est soumis à la licence d'importation et la matière première importée par les producteurs et qui ne rentre pas dans le cadre de cette nouvelle mesure. A cause de cet amalgame, la procédure de pré-domiciliation devient compliquée. Il n'y a pas de doute pour les opérateurs économiques, théoriquement, toutes les lois élaborées dans le secteur économique promettent monts et merveilles tant qu'elles ne sont pas confrontées à la réalité du terrain. On a beau promulguer de nouvelles lois, elles sont inefficaces une fois mises en application sur le terrain. C'est ce que nous a déclaré la gérante d'une entreprise de fabrication de produits chimiques à Oran. «La liste des produits interdits à l'importation s'allonge et nous en tant que producteurs, c'est le parcours du combattant pour avoir l'autorisation d'importation. Notre dossier a été déposé au mois de novembre 2016 au niveau du ministère de l'Energie et depuis, nous attendons toujours la délivrance de ce document. On nous parle de circuit vert pour faciliter le dédouanement pour les producteurs, mais sur le terrain, cette facilitation n'est pas palpable. Il y a, certes, beaucoup de lois pour encourager la production nationale mais toutes ces lois ne trouvent pas encore l'environnement adéquat pour prouver leur efficacité», nous dira cette gérante.