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Algérie ? France: La tentation du pouvoir absolu

par Bruxelles: M'hammedi Bouzina Med

Quel parallèle entre l'élection présidentielle, en France et celles législatives, en Algérie ? Quelle leçon en tirer?

Les débats croisés autour des élections législatives, chez nous, et l'élection présidentielle, en France, ont soulevé bien des interrogations qui, à priori, n'avaient aucune similitude politique autre que celle de la mise en concurrence du caractère démocratique et transparent du système politique français, par rapport au caractère trouble, frauduleux et donc anti-démocratique, du système politique algérien.

L'intérêt de chaque peuple pour l'élection qui le concernait s'est, largement manifesté dans l'implication des citoyens, donc des taux de participation. A priori, seulement, puisque dans les deux pays se posent, aujourd'hui, d'autres interrogations et des doutes. C'est que, en Algérie comme en France, ces deux moments politiques ont « explosé » leur champ politique national respectif. L'opposition en Algérie, un temps acteur marginal du système, a perdu l'infime poids politique dont elle se prévalait et tombe dans l'indifférence citoyenne. L'Algérie renoue, sous une autre stratégie, avec le système du parti unique et tout ce qu'il a engendré comme perversités socio-politiques. En France le risque d'une atrophie de la vie politique est réel: Emmanuel Macron et son mouvement ?En Marche !' ( remarquez le point d'exclamation) donnent tous les signes d'une volonté d'une prise en otage de toute la vie politique française, aux fins de gouverner seuls la France. Comme une odeur de «dictature» d'un seul parti dominant le tout. En tirant sur le traditionnel débat Gauche- Droite qui anime la France depuis la Révolution de 1789 et en l'accusant d'être le «problème» du pays, Emmanuel Macron manifeste des penchants à régenter seul la vie politique nationale. Autre stratégie d'imposer l'unanimisme et de tuer toute opposition. Vision pas si différente que celle du parti unique et de la congélation de la vie démocratique. D'ailleurs il n'y a qu'à voir comment ?En Marche!' se prépare aux élections législatives de juin. Ses candidats sont donnés vainqueurs d'avance et il fait de la surenchère pour adouber tel ou tel candidat venu d'un autre camp politique ( le cas de l'ex Premier ministre Manuel Valls est éloquent) ou pour ménager tel autre candidat en ne présentant pas son propre candidat dans la même circonscription. ?En Marche!' faiseur de roi et de roitelets. Nous y sommes dans les similitudes entre Alger et Paris: l'unanimisme et l'affaiblissement de toute opposition sous l'apparence d'une vie démocratique libre. Alger comme Paris verrouillent, chacun à sa manière, les débats politiques tranchés. Il ne reste que les apparences similaires, elles aussi: les discours médiatiques dominants en France comme en Algérie. Tout est fait, en France, pour hisser Emmanuel Macron au rang de «Roi» et «Messie» de la France (et de l'Europe), en ces temps de mondialisation et de révolution numérique. Voici le prophète de la post-révolution moderne du 3ème millénaire. Pareil en Algérie: plus besoin d'opposition ou de contre-pouvoirs. Juste quelques députés marginaux pour agrémenter les décors d'un parlement déjà acquis au programme présidentiel, serviteur patenté d'un système fermé et si loin de la volonté populaire dont il se réclame. Cependant, l'avantage du système français est qu'il dispose des moyens pour affronter la mondialisation et ce qu'elle exige comme compétences et acquis démocratiques, alors que le système algérien est désarmé face aux défis économiques et les dures règles de la mondialisation de ce siècle. Du coup, voilà une excellente raison pour un «réchauffement» des relations franco-algériennes: Alger a besoin du soutien de Paris dans son essor économique et pour affronter la voracité cannibale du marché mondial ; Paris a besoin d'Alger comme débouchés de son marché et surtout pour bien de raisons géostratégiques, en Méditerranée et en Afrique subsaharienne. Avec autant de croisements d'intérêts réciproques, Alger et Paris ne peuvent se passer d'une amitié particulière et Emmanuel Macron d'être autrement qu'un «ami de l'Algérie.»